[3]

35 6 2
                                    

Chapitre 3

 — Drôle de soirée

Clémentine

À chaque marche que je franchis, mon pouls s'accélère. Marty semble assez serein, la démarche tranquille. De temps à autre, il s'arrête pour saluer du monde. Toutes les filles se pâment devant lui, et en font des tonnes. Je m'oblige à ne pas lever les yeux au ciel, et à sourire gentiment. Après tout, je les comprends au fond. Comment ne pas être attiré par ce mec ? Et surtout, comment rester maître de son corps en sa présence ?

— Qu'est-ce qu'elle fait avec lui ? C'est étrange, tu ne trouves pas ?

Ce n'est qu'un murmure, mais je repère la fille qui a parlé. Il me semble reconnaître son visage. Je crois qu'elle fait partie de la branche AWP* comme nous, mais elle doit être en première ou deuxième année seulement. C'est pour cette raison que je me permets un regard noir dans sa direction.

Lorsque mes yeux croisent les siens, j'ai la sensation d'avoir percuté un iceberg. Son air est froid et elle se contrefiche que ses mots puissent me faire mal d'une certaine manière. C'est quoi ce comportement envers ses ainés ?

— Mais oui, en plus, j'ai entendu qu'elle était là ce soir.

Mes poils se hérissent. La conversation m'intéresse, maintenant. De qui parlent-elles en utilisant ce « elle » et quel est le rapport avec Marty ? Est-ce qu'il connaît cette fille ? Vu le ton qu'elles ont pris, on dirait du reproche et en plus, elles ne sont pas du tout discrètes. Peut-être qu'elles le font exprès ? Sûrement même.

— Clémentine ?

Je relève la tête, sans même m'être rendue compte que je regardais mes pieds. Mes pieds figés sur le sol, en plein milieu du long couloir. Marty me sourit doucement, un sourcil haussé.

— Tu as changé d'avis ?

Je fais les gros yeux, le cerveau embrouillé. Pourquoi je dois toujours agir bizarrement dans des moments aussi importants ?

— Tu te sens bien ?

Marty rebrousse chemin, jusqu'à ce que son corps ne soit plus qu'à quelques centimètres du mien. Merde, je vais devenir encore plus bizarre, je le sens. Je vais commencer à faire de l'hyperventilation et il va vraiment me prendre pour une folle. Là, mon plan tombera véritablement à l'eau.

Je crois rêver en sentant ses doigts légèrement frôler les miens. À cet instant précis, mes yeux se verrouillent sur les siens. En prenant mon temps, je contemple d'abord son œil gauche, d'un marron chocolat, puis son œil droit, d'un vert pareil à une prairie en été.

— Tu aimes observer, toi.

Je sens un soupçon de curiosité dans sa voix.

— C'est juste que... c'est époustouflant.

Un ange passe au-dessus de nos têtes, et ça me suffit pour rougir de honte. Qu'est-ce qui me prend de dire un truc pareil ? Voilà, je fais définitivement partie des filles étranges du campus. Ou même de la planète entière. Peut-être en suis-je la reine ?

— Merci, c'est mignon.

J'ouvre la bouche pour me confondre en excuses, ou alors pour changer de sujet, sauf que je ne suis pas assez rapide.

— Les béguins font vraiment dire n'importe quoi, se moque Alec. Pas vrai, Mart ?

Mon corps se raidit. Les doigts de Marty disparaissent, et il recule de quelques pas. Je le sens même se rapprocher d'Alec. Pourquoi il est là, lui, d'abord ? Je vais vraiment finir par l'étrangler pour avoir la paix. À cause de lui, la situation semble encore plus bizarre, et totalement fichue.

Bad CrushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant