Partie 4 - Le cadeau.

93 12 0
                                    

Le lendemain.

« Eh, salut... »

Il se tourna vers la personne qui s'adressait à lui et fut étonné de reconnaître Guillaume. L'ami de Claude. Et de Matthieu, et de Ablaye. Celui-ci s'avança prudemment de lui, comme s'il essayait de savoir s'il le reconnaissait afin de ne pas lui faire peur et il esquissa un petit sourire :

« Bonjour, Guillaume...

— Salut, Aurél, rit doucement celui-ci, semblant soulagé qu'il l'ait reconnu et se souvienne même de son prénom. Qu'est-ce que tu fais ?

— Je joue à un jeu de Sudoku. Tu connais ? demanda-t-il en se tournant brièvement vers le cahier posé sur la table devant lui avant de regarder Guillaume à nouveau.

— Bien sûr, c'est connu ! Et alors ? T'y arrives ? »

Il hocha la tête doucement et Guillaume vint s'asseoir à ses côtés, ce qui fit accélérer légèrement les battements de son cœur dans sa poitrine. Calme-toi, Aurél. Il est gentil, Guillaume. C'est un ami de Claude. Et de Matthieu. Et de Ablaye. Tous ceux qui sont gentils avec toi ici.

« Je t'ai ramené un livre de chez moi. Vu que je me doute que les livres de la bibliothèque sont pas terribles et que t'avais l'air d'avoir envie de lire autre chose, lui dit Guillaume et il haussa les sourcils en l'entendant dire ça, étonné. Tiens, c'est pour toi. »

Il prit dans ses mains l'ouvrage que lui tendait Guillaume et il baissa la tête pour observer attentivement la couverture de ce dernier.

« Milk... and honey ? lut-il avant de relever la tête et Guillaume lui sourit quand il lui lança un petit regard interrogateur.

— Ouais, c'est un livre de poésie traduit de l'américain. Je pense que ça pourrait te plaire. Et puis ça se lit vite, c'est pas lourd comme écriture. »

Il hocha la tête de nouveau avant de caresser la couverture du livre de ses doigts. Il lui avait ramené un bouquin. De chez lui. C'était vraiment gentil.

« Merci beaucoup, Guillaume... Je ne sais pas quoi dire...

— Alors ne dis rien. Lis-le, et si ça te plaît, je te ramènerai des livres similaires. Ok ? »

Il acquiesça et se perdit un instant dans la contemplation du visage souriant de l'autre garçon. Il avait des taches de rousseurs sur son visage, c'était joli. Il aimait bien. Ça adoucissait un peu ses traits droits et anguleux. Bien que ceux-ci n'enlevaient rien à son charme, ils lui donnaient un air un peu sévère. Son regard remonta ensuite et croisa son regard à lui, clair malgré ses yeux marron, ce qui le fit rougir en se rendant compte qu'il l'avait observé sans gêne. Guillaume ne semblait pas s'en formaliser pour autant et lui offrit seulement un sourire plus grand encore. Il se demandait s'il faisait ça seulement parce qu'il savait que ses amis l'aimaient bien.

***

« Aurél, non. Je suis désolé mais tu dois me comprendre. Souviens-toi quand j'ai pris la suite ici. L'état dans lequel tu étais. Tu veux revenir à ça ? »

Il jeta un regard larmoyant à Matthieu en l'entendant lui dire ça, encore. Peu importe le nombre de fois où il insistait, ce dernier refusait catégoriquement d'augmenter son traitement. Comme lui avait dit Claude la veille, il n'avait toujours pas changé d'avis. Mais lui, il en avait besoin.

« Matthieu, s'il te plaît...

— Est-ce que tu peux me donner une seule bonne raison pourquoi je ferais ça, hein ? Est-ce que tu n'es pas mieux depuis que je l'ai baissé ? Tu peux sortir de ta chambre maintenant. T'es pas allongé toute la journée sur ce lit à attendre que la journée se passe.

— Mais je suis... je suis... dangereux, Matthieu, bredouilla-t-il d'une voix éraillée. Tu le sais...

— Aurél, non. On est déjà revenu dessus, le coupa Matthieu en semblant comprendre soudain où c'est qu'il voulait en venir. Ce n'est pas toi qui a fait ça. Ce n'était pas de ta faute. Je te l'ai déjà expliqué, non ?

— Mais je suis sûr... que c'est faux. Et puis même... Tu ne sais pas... Ce dont je suis capable... Je t'en prie...

— Aurél, encore une fois... Si tu continues de répéter ça, que je ne sais pas ce dont tu es capable, alors dis-le-moi. Explique-moi. Autrement, c'est non. Ton traitement restera le même. Je ne veux pas que tu redevienne un zombie, hein. »

Il sentit les larmes lui monter aux yeux en pensant à ce qu'il lui disait. Un zombie. Oui, c'est vrai que c'était la représentation la plus correcte de ce qu'il était à l'époque, quand celui-ci avait repris l'hôpital psychiatrique. Mais peut-être que ça valait mieux. Matthieu ne savait rien de son passé, de ce qu'il avait vécu ici. Et il avait peur de péter complètement un câble un jour si son traitement ne pouvait pas l'abrutir assez. Comme lui avait dit son médecin avant que celui-ci ne disparaisse tout à coup, apparemment licencié et remplacé par Matthieu. Il vaut mieux prévenir que guérir. Mais il ne pouvait pas lui dire de quoi il s'en retournait alors il se tut, se mordant fortement l'intérieur de la bouche pour s'empêcher de pleurer de frustration. Il savait que ni Matthieu ni ses amis ne comprenaient ce qu'il faisait ici, parmi des patients tous plus fous les uns que les autres, mais c'était là sa place. Il ne fallait plus jamais qu'il sorte d'ici. Il était bien trop dangereux.

Fiction OrelxGringe - Asile. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant