La Nouvelle

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J'étais heureuse. Oui, heureuse.

J'avais fièrement empoché mon diplôme en psychologie et j'allais enfin pouvoir réaliser mon rêve. J'avais encore un peu de chemin à parcourir, mais il était là, tout proche et je commençais à le toucher du bout des doigts.

Avec Nalan, on ne comptait plus le nombre de nuits blanches à bûcher sur nos examens, le nombre d'heures à écouter les professeurs parler et le nombre de stylos usés sous nos prises de notes. Mais voilà, nous avions réussi. Enfin.

Nous arborions fièrement nos toques sous le regard de centaine de parents, tous plus fières les uns que les autres de voir leurs enfants diplômés.

Ce que j'ignorais encore, c'est que j'allais bientôt ouvrir un nouveau chapitre de ma vie.

Je me rappelle de chaque détail comme si c'était hier. Nous avions passé la soirée au restaurant pour fêter l'occasion et en rentrant, mon père avait reçu ce coup de fil qui allait changer les choses à jamais.

Je n'avais pas prêté attention à la conversation alors qu'il termina, il vint me voir, les yeux embués.

- Papa, tout va bien?

- C'est ton oncle Ömer, il... il est décédé hier

Je n'en revenais pas.

Il y'a encore une semaine, nous discutions tous les deux au téléphone. Comment était-ce possible?

- Mais... comment? Je veux dire il n'était pas malade, enfin il allait bien

- Il... il a été retrouvé... brûlé vif dans sa voiture

Je me laissa tombée sur le canapé, complètement estomaquée par la nouvelle.

Oncle Ömer était le frère de ma mère. Avec ma tante, ils étaient tout ce qu'il me restait de ma mère. Lorsque nous étions petits, mon frère et moi aimions passer nos vacances chez lui dans le Sud.

Mon père était assis, l'air pantois. Je ne pouvais qu'imaginer la douleur et la tristesse qu'il ressentait à ce moment précis tant il était proche de lui.

- Tué. Ömer a été tué, est-ce que tu réalises?

Mes larmes que je tentais désespérément de contenir perlaient inlassablement le long de mes joues.

Je le pris dans mes bras, sans dire un mot.

***

Les jours suivants étaient bien moroses. Mon oncle avait beau être un homme solitaire et autoritaire, toute la famille était endeuillée.

Nous l'aimions pour son langage franc, un peu brut de décoffrage. Et savoir qu'il ne nous racontera plus ses petites anecdotes avec sa façon si particulière de le faire nous attristait.

C'était donc avec le coeur lourd que nous avions pris la route pour nous rendre dans le sud. Il avait toujours vécu seul. Il ne s'était pas marié et n'avait pas eu d'enfants non plus. Un vrai loup solitaire.

À notre arrivée, nous avons été accueillis par Metin, son meilleur et unique ami. L'enterrement avait eu lieu dans une ambiance assez intime malgré la présence de beaucoup de ses employés. Nous n'avions hélas pas pu voir son corps tant celui-ci était abîmé. Finalement, ce n'était pas plus mal. Je voulais garder cette belle image de lui tout souriant, dans son costume tiré à quatre épingles.

Les condoléances fusaient de toute part. Nous entendions inlassablement les mêmes phrases qui n'avaient que pour unique but de nous rappeler encore et encore qu'oncle Ömer n'était plus.

- Tenez, il m'a confié ceci depuis longtemps. Je devais vous le remettre s'il venait à décéder

Metin tendit une grande enveloppe marron à mon père.

- Qu'est-ce que c'est?

- Une copie de son testament

Il parcourut le document avant de me le tendre.

- Il vous lègue sa maison à toi et ton frère

- Quoi? Tu en es vraiment sûr?

- C'est écrit noir sur blanc

Petite, je disais à mon oncle que quand je serai adulte, j'aurais une maison comme la sienne tant elle était belle. Il venait de réaliser ce rêve de petite fille.

Prise d'émotion, une larme s'échappa sans même que je ne m'en rende compte.

Le soir même, nous étions tous attablés lorsque ma tante prit la parole.

- Il faudra songer à prendre rendez-vous chez le notaire

- Ömer a confié l'entreprise à son ami Metin et quant à sa maison, Ayaz et Elma en sont les héritiers

- Quoi? Comment ça les héritiers?! D'où est-ce que tu tiens ça?!

- De son testament Özlem, son testament

Elle se levra brusquement de table avant de se dresser devant mon père.

- Je veux le voir. Je veux voir ce testament

- Calmes toi Özlem et termines ton assiette. Chaque chose en son temps

Ma tante avait très mal réagit à la nouvelle et réclamait son dû. Ce qui était étonnant, car elle n'avait jamais vraiment été proche de son frère. Son comportement exaspérait tout le monde, même ses propres enfants.

Mon père finit par manquer de patience et une dispute éclata.

- Qu'est-ce que tu cherches Özlem hein?! Où étais-tu quand il était vivant? Est-ce qu'une seule fois tu as pris le téléphone pour prendre de ses nouvelles ou même l'inviter?!! Il est subitement devenu ton frère dans l'héritage c'est ça?!

- Mes enfants ont autant de droits sur son héritage que les tiens!

- Quels enfants Özlem? Oh tu parles de Osman et Adem qui ont vu Ömer trois fois dans leur vie? Par pitié, ne dis pas de bêtises!

- Papa, calmes toi s'il te plaît. Inutile de s'énerver pour si peu

Ma tante tourna les talons avant d'aller se réfugier à l'étage.

Finalement, le temps pour nous de voir le notaire et en terminer avec toute la paperasse, le séjour avait duré plus longtemps que prévu.

En rentrant à la maison, mon père et moi étions heureux de voir mon frère Ayaz, venu passer quelques jours à la maison.

Il vivait en Angleterre depuis déjà 8 ans. Nous n'avions pas beaucoup l'occasion de nous voir alors forcément, lorsqu'il venait, je ne le lâchais pas d'une semelle.

- J'aurais vraiment voulu assister à l'enterrement d'oncle Ömer mais avec le travail, c'était impossible

- Ne t'en fais pas mon fils, je suis sûr qu'il ne t'en veux pas. Et d'ailleurs, avec ta soeur tu hérites de sa maison

- Sa maison? Comment ça?

- Dans son testament, il vous lègue sa maison

Je crois qu'il était tout autant surpris que nous avions pu l'être.

- Elma, tu ne parlais pas de vouloir ouvrir un cabinet après avoir terminé tes études?

- Oui, je le veux toujours d'ailleurs

- Pourquoi ne pas utiliser une partie de la maison pour le faire? Ma vie est en Angleterre depuis longtemps maintenant, alors je te cède ma part. J'ai beaucoup de souvenirs dans cette maison, mais je sais qu'elle sera entre de bonne main

- Attends, tu... tu parles sérieusement Iyaz?

- Oui, vraiment. Tu aimes le soleil, tu as terminé tes études, tu as toujours aimé cette maison alors pourquoi pas? Papa qu'est-ce que tu en penses?

- Je... je ne sais pas. Ta soeur est encore jeune et...

- Elle a 23 ans papa. À son âge, je vivais déjà à Londres tu ne t'en souviens pas?

Ce que disait mon frère me faisait pas mal réfléchir. Et si cet héritage était un signe. Un signe et une opportunité de mener la vie que j'ai toujours voulu?

Héritage AmoureuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant