Chapitre 21

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Je me brûle la langue en portant à ma bouche une longue gorgée de café. Huit jours que je vis désormais dans le même appartement qu'Ethan et je ne me fais toujours pas à sa machine à café. J'ai voulu récupérer la mienne mais quand nous sommes passés à l'appartement le soir après la réplétion mouvementé, la moitié de ce que contenait mon appart était irrécupérable, machine à café comprise. Le propriétaire à promis de me dédommager une grande partie tandis que tous mes biens encore en états traînent maintenant un peu partout dans l'appartement du batteur. Je peste à voix haute et touche le bout de ma langue du doigt. Je repose la tasse brutalement sur la table basse et me lève ce qui fait grincer le parquet sous mes pieds. Les fêtes de noël approchent et le batteur à tenter un semblant de décoration pour l'occasion. Un minuscule sapin couvert de quelques ornements est posé sur le coin gauche du comptoir en bois vernis, des guirlandes scintillantes pendent d'une poutre sur deux et un chapeau de père noël en velours rouge est accroché sur la porte. Je suis touché par son implication à vouloir me montrer son affection. Quand j'ai dit à Ethan que j'aimais Noël, il ne s'est pas fait prier pour me proposer toutes sortes d'idées farfelues pour se mettre dans l'ambiance. J'ai rétorqué en souriant qu'il n'était pas obligé d'en faire autant et que quelques broutilles suffiraient amplement à mon bonheur. Je touche le sapin ridiculement petit qui tangue sous le poids de mon geste. Les quelques boules en plastiques qui y pendent narguent de se décrocher de ses fausses épines. Ethan et le groupe sont en Espagne pour le week-end, une radio nationale les y a convié et ils ont sautés sur l'occasion. Je ne les ai pas accompagné, stipulant que je ne me sentais pas très bien. La vraie raison et que j'avais un entretien d'embauche ce matin même dans une petite agence de la ville et je ne voulais pas le manquer. Une odeur de pain d'épice me chatouille les narines, la fenêtre entrouverte me ramène les odeurs de la rue. Cette odeur typique des fêtes fait naître dans mon esprit une image de mes parents que j'aurais préféré ignorer. Mon père et ma mère ont toujours été des gens très stricts, très à cheval sur les codes. Je devais toujours bien me conduire, avoir de bonnes notes et fréquenter des gens avec un bel avenir devant eux. Plus jeune, j'ai décidé de faire journaliste, tout comme mon père. J'avais dans l'idée de le rendre fièr. Ma mère est avocate et tous les deux ont toujours étaient des gens très influents. Ils n'aimaient pas les fêtes, pas les sorties en famille et je me retrouvais souvent seule. Quand j'ai eu la possibilité de quitter la maison, je l'ai fait en me disant que je n'aurais plus à subir le coup de la droiture d'une vie canalisé. Et pourtant, alors qu'on m'offre la possibilité d'échapper à cette vie en travaillant avec le groupe, je m'efforce de retourner vers elle. Parfois, nos pires cauchemars s'avèrent être une partie de nos désirs. C'est pour cette raison que j'aime tant les fêtes, en partie noël : parce que toute mon enfance, j'en ai été privée. Je ne déteste pas mes parents, ils m'ont donné de l'amour à leur manière mais je ne souhaite à personne de vivre une enfance où les moindres fait et gestes se font plus par obligations que par choix. Peut-être est-ce pour cela que j'ai du mal à laisser Ethan me donner de l'amour ? N'aillant jamais eu l'habitude qu'on m'en témoigne.

La brise chargée d'épices chatouille une nouvelle fois mes narines, m'ôtant cette fois les nombreuses images de mon enfance recluse des joies festives.

Trois tambourinements espacés résonnent contre la porte. Je me retourne en effleurant une nouvelle fois le sapin en plastique et plonge mon œil droit dans le judas optique pour voir qui se trouve de l'autre côté de la porte.

Ma main se fige sur la poignée.

Là, à travers le petit tube en laiton agissant comme une loupe et m'offrant une vision élargit sur le pas de la porte se trouve James, un bouquet de roses rouges dans les bras.

J'ouvre rapidement la porte et offre à mon ami d'enfance mon plus beau sourire.

- James !

- Je t'avais promis que je passerais.

Sotto il sole di RomaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant