À l'usure [DekuBaku]

Chapitre 13 : il ne reste plus que des cartons

Lorsqu'il était petit, Katsuki se souvient que son père l'emmenait souvent au parc pour enfant. C'était l'un des seuls endroits où ils pouvaient aller sans crainte. En tout cas, c'était ce que son papa disait.

L'école, ça ne comptait pas. Katsuki n'aimait pas l'école. Les autres enfants criaient et se chamaillaient tout le temps. Il finissait toujours par être puni et par se faire gronder. Même lorsqu'il n'y était pour rien. La faute à son mauvais caractère disait la maîtresse.

Mais le parc, c'était bien. Tout sentait bon l'herbe fraiche et le bien-être. Il y avait comme une forme de légèreté dans l'air lorsqu'il descendait le long du tobogan dinosaure.

Un peu plus loin, son père le regardait faire en souriant. Ici, il était heureux et ça faisait plaisir à Katsuki. Parfois, son cousin venait se joindre à lui et les deux garçons jouaient aux pirates en riant. C'était une belle époque, où les seconds sexes n'existaient pas et où tout semblait plus magique et fantastique que triste et morose.

Parfois, quand il s'asseyait à côté de son papa pour le goûter, il lui caressait la tête. Puis, il lui disait de graver cette odeur dans sa tête ; que c'était à ça qu'il devait penser pour garder le contrôle. Katsuki était petit, alors il ne comprenait pas très bien ce que ça voulait dire. Mais il hochait la tête pour montrer qu'il était d'accord. Ça faisait toujours plaisir à son papa lorsqu'il l'écoutait.

Et puis, son papa avait raison, l'air était vraiment agréable. Katsuki ne voulait pas oublier cette odeur. Tout autour d'eux, il y avait toutes ces dames et ces messieurs avec des gentils sourires. Ils sentaient tous bon le sucre et les gâteaux. C'était doux et rassurant, comme lorsque son père lui souriait.

Parfois, le petit garçon voyait aussi le ventre rond d'un parent venu s'installer sur un banc un peu plus loin. L'odeur était encore plus douce. Ces gens au ventre rond, avaient toujours l'air très heureux. Katsuki ne pouvait pas s'empêcher de les regarder avec curiosité. Ça devait vraiment être quelque chose d'incroyable.

Quand il avait demandé à son père de quoi il s'agissait, il avait rigolé. Il avait secoué ses cheveux tout mélangés et avait dit que c'était comme ça qu'on faisait des bébés. Katsuki avait trouvé ça incroyable, qu'il y a des gens qui aient le pouvoir de faire sortir des bébés de leurs ventres, comme ça.

Mais quand Katsuki avait dit qu'il voulait aussi avoir un ventre rond, pour voir ce que ça faisait, son père avait cessé de sourire. Il avait même eu l'air pas content du tout. Il avait dit qu'il ne devait pas faire comme les autres, juste pour suivre sa condition. Qu'il ne devait pas finir comme ça.

Katsuki n'avait pas trop compris pourquoi vouloir avoir un ventre rond était une vilaine chose. Mais son papa devait avoir raison. Il avait eu un ventre rond lui aussi, il devait forcément savoir si c'était bien ou mal.

Katsuki n'avait pas insisté. Il était retourné jouer dans le bac à sable et n'avait plus jamais reparlé des ventres ronds. Pourtant, il les avait toujours regardés du coin de l'œil, un peu envieux. L'ami de sa maîtresse lui avait même laissé toucher le sien. C'était chaud et ferme. Elle avait dit qu'un petit allait sortir, comme lui était sorti de son papa.

Alors en secret, Katsuki s'était promis d'essayer, un jour. Avoir un ventre rond, puis serrer contre lui la petite vie qui en sortirait en lui disant qu'il l'aime très très fort.

Mais ça, c'était son secret. Son secret rien qu'à lui.

Ça lui manque un peu, l'époque de son enfance. Tout était plus simple lorsqu'on ne connaissait pas encore son second sexe. Ni ce que cela impliquait.