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« J'ai apporté le petit déjeuner » furent les premiers mots que prononça Kita en franchissant le seuil de son appartement. Maniaque comme il était, Atsumu le voyait déjà en train de faire sa vaisselle, les avant-bras engoncés dans de délicieux gants en caoutchouc rose bonbon. Mais Kita avait un sens de la politesse plus fort encore, et il se limita à un froncement de nez en avisant le monticule de conserves vides.

- Tu manges... de la pulpe de tomate ? Demanda Kita en prenant l'une des conserves pour lire l'étiquette. Tu sais que ce n'est pas censé être mangé à l'état brut ?

Atsumu hausse les épaules depuis son clique-claque. Démuni, Kita repose la conserve à l'aveugle – résultat, elle tombe dans l'évier – et procède au déballage du petit déjeuner. Atsumu est déçu d'apprendre qu'il s'agit d'un petit-déjeuner traditionnel.

- Je n'aime pas la soupe miso.

- Mais c'est bon pour la santé.

Kita s'attable sans le brun, mais ne peut rester assis plus d'une seconde sans se préoccuper de son sort. Il se dévisse alors légèrement la nuque pour le voir ouvrir une conserve de pulpe de tomate. Sa bonté le perdra.

- Mange au moins le poisson.

Atsumu ne lui répond pas. Il mange la pulpe à même la conserve. Sa cuillère à soupe plonge dedans et en ressort pleine. Il la porte à sa bouche, l'enfourne d'une traite. Kita est à deux doigts de lui mettre un bavoir.

- Il faut à tout prix que tu te reprennes, Atsumu.

C'est alors que le brun recule précipitamment de la fenêtre, comme s'il venait de se brûler, et s'agrippe sauvagement aux rideaux qu'il a tiré dans sa panique. Il sent son sang palpiter à ses tempes. Les inquiétudes de Kita n'en sont que plus alimentées. Atsumu est tendu, craintif, comme torturé par sa conscience.

- Dis moi tu-

- Est ce que tu te souviens de Hinata Shoyo ?

Atsumu l'a brusquement coupé, des trémolos dans la voix. Kita cligne des yeux, tarde à se remémorer le personnage.

- Nous jouions dans la même équipe de volley à l'université. Je crois – non, en fait j'en suis sur – qu'il est devenu professionnel.

Kita secoue la tête, incapable de mettre un visage sur le nom.

- Mais si, il était dans la classe de littérature que tu encadrais !

- Un petit rouquin ?

- oui !

D'aussi loin que se souvienne Kita, Hinata était un élève plutôt médiocre, mais pas turbulent. Il respectait la concentration des autres, et pour cela, le gris le respectait. Il venait donner quelques cours de soutient à cette classe, qui était l'une des plus mauvaises de la fac. Hinata, disons, n'aidait pas à remonter la moyenne générale.

- Je crois que j'ai parlé de toi une fois, avec lui, murmura Kita. Oui, il m'a dit aussi qu'il comptait partir au Brésil.

Atsumu hoche la tête, risque un coup d'œil vers les rideaux fleuris.

- Il est là, en face.

- Quoi ?

Kita soulève un pan du rideau. Fronce les sourcils.

- C'est lui ?

Atsumu le sait déjà. Kita ne semble pas entendre.

Atsumu devrait le regarder de nouveau. Il n'est pas prêt. Puis il se rappelle que les regards coulent sur lui comme les gouttes d'une averse sur l'imperméable jaune d'Osamu. Le roux, comme prévu, ne le voit déjà plus. Il s'affère, entouré de cartons. Son air sévère surprend le brun.

- Nous changeons tous, commente-t-il à mi-voix.

L'heure tourne. Kita remballe le petit-déjeuner, le glisse dans le frigo du brun.

Avant de s'éclipser, il ordonne rapidement un amas de livres.

Kita lui a laissé un petit mot, entre la soupe miso et le poisson.

« Prends soin de toi. Mange. Appelle moi quand tu veux. Ton frère t'embrasse. PS - c'est lui qui a fait le repas. »


Under the same sky ||AtsuHina||Où les histoires vivent. Découvrez maintenant