Alec
Je me sens respirer normalement quand je la vois heureuse, le sourire aux lèvres. Au fond de moi, c'est ce que j'ai toujours aimé. Observer la joie remplir son visage, et éclairer les légères taches de rousseur qui parsèment son nez et ses joues. Ça et le soleil, briller dans ses cheveux. J'en garde plusieurs souvenirs d'enfance qui continuent leur va-et-vient à l'intérieur de ma tête. Surtout un qui me hante la nuit lorsque toute ma force m'abandonne.
C'était un soir d'été, un dimanche précisément. J'entends encore ses rires qui font écho contre mon corps et ma poitrine. Mon petit cœur n'a jamais battu aussi fort, que j'ai cru faire une crise cardiaque. Je passais dans le quartier, en promenant Max, notre dalmatien. Il était tout petit à l'époque, comme moi. Les rires m'ont stoppé net dans mon élan, et je me suis caché derrière le buisson des Do Santos. À travers les feuillages, j'ai aperçu Clémentine allongée dans l'herbe, les mains jointes sur son ventre. Ses épaules bougeaient tellement. Des petits soubresauts. À sa chevelure rousse se mélangeaient des mèches blondes. J'ai tout de suite reconnu Athéna. Elle aussi, elle était belle.
Liam l'a toujours trouvé magnifique et il continue de le faire. Moi, c'est Clémentine, mais je n'arrive pas à faire les quelques pas qui nous séparent. Je n'ai jamais réussi. Ce n'est pas une question de timidité — bon, peut-être un peu — ou alors de fierté masculine. Rien de tout cela. Pendant toutes ces années, je l'ai regardé s'affirmer et grandir. Devenir encore plus belle. On s'est longtemps ignorés, mais la période du lycée reste la plus difficile. Celle qui a tout déclenché. Clémentine a perdu un peu de son éclat. Plus tard, j'ai appris que ses parents avaient divorcé. Sur le moment, ça m'a fait mal, parce que j'aimais son soleil qui m'éclairait dans le silence.
Quand on est ado, il y a deux solutions : on se contente de peu, ou alors on veut tout rafler. J'aurais voulu me contenter de peu, rester à l'écart. Seulement, je voulais tout d'elle. C'est ce qu'on pourrait appeler un coup de foudre.
Je voulais que son soleil revienne baigner à l'intérieur de ses rayons. Malheureusement, quand on est ado, on est aussi un peu con. Comme je n'ai jamais su l'approcher, j'ai commencé à lui lancer des petites piques. Je l'ai vu se réveiller et mon cœur pulsait tellement, que j'ai continué. Comme une drogue. Comme ma cigarette.
Sauf qu'aujourd'hui, elle m'a enlevé ces moments. Ce que je respecte parce que je n'ai jamais voulu lui faire du mal, juste garder son côté solaire en vie.
— Comment tu sais que j'adore cette chanson ?
Sa voix me sort de mes pensées. Je resserre ma prise sur le volant, les yeux rivés sur la route. Here I Stand and Face the Rain du même groupe, s'enclenche à la suite du morceau. Mon cœur s'emballe à l'intérieur de ma poitrine. J'aime beaucoup ce morceau et je me rappelle très bien avoir acheté l'album dans l'espoir de me rapprocher d'elle. De ressentir ce qu'elle pouvait ressentir, elle.
— Je ne pensais pas que tu avais un côté pervers, Wilson, grimace-t-elle.
Je la vois croiser ses bras contre elle, comme une sorte de rempart et se donner de l'assurance. Mes mâchoires se contractent face à sa petite pique bien placée. Je n'aime pas tellement qu'elle m'appelle par mon nom de famille, parce que ça met de la distance entre nous, comme un fossé. Je crois d'ailleurs que c'est pour cette raison que j'ai commencé à lui donner ce surnom qu'elle déteste.
— Tu ne sais pas tout sur moi, Clémentine. Ni les choses que j'aime, je la provoque.
Elle reste silencieuse, et ça me donne envie de continuer. Je sais qu'elle m'a dit d'arrêter, mais il faut dire qu'elle me tend la perche. Tant pis pour cette fois. Nous ne sommes que tous les deux, autant en profiter.
— J'ai des goûts particuliers, ça te fait peur ?
On se croirait dans un mauvais film d'amour un peu trop cochon. Je suis hilare à l'intérieur de moi.
— Tu ne me fais pas peur. Par chance, je ne connaîtrais jamais tes goûts.
Sa voix transpire le dégoût et au fond ça me blesse un peu. Pourtant, je reprends du poil de la bête. Je m'écouterais bien du Dire Straits, mais on n'a pas assez de temps devant nous. Le trajet n'est plus assez long. On arrive d'en à peine cinq minutes.
— Une chose est sûre, tu devrais connaître ceux de Marty avant les miens.
Elle reste bouche bée face à ma répartie. Même si la savoir en admiration totale devant Marty me fait un mal de chien, il faut croire que je suis un peu masochiste sur les bords, en la provoquant à son propos.
— Tu pourras me dire ce que tu préfères.
En voyant la maison devant nous, je me gare sur le bas-côté. Tout de suite après, je descends pour lui ouvrir la portière. Clémentine sort comme une furie.
— Après toi, Titi, je murmure seulement pour elle et moi.
Alors que je m'attends à une autre attaque de sa part, un calme plat me fait face. Je ne peux m'empêcher de rire. Finalement, j'ai bien fait de venir à ce repas familial. Ça promet du lourd.
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Coucou tout le monde ! J'espère que vous allez tous et toutes bien ? Un deuxième chapitre en prime hihi. Alors qu'est-ce que vous pensez de ce déjeuner familial (avec la famille d'Alec et la famille de Clem) en perspective ? Bonne ou mauvaise idée ?
La suite au prochaine épisode ! Bisous bisous.
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Bad Crush
RomanceAu sein de l'université WestUSA, où la créativité prend vie, dans la petite ville de Salem. Clémentine Do Santos est tombée amoureuse de Marty Portman, dès qu'elle a posé le regard sur lui, en première année de faculté. Son talent et son amour de la...