Ses journées, autrefois perturbées par l'arrivée des pirates, étaient maintenant redevenue quotidienne. Il fallait dire qu'il devait s'occuper d'une bande de mercenaires soucieux, d'un capitaine entre la vie et la mort, de ses tâches de paysans et de sa mère inquiète. Il en avait eu des migraines épouvantables, se demandant comment il n'était pas devenu fou sous la pression. Du moins, jusqu'à ce qu'il finisse par craquer légèrement en voyant les pirates le fixer sans rien faire lorsqu'il faisait ses corvées. Il avait attrapé chacun d'eux, même Katsuki qui n'avait étrangement rien dis, et leur avait donné à chacun une occupation utile. C'était un moyen pour eux de payer le logement, la nourriture et les soins fournis, non ?
Sa mère crut être devenu folle en voyant les pirates obéir docilement à son fils qui était pourtant méprisé par une partie de la population. Mais ceux-ci l'empêchèrent de penser d'avantage en venant l'aider dans le transport des provisions. Izuku avait ainsi de la main d'œuvre pour une durée indéterminée, et il comptait bien en profiter jusqu'au réveil de ce capitaine.
Ce dernier dormait comme un loir, il ne faisait plus de crises au milieu de la nuit et heureusement pour tout le monde, ils commençaient à avoir les nerfs à vifs. Ses blessures guérissaient doucement mais dans la bonne voie, il fallait dire que la profondeur des plaies n'allait pas cicatriser en seulement trois jours. Ils faisaient des tours de garde pour effectuer les soins, Izuku n'était appelé en urgence que lorsque le capitaine semblait sur le point de se réveiller, mais c'était toujours l'espace de quelques secondes avant qu'il ne rejoigne le pays des songes. Très frustrant pour tout le monde, surtout pour le paysan qui ne voyait jamais le jour où ses pirates partiraient.
Il était très étonné de ne pas avoir eu de visite de la part de son "ami" dans la garde. Celui-ci venait toujours un peu avant la récolte des taxes pour s'assurer qu'ils allaient tous payer, ou savoir lequel finira au fond d'une cellule. La collecte commencera dans moins d'une semaine, et il avait déjà prévenu les pirates qu'ils devraient se cacher pendant toute une journée, quitte à planquer le capitaine derrière les bottes de foin dans la grange. Son ami avait la sale manie de fouiner dans ses affaires depuis le dernier incident, il ne tenait pas à subir de nouveaux dommages. Secouant la tête pour chasser les mauvais souvenirs, Izuku reprit son travail qui consistait à créer une cachette pour l'équipage. Il était aidé aujourd'hui de Mezo et Koda, pas très bavards mais relativement efficace.
Le soir tombait très vite dernièrement, le printemps touchait à sa fin et les premiers vents frais arrivaient. Ils décidèrent tous de rentrer pour profiter du feu de cheminée qui venait tout juste d'être allumé. Izuku en profita pour vérifier où en étaient les tâches, et était toujours aussi épaté de voir les pirates se plier à sa vie de paysan. Katsuki faisait le compte des hommes et lui adressa un regard qu'il comprit de suite. Tout en se dirigeant vers les falaises, il se mit à penser que tout ce qui lui arrivait ne le surprenait même plus. Même comprendre ces personnes par un regard, un hochement de tête ou rien qu'un signe, ils se comprenaient tous. A croire que tout ce beau monde avait finit par coexister sagement, n'était-ce qu'une belle façade avant le réveil du capitaine ? Et si celui-ci ordonnait sa mort ainsi que celle de sa mère ? Après tout, il ne le connaissait qu'au travers les récits de son équipage. Il ne savait pas ce qui se passait dans la tête de ce capitaine jugé bon.
En arrivant au sommet, il retrouva Kyoka assigné à la vigie. Il savait qu'elle l'avait entendu arriver, la jeune femme voulait seulement profiter du paysage encore un peu plus. Le paysan s'installa près d'elle, son regard émeraude se dirigea vers le soleil couchant, offrant une belle palette de couleurs orangées.
"- Tu dois te dire que j'ai l'habitude de ce genre de moment, alors pourquoi je reste encore planté là ?"
"- Après la pluie, qu'importe ce que je suis en train de faire, je vérifie toujours vers l'horizon si un arc-en-ciel apparaît. Depuis toujours que je fais ce geste, je ne m'en lasse jamais. Nous sommes tous accros à une chose, un évènement, un objet et j'en passe. Alors non, je ne te juge pas de vouloir admirer un peu plus le soleil." Kyoka pouffa doucement de rire et lui tapa doucement l'épaule.
"- J'étais en train de me dire que nous nous étions bien acclimaté à ta vie de paysan. Quand notre capitaine se réveillera, il se croira encore en plein rêve, ou délire." Se fut au tour de Izuku se rire, il se disait la même chose quelques instants avant.
"- Ma mère est probablement en train de faire le même rêve, et quand vous serez partis, elle se dira qu'elle a beaucoup d'imagination." Ils rirent ensemble et se calmèrent en continuant d'admirer le soleil se coucher lentement.
"- Je vais te dire quelque chose, garde le pour toi." Izuku était bien surpris de ce ton sérieux, mais il était prêt à l'écouter attentivement. "Avant ça, je tiens à m'excuser, au nom de tous, d'avoir débarqué avec autant de violence chez vous." Le paysan hocha la tête, signe qu'il acceptait les excuses. Personne n'avait été blessé, et il avait même vu que Katsuki s'en voulait d'avoir menacé sa mère, ça se voyait dans le fait qu'il faisait tout pour se racheter auprès d'elle. Du moins, à son image, de façon très maladroite. "Ce que je veux dire, c'est difficile à expliquer clairement, mais... Sache que toi et ta mère, nous vous considérons comme membre à part entière de notre équipage." Izuku resta un instant interdit. Venait-il de bien entendre ? Il regarda de nouveau le large, essayant de digérer cette information. Même si tout le monde coexistait comme une famille normale, les acceptait-il comme eux l'acceptaient ? Kyoka sembla comprendre ses tourments et posa sa main sur son épaule. "Tu n'es pas obligé de nous voir comme tel, du moins, pour l'instant. Mais je tenais à ce que tu sois au courant de ce qu'on pensait de vous. Je pensais te rassurer sur le fait qu'on n'allait pas vous massacrer après le réveil de notre capitaine, mais j'ai bien peur d'avoir empirer tes craintes."
Elle se releva et partit sans plus de cérémonie, laissant Izuku digérer les informations. Il souffla longuement, apaisé du fait que lui et sa mère vivront encore quelques années après leur départ vers les différentes mers. Mais pourquoi considérer ces personnes comme des proches s'il n'allait jamais les revoir ? Comptaient-ils catégoriser sa maison comme refuge ? Malgré son affection pour eux, faible mais présente, il ne pouvait pas courir le risque d'être découvert par la garde et que sa mère puisse subir un châtiment. C'était au-dessus de ses forces.
Il serra les poings, repensant à tout ce qu'ils avaient endurés juste en étant eux-mêmes. Sa mère avait versé beaucoup de larmes, il ne voulait plus que cela se reproduise. Le jeune homme prit alors le chemin vers la maison, où une légère agitation y régnait, signe que tout ce beau monde préparait le repas. Quand ils partiront, il n'y aura plus que lui et sa mère, et le silence apaisant de la nature. Cela fera un vide les premiers jours, mais ils surpasseront ça, comme ils l'ont toujours fais. Rien ne doit changer.
A peine avait-il passé la porte, qu'il fut prit par les épaules et une histoire folle concernant Denki lui fut contée. Ce dernier s'empourprait dans son coin, honteux d'avoir cru qu'une sirène se cachait dans une baie et qu'il avait obligé le capitaine à y faire une escale, qui s'était soldé par un échec cuisant. Le paysan en sourit, tout comme sa mère qui cachait son rire derrière sa main tout en vérifiant que le potage ne brûlait pas. Malgré cette euphorie, le paysan garda de la distance, il n'était pas question de s'accrocher à cet équipage atypique. C'était un nouveau souffle, un passage heureux dans leur vie, mais ça devait s'arrêter là. Il s'en fit un point d'honneur.
Le lendemain, alors que tout le monde dormait, Izuku venait tout juste de finir les bandages du capitaine. Momo partit alors se coucher, ayant veiller toute la nuit. Le jeune homme en profita pour nettoyer ses instruments. Il était totalement concentré dans sa tâche qu'il se tendit en sentant une présence derrière lui, mais sans pour autant lever les yeux vers le miroir devant lui. Il devait manquer de sommeil, les ronflements de l'équipage étaient quelque chose dont il se serait bien passé.
Mais alors que son regard croisa son reflet, il y vit des yeux vairons le fixer durement. Sans avoir pu faire un geste ou dire une parole, sa bouche fut prisonnière d'une main robuste et sa gorge menacée par le scalpel qu'il venait tout juste de nettoyer. Son corps fut plaqué contre celui encore meurtri du capitaine, qui ne grimaça même pas. Le cœur d'Izuku battait la chamade, sentant son heure arriver. Il leva les mains en signe de capitulation, mais le capitaine le fixait toujours aussi sévèrement via le miroir. Izuku tentait de garder son calme, mais il tremblait. S'il n'était pas fermement maintenu contre ce corps, ses jambes l'auraient lâchées.
De longues secondes s'écoulèrent, jusqu'à ce que le capitaine parle de sa voix rocailleuse dû à son réveil d'outre-tombe.
"- Comment je suis arrivé ici ?"
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Capitaine...
FanfictionQue faire lorsqu'on se réveille au milieu de nul part sans aucun souvenirs ? Chercher des réponses avec le peu d'indices que l'on possède. Telle sera la quête de ce personnage amnésique dont l'esprit est hanté par une multitude de questions. Bonne l...