Dimanche 5 septembre – 21h35 – Chloé
Un des derniers médecins non disparus venait de partir de la cafétéria pour aller voir s'il était possible de trouver une issue de secours afin de pouvoir appeler des renforts. Je voulus l'accompagner, mais avec Timothé, il était préférable que je reste avec les 9 autres personnes dans cette pièce. Visiblement, la cafétéria était assez à l'écart pour que les anges pleureurs ne viennent pas jusqu'à nous. Je ne comprenais pas trop la raison de cela, mais j'avais d'autres préoccupations : Samuel.
Le fait de vivre cette situation quelque peu... atypique, j'étais dans une sorte de déni du décès de Samuel. Ce matin-là, j'étais encore dans ses bras au réveil. C'était comme s'il était juste parti travailler et qu'il allait rentrer d'une minute à l'autre. Je n'avais pas à réaliser ma vie sans loin sur le long terme.
Nous n'arrêtions pas de grignoter de la nourriture issue des trois distributeurs présents dans la cafétéria. Je n'avais pas mangé depuis le matin même et mon ventre commençait à jouer une symphonie.
Deux infirmières étaient en train de discuter à messes basses, mais n'étant pas si éloignée d'elle, j'arrivais à entendre ce qu'elle se disait :
« On venait juste d'attester la mort du patient et là, on a entendu un cri. Quand Gérard est parti voir qui avait crié, on l'a entendu crier à son tour et puis plus rien.
- Comment ça plus rien ?
- Bah, il n'est jamais revenu quoi. On ne sait même pas ce qui leur est arrivé.
- Tu penses que ça a un lien avec ces statues partout dans l'hôpital ? D'ailleurs, qui s'amuse à ramener ça ici ? »
Visiblement, ces femmes ne suivaient pas ce qui se passait ces derniers jours au Nord de la France. La théorie des anges en pierre qui kidnappaient des Lillois me paraissait hilarante il y a encore quelques heures, mais aujourd'hui j'étais juste effrayée. Je fus confrontée à plusieurs d'entre eux et c'était le moment le plus terrifiant de ma vie.
« Je n'en ai aucune idée. Par contre j'espère qu'ils vont vite trouver un moyen de sortir car j'ai promis à mes enfants de leur faire leur plat préféré ce soir. Ils doivent encore être en train de m'attendre les pauvres.
- Tu as prévenu ton mari ?
- Non, je ne peux pas. Je n'ai même pas de réseau. »
La femme roula des yeux avant de vérifier à nouveau son téléphone portable. Je vérifiai le mien par la même occasion et constatai que je n'avais ni réseau, ni réponse de Théa et Mathéo et avec une batterie qui commençait à s'essouffler. Je sortis de mes pensées lorsque Timothé tira légèrement sur mon bras en se plaignant d'avoir encore faim. Je lui souris et lui rachetai à nouveau une des dernières barres chocolatées avant de la lui donner.
« Merci ! »
Le temps était très long, je ne savais pas combien de temps j'allais rester ici mais rien que pour aller aux toilettes il fallait risquer sa vie.
« Excusez-moi, vous avez du feu ? »
Une femme d'une cinquantaine d'années, brune, venait de s'adresser à moi.
« Je ne fume pas, désolée.
- Vous avez bien raison, rit-elle. Vous avez quel âge ? Si je peux me permettre...
- 21 ans.
- Oh ! C'est jeune pour être Maman, répondit-elle en me souriant, puis tournant son regard sur Timothé.
- Ah non, Timothé n'est pas mon enfant, c'est mon... »
Je ne sus pas quoi répondre. Elle avait l'air d'attendre la fin de ma phrase mais je changeai de sujet :
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Les anges pleureurs prennent Lille
Roman pour Adolescents"Je pensais que c'était irréel, que tout était truqué, mais lorsque je l'ai vu de mes propres yeux, alors là, je n'ai plus douté une seule seconde. Nous étions en danger."