Chapitre 22

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Harry cligna des yeux, stupéfait, observant Kreattur. Puis il murmura.
— Régulus est... Sur la tapisserie ? Il est considéré comme mort ?

Kreattur le fixa avec un air de défi.
— C'est ce que Kreattur a fait. Kreattur est un bon elfe. Il obéit à Maîtresse Wallburga.

Harry laissa échapper un rire incrédule.
— C'est parfait ! Je... Il n'a plus la marque non plus, il est libre !

Une lueur de respect passa dans le regard de la créature et celui-ci s'inclina légèrement.
— Monsieur a besoin de quelque chose d'autre ?

Harry jeta un œil en direction de la porte fermée de la salle de bain, et il soupira, comme résigné.
— Juste... fais en sorte qu'il aille bien. Quoi qu'il arrive.
L'elfe eut un bref sourire, sincère pour une fois, et sembla reconsidérer sa position au sujet de Harry. Il hocha la tête avant de disparaître brusquement, et Harry se passa la main dans les cheveux, l'esprit en ébullition.

Un court instant, Harry se demanda s'il avait véritablement changé le passé. Si Kreattur pouvait modifier la tapisserie familiale des Black avec sa magie, peut-être l'avait-il déjà fait avant qu'il n'intervienne ? Pour protéger le jeune maître qu'il aimait tant ?

Cependant, Harry repoussa rapidement cette idée : Régulus n'aurait jamais laissé sa mère mourir de chagrin. Rien n'aurait pu l'empêcher de la retrouver après la disparition de Voldemort, et il semblait réellement l'aimer. Bien plus que Sirius n'avait aimé sa famille.

Il sursauta lorsqu'il se retourna et vit que Régulus était appuyé contre le chambranle de la porte, les cheveux humides et ses yeux gris brillant de malice.

*


Après un long moment de détente dans l'eau chaude, Régulus soupira et se redressa. Ses muscles tremblaient encore, mais il se sentait mieux. Vivant.

Il s'habilla lentement, ne pouvant s'empêcher de s'arrêter pour regarder son bras vierge de toute marque. Quelques gouttes d'essence de Murlap avaient suffi à cicatriser la petite plaie et l'hématome s'estomperait rapidement. Il avait cru que la terrible erreur qu'il avait faite quelques années plus tôt serait irréversible et Harry Potter lui offrait une seconde chance.

Il ouvrit en douceur la porte de la salle de bain et s'immobilisa, surpris, en voyant Harry nerveux, faire des aller-retour, visiblement en proie au tourment. Il profita que son nouvel ami ne l'ait pas vu pour s'appuyer contre le cadre de la porte, et l'observer à loisir.

Harry Potter était plutôt petit, et très mince. Il avait une masse de cheveux noirs totalement indisciplinés, et il se passait souvent la main dedans, comme pour essayer de les aplatir — en vain. Il portait des lunettes à fines montures de métal, rondes, cachant ses incroyables yeux verts.
Le teint hâlé, il avait une cicatrice étrange et reconnaissable sur le front, en forme d'éclair et il lui avait avoué que c'était le résultat de l'attaque subie lorsqu'il était bébé. Ses parents avaient été tués, il avait survécu et Voldemort avait disparu.

C'était un jeune homme souriant, malgré le poids qui pesait sur ses frêles épaules. Il était discret, mais sous son calme apparent, Régulus avait rapidement noté la nervosité permanente qui l'habitait.
Au début, il s'était demandé comment un si jeune homme pouvait avoir la parfaite maîtrise de ses nerfs et masquer son agitation pour paraître parfaitement calme et effacé. Puis, il avait compris que c'était en rapport avec l'enfance désastreuse de Harry et Régulus avait eu envie d'aller trouver ces moldus ignobles pour les punir encore et encore.
Mais pour l'instant, ils n'avaient encore rien fait. Leur neveu n'était pas né — n'était même pas conçu encore.

Très souvent, Régulus se demandait comment Harry avait pu rester aussi lumineux après toutes les épreuves qu'il avait traversées. Il aurait été en droit de réclamer vengeance, ou de refuser de sacrifier plus pour un monde qui ne l'avait jamais aidé. Pourtant, Harry continuait de faire de son mieux, sans rien attendre en retour. Il gardait espoir encore et encore, et voyait toujours le meilleur autour de lui.

Régulus eut un sourire triste en pensant que Harry était probablement la seule personne en dehors de ses parents à l'avoir regardé avec cette confiance aveugle qui lui donnait des frissons. Harry ne l'avait jamais jugé, il ne lui avait jamais reproché ses choix. Il n'avait jamais fait la moindre remarque au sujet de sa relation avec Sirius, et il n'avait jamais cherché à défendre ce parrain qu'il idolâtrait visiblement.

Son sourire devint amusé lorsque Harry sursauta brusquement en le découvrant derrière lui, et il admira la rougeur qui colorait ses joues et sa gêne évidente. Harry était timide aussi, et Régulus devait avouer qu'il aimait le voir s'empourprer.

Finalement, le jeune homme aux yeux verts se reprit et s'approcha de lui, l'inquiétude remplaçant rapidement sa gêne.
— Ça va mieux ?

Régulus retint une grimace et hocha la tête, essayant de le rassurer.
— Tout va bien, ne t'en fais pas.

Harry se mordilla la lèvre, visiblement à peine convaincu et Régulus s'avança jusqu'à lui d'un pas qu'il espérait sûr pour l'enlacer, soupirant de bien-être lorsqu'il plongea son nez dans son cou.
Alors que le jeune homme répondait à son étreinte, Régulus se demanda soudain comment il allait vivre sans lui, lorsque Harry repartirait. L'idée même de le perdre lui coupait le souffle et lui serrait le cœur. Il raffermit sa prise sur le corps frêle, mais pourtant finement musclé — un parfait physique d'Attrapeur — et il ferma les yeux en murmurant un remerciement. C'était probablement la seule chose qu'il pouvait dire sans se mettre à pleurer à l'idée de le voir quitter sa vie, et s'il y avait une chose qu'il détestait, c'était bien d'exposer ses faiblesses.
Loin de le repousser, Harry répondit à son étreinte, sans un mot.

Ils auraient pu rester enlacés ainsi durant une éternité, debout au milieu du couloir, si Régulus n'avait pas vacillé, encore faible après la souffrance qu'il avait ressentie un peu plus tôt. Aussitôt, Harry s'était écarté et Régulus avait retenu ses protestations en voyant son air inquiet et concerné.
En bon Serpentard, il avait profité sans se plaindre de l'attention de Harry, le laissant le soutenir pour marcher jusqu'à sa chambre, le laissant l'aider à l'installer dans son lit, le laissant le border. Il se refusa pourtant à tenter de comprendre l'affection qu'il pouvait lire dans les yeux verts, et il ferma les yeux quand Harry lui passa une main hésitante sur le front — comme pour s'assurer qu'il n'avait pas de fièvre.

Régulus n'avait pas eu conscience d'être épuisé à ce point. Une fois couché dans le lit confortable, il se laissa lentement sombrer dans le sommeil, sentant la main de Harry glisser dans ses cheveux en une caresse apaisante.


R. A. B.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant