"Jenny of Oldstones"

Chapitre XIII - "Je scelle ici ces deux âmes"

Jeyne avait beau se cacher sous les draps, elle entendait les rires et les bavardages peu discrets de ses femmes de chambre. Elles sont excitées. Heureuses d'avoir été choisies par le Seigneur de Winterfell pour prendre soin de toi, pour te vêtir de tes plus beaux atours, et te préparer à la cérémonie de ce soir. La lionne s'enfonça un peu plus dans ses couvertures. Elle se revoyait encore franchir les portes de Winterfell, sur la croupe d'Idriss et chevaucher au côté de Tyrion et de Jaime. C'était hier. C'était hier et aujourd'hui c'est le jour de mon mariage. Elle sentit les battements de son cœur s'affoler sous le poids de la nervosité. Elle n'y arriverait pas.

- Mesdemoiselles, sortez d'ici tout de suite !

Les jeunes servantes obéirent et il n'y eut bientôt plus un bruit dans la chambre de la future mariée. Septa Églantine s'assit sur le lit et déposa sa main sur la silhouette emmitouflée de sa protégée.

- Vous êtes forte Jeyne. C'est votre mental d'acier qui va vous permettre de survivre à cette journée. Faites ce qu'ils attendent de vous et demain sera un autre jour. Demain, vous ne serez plus Jeyne Lannister, mais la Dame de Winterfell. Vous pourrez faire ce que bon vous semble.

Jeyne ne réagit pas tout de suite aux aimables paroles de son amie.

- Vous pourrez retourner à Castral Roc.

- Pensez-vous qu'il me le permettra ? Alors que nous serons tout juste mariés ? dit-elle en pointant enfin le bout de son nez.

- Cet homme irait défier un Kraken pour votre bon plaisir.

La réplique de sa Septa eut le mérite de la faire rire aux éclats, ce qui réchauffa le cœur de sa nourrice. Jeyne aurait tant aimé claquer des doigts et se réveiller le lendemain matin, prête à oublier l'horrible soirée qui se profilait à l'horizon. Mais elle ne le pouvait pas. Sa Septa avait raison, elle devait affronter cette sombre journée.

Elle souffla un bon coup, se leva de son lit et ouvrit la porte de sa chambre. Ses dames de compagnie lui apportèrent une large bassine en bois qui fut rapidement installée et décorée des fleurs du jardin de verre de Winterfell. La senteur florale embauma l'espace et Jeyne se dépêcha de rentrer dans l'eau chaude de son bain. Elle ferma les yeux et se laissa masser par les quatre Nordiennes. L'avantage de se marier est le fait de vivre un véritable havre de paix juste avant la cérémonie, pensa-t-elle. Elle profita pleinement du moment, et sortit de l'eau brûlante au bout de quelques minutes. Elle fut ensuite rapidement entourée de ses dames qui l'enduisirent d'une crème hydratante pour sa future nuit de beauté. Une nuit de malheur, oui. Elle fronça les sourcils, et ses pensées se tournèrent immédiatement vers Robb. Que faisait-il pendant qu'elle se faisait pomponner par ses dames ? Sa Septa refit son apparition dans la pièce avec dans les bras un large colis qu'elle déposa sur le lit de la lionne.

- Ouvrez-le Madame, l'intima-t-elle, un sourire sur les lèvres.

Prise d'une soudaine curiosité, Jeyne ne tarda pas à ouvrir la boîte. Elle fut stupéfaite à la vue de la robe en dentelle blanche qui ornait le présent. Délicatement, elle sortit la toilette spéciale qu'on venait de lui offrir pour le jour de ses noces. Ce n'est pas possible... Ce n'est pas...

- Septa...

- Si..., répondit Septa Églantine d'une voix émue. C'est bien celle de Joanna Lannister.

- Mais...

- Votre père vous en a fait cadeau lorsque vous avez quitté Castral Roc. Il me la confié pour vous la donner au moment propice.

Jeyne refoula ses larmes. C'était donc le présent de son père... Cela avait dû être une telle déchirance pour lui de se séparer d'un aussi beau souvenir. Sa nourrice avait très bien connu Joanna Lannister et c'est grâce à elle qu'elle avait pu mettre un visage sur cette femme qu'elle n'avait jamais connue de son vivant. De son idylle avec son cousin Tywin, à leur heureux mariage, la Lady de Castral Roc avait été une véritable source de bonheur pour le lion. Jeyne en avait conscience, et elle éprouva un immense chagrin à l'idée que Tywin Lannister ait laissé partir un objet si précieux dans son cœur.