À l'usure [DekuBaku]

Chapitre 3 : un simple petit grain de sable

- HO FERMEZ VOS GUEULES !

Katsuki a crié à peine plus fort que d'ordinaire, et il sait déjà que ce sera largement suffisant pour se faire respecter.

Comme attendus, les décibels désagréables qui le dérangeaient baissent d'un ton, précédé d'un « Désolé » parfaitement audible malgré la cloison qui les sépare. En soupirant, Katsuki se dit une fois de plus, que ce serait bien de revoir l'isolation de ces murs.

Sinon, il pourrait aussi faire l'effort de se trouver un logement à lui, là où personne ne viendrait le déranger. Katsuki pourrait garder éternellement sa porte close et tout irait bien dans le meilleur des mondes. Mais il sait qu'il ne le fera pas. Il sait que ce mois-ci encore, tout en râlant contre le montant, il s'acquittera du loyer. Comme tous les mois, encore, ses colocataires ne manqueront pas de lui faire une remarque à ce propos, se moquant ouvertement, tous en veillant à ne pas se prendre un coup.

Malheureusement, bien que les bruits soient étouffés, ils sont toujours là. Katsuki ne pouvait pas non plus s'attendre à un miracle. Grognant doucement, plus pour la forme que pour réellement exprimer un mécontentement, l'homme récupère une vieille paire d'écouteur sur la table basse. Il les fourrage vivement dans les oreilles pour mettre à fond une musique quelconque de sa réserve. Rapidement, le son monte et l'englobe. C'est peut-être un peu trop fort, mais Katsuki préfère largement cette mélodie à la précédente alors il fait avec sans trop se plaindre.

Regagnant ses préparations, l'homme retourne éplucher ses légumes, laissant la mélodie taper sur sa boîte crânienne au rythme électrique des basses. Il ne sait même pas qui est l'artiste et il s'en fout un peu à vrai dire. Du moment que cela l'empêche de se concentrer sur autre chose, cela lui va.

Alors que Katsuki en est à sa troisième carotte, ses narines détectent soudainement une senteur plus vive que les autres, le tirant de ses pensées. Une odeur qu'il connaît bien. Mais il se serait bien passé de la senteur de musc et qui va avec.

Incommodé, Katsuki ne peut s'empêcher de retrousser le nez, sachant pertinemment ce que ce mélange signifie.

Retirant un écouteur de ses oreilles, Katsuki entend distinctement le bruit d'une porte qui grince au loin. Malgré le son tonitruant dans son oreille gauche, il perçoit les déplacements de l'individu dans le couloir. Une autre porte s'ouvre peu de temps après, puis se referme aussitôt, laissant le silence s'installer. Enfin.

Katsuki coupe la musique en soupirant, ravi de ne plus avoir à se bousiller les oreilles pour éviter que des images désagréables ne surgissent dans son esprit. Il accueille avec plaisir le calme qui s'installe autour de lui.

Le silence.

Katsuki a toujours apprécié cette absence de tout. Lorsqu'il n'y a plus aucun bruit autour de lui, il a le sentiment d'être seul au monde. C'est une sensation qu'il a appris à apprécier au fil des années. La préférant largement au bruit assourdissant d'une ville en plein mouvement ou d'une foule compacte et bruyante.

Parce qu'avec le silence, vient aussi l'apaisement. Les signaux démultipliés disparaissent. Ne reste que lui et son odeur. Sa bulle.

Un court instant, ce calme lui donne envie de relâcher ses sens et sa concentration. Mais cela ne dure pas bien longtemps.

« Tu dois toujours faire attention, Katsuki ».

Ouais, c'est vrai. Toujours faire attention.

- Hé mec, ça va ?

Accordant à peine un coup d'œil à son interlocuteur, Katsuki se détourne sans répondre. Il n'a pas oublié les raisons qui l'ont poussé à s'exploser les oreilles. Il retourne à ses préparations, tout en sachant parfaitement que le nouveau venu a eu tout le temps de voir l'animosité assombrir légèrement ses traits.