Chapitre 59

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Tout semblait aller pour le mieux pour Harry et ses alliés. Et pourtant... Pourtant, Régulus se sentait oppressé au fur et à mesure que le temps avançait.
Parfois, la nuit, il s'éveillait, le souffle court, alors qu'il venait de faire un cauchemar dans lequel Harry était tué, juste sous ses yeux. Il s'élançait pour le protéger, tendait la main comme pour le tirer vers lui, mais c'était trop tard. Harry recevait le sort de mort et basculait, juste devant lui, une chute interminable qui le glaçait d'effroi et le faisait se réveiller en sueur, le cœur battant à toute vitesse.


Les yeux grands ouverts, il fixait les ombres de la chambre et tentait de se persuader que c'était juste son imagination. Que ses peurs ressurgissaient la nuit, mais qu'ils allaient réussir. Il était certain que Harry aurait enfin une vie heureuse et libre.

Cependant, il avait subtilisé le grimoire dans lequel Harry avait trouvé le sort qui l'avait envoyé dans le passé, et il avait demandé à Kreattur de le cacher à Eilean Nan Ron. L'elfe l'avait fixé longuement et avait hoché gravement la tête, comme s'il comprenait ce que son Maître avait en tête.

Le précieux livre dans les bras, la petite créature s'était immobilisée un instant, lui tournant le dos, puis avait déclaré, tranquillement.
– Kreattur sera présent. Pour les Maîtres. Kreattur viendra se battre avec les sorciers le moment venu.

Avant que Régulus ne puisse dire le moindre mot, l'elfe avait transplané. Figé, le jeune homme avait secoué la tête, non sans jeter un coup d'œil émerveillé vars Harry, qui dormait profondément.

Son compagnon, qui doutait sans cesse de ses capacités, ne se rendait pas compte des miracles qu'il était capable d'accomplir. Harry avait l'impression de ne pas en faire assez, mais en quelques jours à peine, il avait rassemblé des familles autrefois opposées. Il avait rassemblé les quatre maisons de Poudlard autour d'un même but. Et voilà que son elfe indocile annonçait calmement qu'il se battrait à leurs côtés...

En silence, Régulus se glissa près de lui et l'enlaça, se jurant de le protéger, quoi qu'il arrive.

*

Harry était inhabituellement nerveux en se levant. Son instinct lui hurlait que quelque chose n'allait pas.
Il hésita longuement avant d'en parler. Il se sentait stupide d'avoir peur à ce point d'une intuition, d'un pressentiment sans fondement. Il hésita, avant d'avouer à Régulus, Sirius et Severus ce qui le tracassait.
Loin de s'en amuser ou d'essayer de la rassurer vainement, les trois hommes se tendirent et Severus murmura d'une voix blanche.
— Le moment est venu.

Un frisson glacé dévala l'échine de Harry et il ferma un instant les yeux. Il hocha finalement la tête. La guerre devait se terminer et il aurait bien plus de chance en attaquant le premier, par surprise, qu'en attendant que le mage noir soit prêt à l'affronter une nouvelle fois.
Il soupira.
— Il faut avertir les autres.

Severus partait déjà vers la cheminée, et Régulus l'attira contre lui, le serrant dans ses bras.
— Tu as intérêt à rester en vie, Harry.
Le jeune homme resta silencieux, accroché à Régulus, le nez dans son cou, se gorgeant de son odeur devenue si rapidement familière et apaisante.

Harry n'aurait jamais pensé pouvoir s'attacher autant à quelqu'un, pourtant, il tenait Régulus contre lui et l'amour qu'il lui portait lui tournait la tête.
La voix éraillée, il murmura, retenant ses larmes.
— Toi aussi, Reg. Je ne veux pas que tu sois blessé, tu entends ?

Harry l'embrassa férocement, désespéré. S'il avait pu éloigner Régulus, le garder loin de la guerre et des dangers...
Puis, ils se dévisagèrent longuement et Régulus laissa échapper un rire amusé.
— Tu sais, quand j'entendais certains jurer qu'ils étaient tombés amoureux au premier regard, je les trouvais stupides, parce que je pensais qu'il fallait se connaître depuis longtemps pour s'aimer réellement. Et puis, tu es arrivé et tu as tout changé. Je ne suis pas tombé amoureux au premier regard, j'ai été intrigué au début. Mais... un jour, je me suis réveillé, et je me suis rendu compte que je ne pourrais pas vivre sans toi.


Harry ouvrit la bouche, puis la referma en rougissant. Il cligna des yeux et eut un sourire hésitant, essayant de masquer son émotion. Il tenta maladroitement de plaisanter, alors que ses yeux brillaient de larmes contenues en regardant Régulus.
— C'est une déclaration ?
Régulus passa les mains sur ses joues, avec une douceur qui tordit le cœur de Harry. Tranquillement, il hocha la tête.
— Exactement, Harry Potter. J'essaie de te donner la motivation de rester en vie, pour moi. Parce que sans toi... le monde n'a aucun intérêt.

Harry n'eut pas le temps de répondre. Alors qu'il ouvrit la bouche, la cheminée flamba de plus belle et les flammes passèrent au vert. Le jeune homme réagit immédiatement et tira Régulus en arrière, se plaçant devant lui pour le protéger, sa baguette déjà en main, prêt à se battre.
Régulus avait lui aussi sa baguette en main, prêt à assurer les arrières de son compagnon et à le protéger à son tour si c'était nécessaire.

Susan Bones émergea de l'âtre, l'air affolé. Elle était habituellement calme et posée, un peu timide. La Poufsouffle réservée que tous connaissaient était bien loin de cette jeune femme fébrile, dont les yeux lançaient des éclairs de rage.
Sirius émergea de la cuisine, immédiatement suivi de Severus, eux aussi baguettes brandies, imaginant probablement qu'ils étaient attaqués.

En voyant la jeune femme dans cet état, Severus approcha et lui posa la main sur l'épaule.
- Miss Bones ?
Susan secoua la tête, et se passa une main dans les cheveux, agacée.
— Désolée pour mon arrivée brutale. Je suis envoyée par ma tante. Elle... Oh merde, désolée, Harry.

Elle soupira et Harry fronça les sourcils. Susan n'était pas du genre à être grossière et il pressentit le pire.
Il avança vers elle tandis qu'elle soufflait pour se reprendre et continuait, d'une voix un peu plus posée.
— Le Ministère devient fou. Le ministre Scrimgeour a imposé la loi martiale pour le monde magique. Harry, les Aurors ont l'autorisation de t'attaquer à vue et d'utiliser des sorts... mortels si nécessaires.

Sirius hoqueta, choqué. Harry resta silencieux et calme, les sourcils froncés. Susan reprit, l'air navré.
— Professeur Rogue ? Il y a aussi un ordre de vous arrêter au plus vite.



R. A. B.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant