Héritage Amoureux

Engrenage

Je ne savais plus où donner de la tête entre mon travail, le sport et les week-ends bien chargés. Mais bizarrement, j'aimais ce rythme effréné. J'avais tout de même décidé de prendre quinze jours de vacances bien méritées. Nous étions samedi matin et avec Nalan, nous rentrions à peine de notre petite ballade à vélo que la porte sonna. En découvrant qui se cachait derrière, j'ouvris grand la bouche en signe de surprise avant de sautiller comme une enfant.

- Mais qu'est-ce que tu fais là?

- Je viens voir ma petite soeur préférée

Ayaz était bien là, devant moi arborant une valise à la main. C'est fou ce qu'il pouvait me manquer malgré que nous nous parlions très souvent au téléphone. Je sauta dans ses bras, heureuse de le retrouver.

- Mais... je pensais que tu ne pouvais pas prendre de vacances avant le mois prochain non?!

- Je me suis finalement débrouillé

Nalan, n'ayant pas vu qui venait de sonner, arriva en grommelant.

- Ne me dis pas que c'est encore ce foutu commercial qui...

Lorsqu'elle vit Ayaz, elle se figea avant d'afficher un visage presque honteux.

- Oh Ayaz, c'est toi. Désolée je pensais que c'était encore ce démarcheur qui venait pour... enfin bref ce n'est rien

- Nalan, ça fait un bail. Comment vas-tu?

- Bien, très bien je te remercie

Je récupéra sa valise avant de la poser dans la chambre d'ami. Nalan et moi comptions aller faire les courses et c'est donc à trois que nous nous rendions au supermarché. Ayaz avait toujours plein d'histoires à raconter entre son travail, ses amis et ses voyages. Je pouvais l'écouter pendant des heures.

- Et Adèle?

Il se frotta les yeux avant de passer ses mains sur son visage, l'air exaspéré.

- C'est... compliqué

Adèle n'était autre que sa presque fiancée. Entre nous, je n'accrochais pas beaucoup avec elle et à vrai dire, nous avions très peu de points en commun elle et moi.

- Elle boude parce qu'elle n'a pas eu la dernière robe haute couture du moment c'est ça?

J'aimais le taquiner et il savait que c'était par humour. Adèle était issue d'une famille aisée et avait tendance à vouloir reporter le mode de vie qu'elle a toujours connu sur Ayaz. Je me suis toujours demandée ce qu'ils faisaient ensemble.

- Elle me reproche de ne pas lui accorder assez de temps

- Et est-ce que c'est vrai?

- En ce moment il y'a pas mal de matchs qui se jouent, je suis moins disponible

Ayaz, tout comme Nalan, jouait au basket depuis pas mal d'années déjà et dans le fond, il a toujours voulu y jouer en tant que professionnel. Il en avait à la fois les capacités et l'occasion, mais il a préféré terminer ses études et travailler dans une de ces immenses tours londoniennes, sûrement pour rentrer dans le moule.

Je ne voulais pas être trop intrusive et préférais changer de sujet. Chose que je n'avais pas eu besoin de faire puisque Nalan et lui discutaient déjà basket. Cette soirée au coin de la cheminée était une de ces soirées que j'aurais aimé mettre sur pause pour qu'elle ne se termine jamais. Nous discustions et riions aux éclats comme des adolescents. Je voyais bien que cela faisait un bien fou à Ayaz, lui qui n'avait que très peu de répit pour souffler dans sa vie à cent à l'heure.

***

Je m'étais éclipsée très tôt le matin comme tous les dimanches pour aller courrir un peu. Cela me permettait de me vider la tête et me ressourcer. J'avais besoin de me retrouver seule avec moi-même, c'était un moment que j'adorais tout particulièrement.

Le soleil, encore bien timide, se laissait finalement révélé et ses quelques rayons venaient me chatouiller le visage. J'étais en pleine course lorsque je sentis une présence derrière moi. Je tournai la tête, mais personne dans les parages. C'était sûrement mon imagination qui me jouait des tours. Mais voilà que quelques minutes après, j'entendis un craquement de branche et j'eus à peine le temps de me tourner qu'un homme me sauta littéralement dessus. Au sol, je me débattais comme je pouvais mais sa masse imposante prenait largement le dessus sur moi.

- Lâchez moi!!!

Je me tordais dans tous les sens et regardais autour de moi, mais personne à l'horizon. Il tentait d'immobiliser mes bras lorsque soudainement, je sentis mon corps plus léger. L'homme, vraisemblablement projeté au sol se releva aussitôt et prit la poudre d'escampette. Je me releva à mon tour tout en dépoussiérant mes habits, avant de me rendre compte de qui était mon sauveur.

- Encore vous? Est-ce que vous me suivez?

Soit c'était un pur hasard, soit cet homme me suivait vraiment. Mais étrangement, il avait quelque chose de rassurant.

- Moi, vous suivre?

Il laissa s'échapper un rire moqueur.

- Et si vous me remerciez plutôt non?

- Merci... encore une fois

- Évitez de vous ballader seule dans des endroits aussi isolés

- Pas si isolés que ça visiblement puisque vous êtes là

Il reprit son chemin en trottinant.

- Attendez! On pourrait... on pourrait faire le reste du chemin ensemble

J'avais beau ne pas apprécier particulièrement cet homme, mais pas au point de terminer seule mon périple. Il souria puis acquiesça par un mouvement de tête.

Nous marchions côte à côte, en silence. Aucun de nous deux n'osaient décrocher un seul mot jusqu'à ce que je me décide à engager la conversation.

- Est-ce que vous venez souvent ici?

- Oui. J'y fais mon footing. Je n'apprécie pas bien la foule

- Bizarrement, je ne suis pas étonnée par cette révélation

Il fit abstraction de cette dernière remarque, le regard plongé vers le sol.

- La vie qu'on mène fait de nous ce que l'on est et je ne crois pas que vous et moi ayons eu la même vie jusque là

- Parce que vous me connaissez?

- Non. Mais ça se sent

- Je pense qu'il faudra que l'on travaille sur votre trop grande confiance en vous

Les mains dans les poches, il s'arrêta subitement de marcher et me regarda d'un air interrogatif avant de me poser une question à laquelle je ne m'attendais pas du tout.

- Est-ce que ça vous dit qu'on aille manger quelque chose? J'ai une faim de loup

Je rêve ou cette homme, qui depuis le départ se comporte presque comme un sauvage vient expressément de m'inviter à venir manger avec lui?!

Fallait-il que j'accepte?