Chapitre 1

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Le sang cogne contre mes tempes. Les lumières bougent à toute vitesse sous mes yeux, la chaleur fait travailler chacun de mes muscles. Ma tête, elle, est pourtant ailleurs. Je pensais que rester à Beacons Hills me permettrait de refaire surface, de maccrocher à tous mes souvenirs, aussi bons que douloureux. Ce nest pas faute davoir essayé. Ce matin, face à mon miroir, jobservais mon corps nu. Ma peau était bien trop pâle, mes yeux ternes, mon sourire fané. Les seules couleurs vives résidaient dans le brun de mes cheveux et de mon épidermes écorché. Mon bras et mes cuisses étaient zébrés de coupures, certaines se voyaient à peine, dautres étaient fraichement cicatrisées ou encore à vif. De lautre côté de la salle de bain, Nadège rentrait dans notre chambre. Elle revenait du réfectoire, où je nai pas daigné my présenter. Ma colocataire ne faisait pas de bruit, encore à chaud de notre dispute. Je me suis empressée de me couvrir afin de lui libérer la place. Nous navions pas échangé un mot, juste un regard de biais.

Je reviens subitement à la réalité, lorsque la chorégraphie est terminée. Jai donné toute mon énergie à secouer des pompons pour encourager notre équipe de lacrosse. Jai laissé mes émotions guider mes pas, ma rage guider mes bras. Jobserve Axelle, dans sa petite tenue rouge et ses cheveux en bataille. Tout ce quelle souhaite cest aller sasseoir pour reprendre son souffle. On sinstalle à côté de la touffe blonde de Nadège, dans les gradins réservés aux joueurs. Le match sest soldé par une victoire de Beacon Hills, cest maintenant à deux autres camps de saffronter sur notre terrain. Je fouille dans mon sac pour trouver ma bouteille deau. A la place, ma main rencontre une fine chaîne où pendait une larme en cristal. Le collier de mon père. Ma poitrine se serre à cette vue. Mes parents me manquent ; le vide quils laissent dans mon cur ne se recomblera jamais. Je ne pourrai plus les regarder une dernier fois pour dire à quel point je les aime. Les larmes ne viennent pas jusquà mes yeux mais une étrange colère, bien plus puissante, sempare de mon âme. Ma tête tourne, la lumière magresse et les hurlements des supporters deviennent bien trop insupportable. Je descends de mon perchoirs et me cache entre deux gradins. Une douleur aiguë sinstalle à larrière de mon crâne. Elle est si forte quelle mempêche de penser. Je couvre mes oreilles de mes mains, en espérant faire taire la souffrance, en vain. Je resserre mon emprise sur le pendentif et une sensation de brûlure apparait au creux de mes doigts. Ma respiration saccélère, je peine à respirer correctement. Prise de folie, je lance le cristal sur le sol et vide lair de mes poumons dans un cri grave. Le bijou séparpille en différents morceaux à travers les brins dherbe. Une ombre se dessine sur le sol, face à moi. Je maperçois quil sagit de Liam Dunbar, le joueur neuf de lacrosse.

— Tout va bien ?

Une fille que je naime, à lallure trop parfaite, laccompagne. En guise de réponse, je méloigne avec un grognement sourd. Je me mets à courir, à toute allure, vers les vestiaires du lycée. Au loin, jentends Axelle retenir ma colocataire. Dans ces situations, mes amis les plus proches savent quil ne sert à rien de me poursuivre. Jentre dans le vestiaire des filles et meffondre au sol. Le dos et la tête appuyés contre un casier, je fixe le plafond. Je commence à compter les trous dans celui-ci, afin de calmer les battements de mon cur. Après ce quil me semble une éternité, je suis enfin calmée. Des voix sélèvent dans le bâtiment et je reconnais celle de Liam.

— Je nai rien senti, rien du tout ! Même pas sa colère !

— Scott à raison, linterrompt une voix féminine. Si cétait le cas, on le saurait.

