Premier Rendez-vous

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- Très bien, alors je peux vous proposer... ce Vendredi si ça vous convient?

- De préférence dans la matinée

- Dix heures?

- Ça ira

Nalan, qui avait laissé sa porte entrouverte se dirigea vers moi aussi rapidement qu'une fusée.

- Qui est cet homme? Il est juste C-A-N-O-N!

- Je n'en sais rien. Il a pris rendez-vous pour Vendredi

- Pourquoi est-ce que moi je n'ai pas le droit à ça?

- Peut-être parce que ton plus jeune patient a... douze ans?

- Effectivement, je l'avais oublié

Un peu plus d'un mois que nous exercions et doucement, Nalan et moi avions de plus en plus de patients.

Nalan s'était spécialisée dans la psychologie de l'enfant tandis que moi, j'avais fait le choix de la psychologie clinique ce qui nous permettait d'avoir un panel de clients plus large.

J'aimais ce métier de tout mon cœur. J'aimais aider les gens à aller mieux, j'aimais les écouter et être la gardienne de leurs secrets.

Nous avions chacune notre bureau et c'était formidable de pouvoir venir le matin ensemble, prendre notre pause et rentrer le soir ensemble. Décidément, nous étions de vraies inséparables.

On profitait du week-end pour aller courir ou faire du vélo selon notre humeur. Nos proches nous manquaient beaucoup mais ici ils faisaient tellement bon vivre que ça en valait la peine.

***

Enfin vendredi. Et qui dit vendredi, dit week-end!

J'avais décidé de venir un peu plus tôt pour être sûre d'être dans les clous et pouvoir m'en aller pour quinze heures.

Après ma première patiente du matin, je me suis octroyée une pause avec Nalan et j'étais en plein fou rire lorsque mon prochain rendez-vous s'est présenté à moi.

- ... Bonjour

En me retournant, je vis le jeune homme de la dernière fois et après un rapide coup d'oeil à ma montre, je réalisa qu'il était effectivement déjà dix heures

La moitié d'un pain au chocolat entre les doigts et l'autre dans la bouche, je tenta tant bien que mal de balbutier quelques mots sans paraître totalement ridicule.

- Oh pardon... bonjour je... désolée suivez moi

Je voyais Nalan qui tentait de se retenir pour ne pas rigoler tandis que je me dirigeais vers mon bureau, honteuse.

- Encore désolée pour... pour ça

Je toussa pour camoufler mon malaise tout en essuyant ma bouche et mon pull, encore témoin de ce petit-déjeuner trop vite expédié.

- Ce n'est rien. C'est moi qui suis un peu trop ponctuel

Il sourit en prononçant ces dernières phrases.

- Alors... M. Isaev, c'est notre première séance ensemble. Dites moi donc ce qui vous amène

- Et bien pour faire court, je viens de quitter l'armée après 9 ans de service et mon nouveau chef me demande de consulter bien que ce soit totalement inutile parce que je vais très bien

- Je vois...

- Je suis ici par obligation et non par choix. Alors si nous pouvions faire vite et qu'à la fin de la séance le rapport soit positif ce sera parfait

- Je vous arrête tout de suite. Je ne peux en aucun cas conclure que tout va bien chez vous en quarante cinq minutes et encore moins faire de rapport

- Vous n'avez rien à conclure puisque c'est moi qui vous le dis! Écoutez, je n'ai pas le temps pour toutes ces bêtises alors faites votre rapport ou bien un courrier je n'en sais rien et que je puisse m'en aller

Mais pour qui se prenait-il? Voilà que je bouillonnais littéralement.

- Avec tout mon respect, je trouve que vous dépassez les bornes. Ces conneries comme vous dites, c'est mon travail et je ne ferai aucun rapport parce que vous me le demandez. Et si je devais en faire un avec le peu que je vois devant moi, croyez moi qu'il ne vous plairait pas

Je pouvais facilement percevoir de l'agacement voir de la colère en lui mais il était hors de question que je me laisse marcher sur les pieds par un total inconnu.

- Ah oui, et dites moi donc ce que vous voyez. Je suis curieux

- Je vois un homme plein de dédain à l'égo surdimensionné qui cache maladroitement un mal mal-être derrière une méchanceté gratuite et une pseudo confiance en soi

Il ria nerveusement avant de froncer les sourcils et prendre la parole.

- C'est bien ce que je disais, des conneries

- Et votre réaction prouve que j'ai raison. Maintenant, je préfère en rester là. Trouvez quelqu'un d'autre pour rédiger vos conneries

Je me leva d'un pas déterminé et ouvris la porte avant de lui jeter un regard froid qui lui indiquait clairement de s'en aller sur le champ. Il se leva à son tour, s'arrêta à mon niveau quelques secondes avant de s'en aller.

Décidément, cet homme était le culot en personne.

[...]

C'était enfin le week-end. Avec Nalan, nous avions prévu une après-midi shopping suivie d'un bon restaurant. L'occasion pour nous de décompresser.

Nous étions à table quand mon téléphone se mit à sonner. C'était Firhat.

- Tu ne réponds pas?

- Non je n'en ai aucune envie

Avant mon départ, nous nous étions disputés car selon lui, il ne faisait pas partie de l'équation dans ma décision de partir m'installer ailleurs.

- Il me reproche le fait d'être partie alors que c'est à peine si on arrive à se voir. Franchement tu y crois?

- Tu sais déjà tout ce que je pense de Firhat

- C'est vrai

Nalan ne l'avais jamais apprécié et elle ne s'était jamais cachée de me le dire.
Mon téléphone sonnait encore et encore alors je finis par lui répondre.

- Qu'est-ce que tu veux Firhat?

- Prendre de tes nouvelles par exemple

- De mes nouvelles, vraiment? Tu veux que je te rappelle notre dernière discussion?

- Oublies ça

- Non, je n'ai pas envie d'oublier justement. C'est toujours la même chose avec toi Sedat, tu reviens comme si de rien était mais tu sais quoi, c'est terminé

- Vraiment? C'est elle qui t'as bourré le crâne?

- Mais arrêtes un peu! Arrêtes de penser que je ne suis pas capable de réfléchir par moi-même ou que j'ai besoin de quelqu'un pour prendre des décisions! C'est moi et uniquement moi! Et tu sais quoi, Nalan n'avais pas tord sur toi. Tu n'es qu'un gamin immature bien trop occupé avec sa personne pour penser aux autres

- Le sud te fait prendre la grosse tête à ce que je vois

- Je pense qu'on a plus rien à se dire Firhat alors sur ce, je te souhaite une bonne continuation

Je raccrocha aussitôt. Je n'en revenais pas. Je venais enfin de lui dire ce que j'avais sur le cœur depuis un moment déjà et mon Dieu ce que ça faisait du bien. J'avais le sentiment d'être débarrassée d'un poids. Un poids qui allait me jouer bien des tours...

Héritage AmoureuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant