Assise sur le banc de cette église, je regardai mes pieds habillés de talons aiguilles noirs. Une musique d'orchestre emplissait la salle et faisait écho sur la pierre froide. On entendait des pleurs, un bruit malheureusement bien courant entre ces murs. Les rayons du soleil s'infiltrant à travers les vitraux créaient un magnifique mélange de couleur qui caressait nos chemises et robes noires. Le prêtre, un grand homme de la cinquantaine, regardait l'assemblée effondrée devant lui. On pouvait voir sur son visage ridé, un semblant d'émotion qui voulait se faire passer pour de la peine. Mais je savais bien qu'il avait l'habitude.
Je ne pleurai pas, les yeux toujours fixés sur le cuir poli de mes chaussures. On entendit les portes de l'église s'ouvrir, alors je relevai la tête.
Quatre hommes en costumes noirs avançaient d'une démarche régulière mais lourde. Leurs talons claquaient sur la pierre qui servait de sol au bâtiment, et leur expression froide les déshumanisait.
Sur leurs épaules, cette boîte noire, que je redoutais tant de revoir un jour.
S'en fut trop pour Maud qui dû poser sa main sur ses yeux, elle ne voulait certainement pas voir la vérité en face, comme chacune de nous.
La boîte continua son chemin vers l'autel, couvert d'une nappe blanche immaculée. Devant celle-ci, une plus petite, attendait juste d'être utilisée, d'avoir à porter le lourd fardeau. Les hommes posèrent la boite dessus et le silence pris place, la musique s'étant éteinte.
Je sentis Maëlle poser sa main sur mon épaule, non pas en geste de réconfort, mais plus certainement pour se retenir afin de ne pas tomber. Ce silence me parut être de trop. Avait on peur de la réveiller ? Si c'était le cas, alors j'aurai préféré crier à pleins poumons. Je n'entendais plus les reniflements, les larmes coulant sur les joues, les sanglots non refoulés, ni même cette satanée horloge à balancier qui me paraissait faire trop de bruit un peu plus tôt.
Juste le silence, pesant, effondrant.
Ce fût enfin l'heure de déposer les fleurs sur la boîte. Je me levai, accompagnée par mes amies, et nous marchâmes jusqu'à l'autel. Je posai ensuite ma rose sur le bois noir et doré. Les pétales rouges se mariaient parfaitement avec la couleur de la boîte. Je me disais alors qu'elle adorerait certainement, elle, ayant toujours eu un goût pour le style.
_ Adieu...chuchotai-je.
Avant de retourner à ma place, je jetai un dernier regard vers la photo de mon amie décédée. Elle souriait sur la photo, et sa bonne humeur si contagieuse me manqua sur le coup. Je lui souris une dernière fois avant de lui tourner le dos.
_ Cassy ?
Je sortais de mes pensées pour me tourner vers Lucas qui me regardait avec étonnement. Je soufflais en fermant les yeux avant de reprendre une bouffée de nicotine. Lucas me suivit peu de temps après en s'étirant comme un chat sur sa chaise.
Notre appartement étant au dernier étage nous avions la chance d'avoir accès au toit. Alors, de nombreuses fois par jour, nous nous y rendions ensemble pour fumer un peu.
_ Je ne t'écoutais pas, lui dis-je sincèrement, répète.
Le brun leva les yeux au ciel avant de reprendre ce qu'il disait.
_ Je te prévenais juste que je dois passer à la pharmacie cet après-midi. Il ne me reste plus beaucoup de médicaments de mon traitement.
J'hochai la tête. Lucas était atteint de paranoïa aiguë ce qui l'avait rendu insomniaque. Nous ne savions pas si c'était un avantage ou un inconvénient mais ses crises ne se manifestaient que le soir. Je savais que cela avait commencé lorsqu'il avait été obligé de changer de logement toutes les nuit pour échapper à la mafia qui lui en voulait. De là est née sa paranoïa, c'est un traumatisme qu'il ne peut pas soigner.
Hormis les somnifères que lui prescrivait son médecin, le fait de sortir et se battre contrait ses crises. C'était combattre le feu par le feu.
_ Alors tu comptes dormir ce soir ? demandai-je.
_ Oui, à moins que tu aies des plans pour nous, je n'ai rien de prévu personnellement.
_ Moi, non plus. Je pense qu'une petite pause nous fera du bien.
Il me sourit avant de se lever et partir chercher ses médicaments. A ce moment-là mon téléphone vibra.
_ Allo ? répondis-je.
_ C'est l'unité quatre à l'appareil, je dois parler à Cassy.
L'unité quatre était placée à Grenoble, c'était donc l'unité la plus proche de nous lorsque nous étions encore toutes ensembles.
_ C'est moi, quel est l'objet de cet appel ?
_ J'ai des informations pour vous, celles que vous m'avez demandé de trouver il y a un peu plus d'un mois.
Je bondis de ma chaise en lui ordonnant de me les donner.
_ Marine Veglio, le membre que vous cherchez a été localisé. Elle était présente à une soirée sur Lyon ce week-end. Elle était au bras d'un homme blond aux yeux bleus. Je suis navrée mais c'est tout ce que nous avons.
_ C'est largement suffisant, merci beaucoup !
Je raccrochai avant de crier de joie. Marine était toujours sur Lyon et avait visiblement intégré la mafia de son copain, Clément. C'était une avancée incroyable, il ne me restait plus qu'à contacter la mafia alliée.
Je me précipitais dans ma chambre à la recherche d'un petit carnet rouge. Après avoir retourné mon bureau et mon placard, je le trouvai sous mon lit. Avec empressement, je tournai violemment les pages jusqu'à celle ayant pour titre "Black Wolves". Je tapai rapidement le numéro de téléphone sur le mien avant d'appeller.
_ Qui est à l'appareil ? m'agressa la personne qui répondit.
_ Infinity ! Je fais parti d'Infinity ! Je veux parler à Marine Veglio.
Il eut un long silence à l'autre bout de l'appareil et je commençai à perdre espoir jusqu'à ce que l'homme réponde.
_ Cassy ? Vous êtes bien Cassy de la tête d'Infinity ? C'est Clément à l'appareil.
_ Oh mon dieu, dis-je pour moi-même avant de répondre. C'est moi ! Marine est avec toi ?
Il eut de nouveau un silence avant que ce ne soit une autre voix qui m'interpelle.
_ Cassy ? C'est Marine...
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Infinity : Retour aux origines
ActionPrès d'un an s'est écoulé depuis les évènements tragiques. Je me retrouve seule, livrée à moi-même. Je ne sais pas où sont les autres, ce qu'elles font, si elles sont toujours en vie. Mais je continue mes recherches, toujours dans l'espoir de reform...