Je nai pas pu suivre le reste de leur discussion. Scott McCall vient dentrer doucement dans le vestiaire après avoir toqué.

— Amanda ?

Il me trouva facilement à lautre bout de la pièce. Il sagenouilla à ma hauteur et posa ses yeux sombres sur mon visage cramoisie.

— Ca va te paraitre bizarre, commence-t-il, mais même si on ne se connait pas, tu peux venir me voir. Si tu as besoin daide je serai là pour discuter

— Non, ça va merci.

Je me relève doucement et me retourne vers mon casier.

— Jai juste passé une mauvaise journée, rien de plus.

Scott resta derrière moi un instant. Voyant quil naurait pas plus dattention de ma part, il sortit rejoindre le reste de sa bande.

Mon sac sur le dos, toujours dans ma tenue de pom-pom girl, jarrive à la maison de Lawn. Ce lieu communautaire regroupe tous les étudiants sans parents ou vivant trop loin du lycée. La bâtisse est gigantesque mais le nombres de jeunes y vivant est bien plus grand. Généralement, comme pour moi, les chambres sont partagées. Ce soir, je suis seule. Je mempare dun plateau repas et monte avec. Je grignote quelques frites mais lenvie nétait pas là. Tout ce dont je rêvais était un bon bain chaud. Je mempresse de faire couler leau dans la baignoire, le temps de me déshabiller. Vide desprit, jallume machinalement de la musique sur mon téléphone et attrape ma lame de rasoir, coincée sous une planche mal vissée. Jentre dans leau, jétale mes jambes engourdies puis je ferme les yeux. Dun simple mouvement, je fais glisser le tranchant de mon arme sur mon avant-bras. Je réitère une seconde, et une troisième fois. Jai limpression de nêtre quun corps ambulant, sans âme, sans but. La colère, la tristesse, le désespoir ont prit le contrôle sur ma vie. Je suis rongée de lintérieur. Les évènements daujourdhui nont pas sût arranger les choses. Je me sens minable, salie, inutile. Pourquoi la lumière au bout du tunnel ne serait pas plus attirante que le néant au creux de ma poitrine ? Je regarde mon bras, tâchant leau impeccable par mon sang. Ça ne me suffit plus, je ny arrive plus. Je soulève ma main droite et trace le début dune nouvelle ligne mais cette fois-ci, verticale.

La porte souvre dans un énorme fracas. Je navais pas entendu Liam entrer, abasourdi par la musique. Il me toise, immobile, comme sil venait de prendre une claque.

— Merde !

Je cache mon bras contre ma poitrine. Être dénudé était le cadet de mes soucis. Liam saisit un coton sur le bord du lavabo et me prit délicatement le bras. Je navais plus la force de larrêter. Il resta silencieux un moment pour désinfecter mes blessures.

— Jai remarqué que tu navais pas manger en bas, dit-il faiblement. Je voulais voir comment tu allais

— Question stupide.

Il réfléchit longuement à ses mots.

— Je Tu as envie de me parler de tout à lheure, au gymnase ?

— Pas vraiment, articulais-je. Mon père me manque

Il hocha la tête, comme sil comprenait cette sensation. Un bruit sourd sortait du couloir et une voix séleva.

— Liam ! Le proprio te cherche, on a besoin de toi !

Il baissa les yeux et se pinça les lèvres. Il ne répondit pas. Il me fait apparaitre son profil en se retournant vers la trousse à pharmacie. Ses yeux bleus étaient magnifiques ; leurs teintes ressemblaient à celle de locéan.

— Ne toccupes pas de moi, vas-y. Je sais me débrouiller.

Il ne mécouta pas. Il revient à mes côtés pour me poser un pansement, recouvrant ainsi tout mon avant-bras.

— On en reparlera demain, conclue-t-il.

Liam part en me jetant un dernier regard attristé. Lorsque la porte se referme derrière lui, je mautorise à pleurer. Je sors de la baignoire, enfile un pyjama et minstalle au fond de mon lit.

Je suis spéciale ~ Teen WolfOù les histoires vivent. Découvrez maintenant