PROLOGUE

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Wesh, ce serait pas la suite de Moloch? Qui arrive avant la prochaine décennie. C'est incroyable. Personne l'avait vu venir même pas moi. Mais voilà, on y est. J'ai lancé les hostilités. Eux aussi. Ce sera un tome basiquement plus violent que le premier dans les thèmes abordés mais globalement, c'est la même poésie nulle un peu gore un peu romantique. Bref, l'horreur pastel de Moloch is back.


***


« Qu'est-ce que tu plantes ? »

Anasthase pose la question tout en se sentant un peu con. Il se demande pourquoi Victoire plante des fleurs en plein hiver. Le mois de janvier est particulièrement froid cette année. Enfermé dans son pull blanc dont le col roulé en laine lui irrite le cou, Anasthase affiche un air rêveur chaotique. Il aimerait rester dans ce calme pour l'éternité. Qu'est-ce qu'une femme aussi belle que Victoire fait avec un homme comme lui, dans le fond. Physiquement, il est monsieur tout le monde. Sa famille est un ramassis de détraqués colériques, instables, terrifiants qui manient trop bien au choix les armes blanches ou les balles de plombs qui perforent les corps, les artères, les chairs et la fureur de la détonation s'est logée dans chacune de leurs pensées noires, rouges, anthracites, légèrement rosées quand ils se sentent d'humeur, c'est-à-dire absolument jamais ou alors sur un malentendu cocasse et fortuit. Lui-même ne vaut pas spécialement mieux qu'eux. Il a tabassé Ange pour une raison qui lui échappe encore, Hyacinthe le terrifie, sa petite sœur a buté l'intégralité de sa famille, Tobhias a pour passion de scier le plus infime de ses repères moraux. Et Louis. Que dire de Louis. Louis qui rumine, qui ne dit jamais rien, qui déteste et aime en silence, en secret, au plus profond du plus profond de lui-même, Louis et sa moitié de visage, Louis et son aura interstellaire. De quoi accuser Louis, finalement ? D'être un martyr ? Vraiment qu'est-ce que Victoire est allée foutre dans ce bourbier déprimant. Il donnerait tout pour sortir de là. Les oublier. Les laisser s'entretuer. Il voudrait tout foutre en l'air, changer d'identité, partir loin dans un endroit où personne ne le connait, épouser Victoire, avoir des enfants, tout refaire, tout recommencer. Quand il y réfléchit, qu'est-ce qui l'empêche de le faire ? Sa culpabilité sans doute. Le regard de Hyacinthe. Ses paroles lancinantes, le ton acerbe de chacune de ses phrases, le procès d'Anasthase qui se joue dans chaque battement des cils de Hyacinthe. Hyacinthe est une lame de couteau. Une lame affûtée qui transperce tout ce qu'elle trouve sur son chemin. Lui a-t-on laissé le choix d'être autre chose que cela ? Il repense à la gentillesse de Hobbes. Si lui mérite Victoire, pourquoi Hyacinthe ne mériterait pas Hobbes ? Anasthase se trouve injuste. Au cœur des plaies nécrosées de sa propre mélancolie absurde, il envisage de mourir, de se jeter d'une fenêtre, il veut admirer le vide, la hauteur, son corps suspendu aux fils déchirants de la mort. Raven sera-t-elle enfin heureuse s'il disparaissait ? Les jumeaux pourraient-ils enterrer leur colère en même temps que son corps dans les méandres de la terre, la laisser être dévorée par les mouches et les verts comme le sera sa chair ? Ou devrait-il tuer Tobhias puis lui dans un immense bain de sang. Rien que le fait d'y penser le terrifie. C'est bien plus facile de se suicider que de répandre la cervelle de son cousin sur les murs de sa cuisine. Tobhias se sert du glaive de la justice pour trancher leur tête à tous. C'est une nouvelle année qui débute. Et Anasthase est envahi d'un mauvais pressentiment quand il regarde le faire part du mariage de Tobhias, là, en évidence sur la table de la salle à manger. Dehors, le vent se lève, les cheveux de Victoire s'emmêle dans sa beauté perçante, envoûtante, incroyablement vivante et elle a l'air d'une déesse aussi réconfortante qu'apaisante dans l'écrin de son cœur blanc.

« Je plante des tournesols.

—Pourquoi des tournesols ?

—C'est la fleur préférée de Hyacinthe. Tu ne te souviens pas ? Il venait t'en acheter presque tous les jours quand tu tenais ta boutique de fleurs, à l'époque.

MOLOCH PARTIE IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant