Chapitre 22-2

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Les couloirs de la société étaient une suite de labyrinthes sans fin dans ce building à l'architecture moderne. Je suivais une assistante qui paraissait connaître chaque recoin de cet endroit. Patricia, c'était son nom, saluait sur son passage tout le monde qu'elle croisait. Les regards curieux se posaient sur moi. Les nouveaux employés s'interrogeaient, supposaient que j'étais le fils Olsen venu reprendre ma place et m'asseoir sur mon trône.

Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent sur le dernier étage. Patricia, avec un signe de main, m'invita à passer devant elle.

— Bienvenue chez vous, monsieur Olsen.

Je m'avançai lentement dans cet endroit où des bureaux étaient réunis, les uns à côté des autres, dans des espaces ouverts, sans cloisons. Frederick m'attendait, une bouteille de champagne à la main. D'autres personnes, dispersées autour de lui, applaudissaient. J'enfouis mes mains dans les poches de mon pantalon et lançai un regard faussement satisfait. Il fallait avouer que l'accueil était chaleureux et offrait l'image d'une société parfaite. Mon oncle lança fièrement à son équipe :

— Mesdames et messieurs, vous avez devant vous un homme plus impitoyable et certainement plus ambitieux que moi. Je vous présente mon neveu, Desya Olsen.

Frederick ne chercha pas à savoir où j'étais passé ces deux dernières heures. Il s'approcha de moi, et de son bras, il enroula mon épaule pour m'emmener à la rencontre des collaborateurs et des employés. Je saluai chacun d'entre eux avec une poignée de main énergique.

— Allons dans mon bureau, dit mon oncle, après les présentations. Il est temps de parler affaires.

Un groupe d'hommes nous suivit. Sûrement, le cercle de confiance le plus proche de Frederick.

Frederick me tendit une coupe de champagne. Debout, appuyé contre le bureau, je faisais face au groupe qui s'était installé sur des fauteuils et sur un canapé. Mon oncle avait laissé la porte ouverte, il attendait un investisseur important qui voulait me rencontrer.

Celui qu'on m'avait présenté comme Simon Richard s'adressa à moi :

— Frederick nous a beaucoup parlé de vous. Nous sommes heureux de vous avoir bientôt parmi nous. La société a besoin de sang neuf, de jeunesse. Cela commençait à sentir le vieux dans cet endroit.

Les rires fusèrent. En effet, je paraissais être le plus jeune.

— Vous nous quittez demain ? C'est bien cela ? demanda un autre collaborateur.

— Oui, je prendrais mes nouvelles fonctions au sein de la société dans quelques semaines.

Frederick changea de sujet :

— Je disais, hier, à mon neveu, que la plupart des mines de diamants s'épuisaient lentement. C'est lui qui a suggéré que nous investissions dans d'autres extensions, comme le Canada.

— Les produits se font rares, mais la demande, elle, est toujours aussi croissante, déclara un autre homme à côté de Richard.

Mon oncle se tourna vers moi.

— La masse de travail s'accumule de façon exponentielle. Je ne m'inquiète pas pour toi, je sais que tu apprendras vite. Tu es un Crow.

Après ça, je répondis à leurs questions, échangeais sur les idées et donnais mon avis sur le cours de la bourse.

Plongé dans les discussions économiques, je n'avais même pas vu que le soleil avait décliné dans le ciel. La nuit s'installait sur la ville. Il était bientôt l'heure d'aller dîner. Au moment de laisser les collaborateurs s'en aller, Frederick s'avança vers de moi et me donna une petite tape sur l'épaule.

— J'ai vraiment eu l'impression de te retrouver cet après-midi. Desya, tu vas accomplir de grandes choses et perpétuer les valeurs d'Olsen Corporation.

Nous nous dirigeâmes vers les portes de l'ascenseur.

— J'ai quelque chose pour toi. Tu n'es pas encore de retour de façon définitive, c'est un cadeau un peu en avance.

Dans le sous-sol, mon oncle s'approcha d'une sublime berline sportive de couleur noire. Un sourire fendait son visage.

— Cette Porsche Panamera est à toi.

J'ouvris de grands yeux de surprise avant de faire le tour du bolide.

— À moi ?

— Tu l'aimes ?

— Elle est magnifique. Merci. Ça fait une éternité que je n'ai pas fait rugir un moteur comme celui-ci.

Encore sous le choc, j'attrapais, dans un réflexe, les clefs que Frederick me lança.

— Vas-y. Va faire un tour. Je te rejoins au club pour dîner.

Absorbé dans la contemplation de la carrosserie, j'entendis à peine les paroles de mon oncle.

— Tu ne veux pas monter avec moi ?

— Non, dit-il. J'ai quelques coups de fil à passer au travail. Je te rejoins tout de suite.

Je hochai la tête puis montai avec hâte à l'intérieur de la Porsche. Frederick resta à côté de moi jusqu'à ce que j'allume le contact. Le bruit puissant du moteur m'arracha un rire d'excitation.

— OK, montre-moi ce que tu as dans le ventre, ma belle !

Les pneus crissèrent sur le sol. Je m'élançai, libre, dans les rues de New York.

La vitre baissée, je roulai au hasard dans la ville. La vitesse, l'odeur du cuir neuf, m'avaient toujours plu. L'esprit encore encombré par Blue, je tentai de penser à autre chose. En vain. Son sourire, son regard, ses caresses sur ma peau, revenaient toujours me torturer. Même s'il était certain qu'elle avait couché avec ce fils de pute de Paolo, je n'arrivais pas à tirer un trait sur elle. À cette pensée, les muscles de ma mâchoire se resserrèrent. Ivre de jalousie, de rage, je poussai l'accélérateur jusqu'à sentir le vent me mordre le visage.

Burn, beautiful Crow ( Version Française )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant