Chapitre 26

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Lorsqu'elle fut au courant de l'ensemble des évènements, Kyoka resta silencieuse pendant une longue minute, rendant hommage à ses compagnons morts au combat. Elle n'avait rien dit tout au long de l'histoire d'Izuku, et ce dernier avait remarqué qu'elle avait perdu la vue. Ses yeux avaient étrangement noircis, telle une maladie qui dévorait lentement le corps et l'esprit. Il s'estimait heureux de ne pas pouvoir en voir d'avantage à cause de l'obscurité, la pauvre pirate avait suffisamment souffert pour être vu ainsi par un ami.

« - Tu peux me décrire le bébé ? Possède-t-il des traits particuliers ? » Sa voix était plus douce, comme si la situation actuelle n'existait pas. Il l'avait toujours dans ses bras, sa tête reposait sur son épaule, comme s'il la berçait avant de s'endormir.

« - C'est peut-être prématuré de ma part, mais je pense qu'il tiendra du regard de son père et de son calme. Mais il a les mêmes joues et la bouche de sa mère, il sera un véritable bourreau des cœurs à sa majorité. » Kyoka ria doucement.

« - Je l'imagine déjà jeune homme, il aurait fait la fierté de ses parents qu'il décide de reprendre le flambeau ou non. On était tellement contente pour Tsuyu... On voulait faire en sorte que cet enfant soit le plus heureux du monde. »

« - Il est chanceux d'avoir un entourage tels que vous tous. » Sa gorge se noua, pensant à ceux qu'il ne verra jamais. Mais la promesse de Tsuyu lui revint en mémoire, elle ferait en sorte que son fils connaisse chaque membre de cet équipage. Kyoka eut une quinte de toux assez violente, qui dura trop longtemps à son goût. Chercher un pronostic sur sa maladie serait vaine, il ne voulait pas savoir ce que Tomura et ses sbires lui avaient injectés, même elle, ne devait pas le savoir. Peut-être qu'il lui avait seulement prédis les symptômes, connaissant le bourreau. Il en profita pour fouiller le nécessaire de soins, mais il n'y avait pas d'eau à proximité, ce qui aurait grandement aidé la jeune femme. Il trouva une solution probablement anesthésiante, et en imbiba un linge dont il doutait de la stérilité afin de nettoyer le visage de son amie. Elle n'arrivait pas à se redresser, toutes ses forces semblaient avoir abandonnés son corps, même sa main qui tenait celle d'Izuku ne serrait plus comme avant.

« - Sais-tu, ce qui me rend le plus triste en ce moment même ? » Le paysan répondit négativement. « C'est que je ne vais pas pouvoir tenir ma promesse envers Momo... »

« - Ne dis pas des choses comme ça... » Il ne savait si c'était elle ou lui qu'il essayait de convaincre, car il fallait être dans le déni pour ne pas remarquer que la pirate ne survivra pas cette nuit, avec ou sans soins.

« - Tu es probablement au courant, pour elle et moi... A sa façon de réagir quand j'ai disparu... » Izuku sentit son cœur se serrer en imaginant le visage de Momo si elle apprenait le calvaire de Kyoka dans cette maudite salle. « Elle qui rêvait depuis si longtemps de faire de moi sa femme... »  Elle pouffa de rire, comme elle aurait rit d'une blague stupide.

« - Ce n'était pas le coup de foudre immédiat ? »

« - Loin de là... Je dirai que c'était presque comme toi et le capitaine. » Ce fut au tour de Izuku de pouffer de rire. Il s'installa plus confortablement contre le mur, plaçant son amie entre ses jambes, sa tête délicatement posée sur son épaule, tentant de la réchauffer du mieux qu'il le pouvait. L'heure était venu d'écouter son histoire, la dernière chose qu'elle lui racontera avant de mourir. Il avala le sanglot qui avait menacé de s'échapper après cette pensée et serra tendrement la pirate tout en reposant sa tête sur la sienne. « C'est elle qui m'a trouvé, dans une ruelle en train de faire de la musique. Au début, elle ne faisait que nous écouter et nous observer sans grandes convictions, comme une majorité. Mais son regard changea lorsque les gardes s'approchaient pour nous condamner. Il n'y a pas que dans ton village que les gardes sont idiots, ceux que j'ai supportés avaient horreur de l'amusement dans les rues. Donc, on avait appris à filer en vitesse tout en récupérant le peu d'argent que l'on récoltait." Elle toussa, sans prendre la peine de nettoyer le sang perdu. "Son regard ne m'a pas quitté jusqu'à ce que je disparaisse, mais je ne m'en étais pas tellement soucié, jusqu'à la fois suivante où on se rencontra. Cette fois là, j'ai clairement vu des étoiles dans ses yeux, et un sourire tellement rayonnant qu'il m'effraya. J'ai cru voir une folle, surtout lorsqu'elle me captura les mains pour me rapprocher d'elle. Tu connais ce côté excentrique, il perturbe quand tu n'es pas habitué au contact."

Capitaine...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant