CHAPITRE NEUF : PARADIGSMES DE TOBHIAS

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Hello et bienvenue à tous et toutes dans ce nouveau chapitre de Moloch. Au programme des petites retrouvailles familiales, de la mignonnerie et des trucs un peu plus vener. TW : violences physiques et psychologiques, homophobie, émétophobie.


...


Tobhias, 1er mars


Sa mère, Rachel Rightway Almean, allongée sur ce lit d'hôpital, déesse déchue de sa position au paradis pour être rétrogradée en enfer, se meurt lentement, prononce quelques mots de courtoisie sans lui jeter un regard. Tobhias n'est pas vraiment un grand sentimental non plus. Il se tient debout, en face d'elle, à portée de son regard sans jamais l'atteindre. Les jumeaux devraient arriver dans la matinée. Sa mère n'a même pas posé la question. C'est Tobhias qui lui a dit au milieu des « il fait froid aujourd'hui » et des « tu n'as pas beaucoup changé », non, maman, en effet, j'ai trente-deux ans, je n'ai pas grandi depuis la dernière fois, je ne peux que m'affaisser désormais. Quelques fois, Tobhias est venu avec ses enfants. Sa mère leur a caressé la tête sans un mot. Ils ont du mal à envisager cette femme comme leur grand mère et ce n'est pas étonnant.


« Comment va Hyacinthe ? »


Quand elle s'intéresse enfin, c'est toujours à Hyacinthe qu'elle pense.


« Aucune idée. Vous savez très bien que l'on ne se parle pas.

—Arrêtons ce vouvoiement idiot, Tobhias.

—C'est trop ancré dans mes habitudes. Mais s'il vous sied mieux de metutoyer, cela est votre droit.

—Tu me parles comme si tu défendais un client, à la cour.

—Je suis votre enfant maudit. Ainsi, il est difficile pour moi de vous considérer réellement comme une mère. C'est sans doute immature, j'en suis conscient. »


Sa mère sourit tristement. Comme si sa mort prochaine lui faisait se rendre compte de ses erreurs, de ses actes manqués. Tobhias n'a cependant aucune pitié pour elle. Pourtant, il sent bien qu'elle essaye maladroitement de réparer les pots cassés. Le fait qu'elle prenne conscience de sa maltraitance maternelle sur son lit de mort dégoûte Tobhias.


« Anasthase et Ange sont passés me voir. C'est gentil de leur part. »


Pour Ange, ce n'est pas surprenant, ils sont plus ou moins liés par procuration sa mère et lui. Anasthase vient par principe. Et comme les jumeaux descendent, c'est un peu le moyen de réunir tout le monde dans un potentiel repas de famille gênant où tous vont jouer un rôle parfaitement maitrisé, faisant semblant de ne pas comploter les uns contre les autres. Anasthase adore cette comédie. C'est son moyen à lui de penser qu'il maitrise parfaitement la situation.Alors que bon, en vérité, tout est dans les mains de Louis depuis longtemps. Même Tobhias le sait. Ou plutôt, son bras brisé le lui fait comprendre à chaque instant.


« Ça doit te faire mal. Ton bras. Que t'est-il arrivé ?

—Louis et moi, nous nous sommes disputés.

—Au point qu'il te brise le bras ? Louis est devenu aussi violent que ça ? »


Tobhias est étonné de la stupidité de sa réponse. Elle sait pourtant très bien que c'est une vengeance compréhensible, un retour de la médaille totalement explicable. Tobhias accepte sa défaite avec une certaine estime pour Louis. Son visage, ce jour là, ne le quitte pas. Louis est devenu violent, la bonne blague. Il a toujours eu beaucoup plus de couilles que Hyacinthe sur ce plan là. Parce qu'il est débrouillard malgré lui. Sans amour ni de sa mère, ni de son père, plutôt que de chercher une attention vaine de leur part et de devenir un paralysé sentimental en cherchant cet amour chez ses partenaires romantiques, Louis a dessiné son jeu, son plan, il mord la vie, ses dents plantées en elle, déchire sa chair, l'avale et la recrache. Il la séduit, enragé. Il en porte l'élégance, la fragrance absolue. Louis est une forteresse imprenable, une immensité indéfinissable. Sa mère a une mine triste et dubitative, celle qui signifie « comment a-t-on pu en arriver là entre nous ».Elle ne se rend donc pas compte qu'elle ne connait rien de ses propres enfants. Comme c'est pathétique.

MOLOCH PARTIE IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant