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Chapitre 8

— The Sun Always Shine on T.V.

Clémentine

Les émotions.

Ce sera mon thème pour le projet secret dont on nous a chargés cette année. J'ai déjà plusieurs idées pour les différentes disciplines. Pour la photographie, je pense trouver plusieurs modèles — un différent pour chaque émotion illustrée — à persuader de vivre l'aventure avec moi. Ensuite, pour la peinture, j'accorderais une couleur pour une émotion sur la toile. Il ne me reste plus que la sculpture, celle qui va demander le plus d'imagination, et qui pour l'instant me pose un léger blanc.

J'ai confiance en mon imagination constante pour me trouver une idée d'enfer.

— Prête pour ton rendez-vous hebdomadaire avec tes parents ?

Athée s'installe à côté de moi, sur le canapé. Du coin de l'œil, j'aperçois la sacoche qu'elle trimballe sous son bras. Vu sa grandeur et ce qui en dépasse, je pense qu'elle a prévu de commencer tout de suite, pour notre projet artistique.

— Je pense que oui.

— Tu penses seulement ?

Sa voix est inquiète.

— La dernière fois, ils se sont disputés encore pour des petites broutilles. On était là avec mon beau-père, à siffloter comme si de rien n'était, ou à se regarder dans le blanc des yeux. J'aime pas beaucoup ça.

Mes parents ont divorcé quand j'ai eu quinze ans, pendant mes années lycées. Je me rappelle très bien le calme dont ils ont fait preuve et les valises de mon père sur le perron. Sur le moment, je n'ai pas vraiment compris pourquoi ils se séparaient. On était une famille depuis tellement de temps et les disputes étaient rares. Enfin, devant moi. Encore aujourd'hui, mes parents n'aiment pas parler de la raison. Alors, pour eux, je n'insiste jamais.

Athée prend ma main dans la sienne, un sourire réconfortant sur les lèvres.

Don't worry, be happy, comme le disait un grand artiste. Paix à son âme.

Avec sa main libre, elle mime un pétard qu'elle se met à fumer. Bien sûr, je ris face à sa connerie. Comment faire autrement ? Avec elle, je suis foutue, même quand elle me sort ses blagues de Carambar.

— Sérieusement, je sais que le divorce de tes parents t'a touché en plein cœur et que ça continue. C'est normal, tu les as toujours connus amoureux et soudés. Mais ce qu'il faut retenir dans l'histoire, c'est qu'ils t'aiment énormément tous les deux.

Ses doigts se resserrent sur les miens. Elle aussi m'aime, et je le sais parfaitement. Nous sommes aussi notre propre famille, et ce, depuis les premiers jours en primaire.

— Les dimanches ça a toujours été sacré pour vous. Je me souviens la première fois que tes parents m'ont invité officiellement.

Son sourire s'agrandit tandis qu'elle se remémore les souvenirs de cette journée d'été parfaite. Moi aussi, j'en profite pour y repenser. Bientôt, les rires, les cris et les roulades dans l'herbe fraîche, me reviennent en mémoire. Mon cœur bondit de bonheur.

— Tes parents m'ont dit que s'il fallait me kidnapper pour que je puisse venir tous les dimanches, ils le feraient sans problème. Papou a ri d'un si grand éclat que j'ai encore le son de son rire imprimé dans ma tête.

— Oui, c'est vrai, tes papas étaient là. Ils sont devenus inséparables, après.

— Oui, ils prennent toujours des nouvelles de ton père. Et comme ta maman habite tout près, tout est plus facile.

Bad CrushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant