Chapitre XVII - "Ce n'est pas ce que nous avions convenu"

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Telle une furie, elle se laissa porter par le vent, libre et enfin prête à embrasser sa véritable destinée. Lorsqu'elle sentit sa monture ralentir, Jeyne prit soudainement conscience qu'Idriss n'avait plus toute la vitalité de sa jeunesse. Les chevaux de l'Ouest étaient certes réputés pour être fougueux et majestueux, mais c'est principalement leur longévité qui imposait le respect des Hommes. Idriss avait depuis longtemps dépassé l'espérance de vie de son espèce.

Jeyne passa au trot, ne souhaitant pas fatiguer davantage son amie. Elle lui tapota tendrement l'encolure, pour la remercier de ses efforts.

- Pensez-vous que nous sommes bientôt arrivées ? la questionna Septa Églantine, qui arriva enfin à sa hauteur.

- J'espère... Sinon j'ai bien peur que nous devrons passer la nuit dehors.

- Par les Sept, il ne manquerait plus que ça, râla-t-elle de mauvaise humeur, ce qui ne manqua pas de faire sourire la Lady.

- Peut-être que si vous aviez été plus rapide, nous les aurions déjà rejoint à l'heure qu'il est.

- Comment ? s'offusqua la vieille femme.

Jeyne partit dans un fou rire lorsqu'elle vit le visage consterné de sa Septa.

- Je vous taquine, Septa.

Après plusieurs minutes à trottiner, elles arrivèrent finalement en haut d'une colline, qui surplombait une vaste plaine gelée à l'orée d'un bois. Jeyne jeta un rapide coup d'œil sur le sol boueux, toujours aussi martelé par les sabots des chevaux nordiens. Elle s'apprêtait à rassurer son amie en lui confiant qu'elles étaient sur le droit chemin, lorsque cette dernière, prise d'une excitation soudaine, l'obligea à regarder à l'horizon. Jeyne fixa ce que lui désignait du doigt sa nourrice.

Une large fumée partait du bois pour venir se disperser dans le ciel gris. Le feu ne pouvait signifier qu'une seule chose. Des hommes avaient choisi d'y monter leur campement pour la nuit. Jeyne et Septa Églantine échangèrent un large sourire. Elles continuèrent leur chemin, rassurées à l'idée de passer la nuit auprès de Robb et de ses hommes.

***

Plus les deux femmes se rapprochaient des voix masculines, et plus l'angoisse montait pour Jeyne, qui réalisa que Robb n'apprécierait pas de la voir ici. Toutefois, elle resta en selle, la tête haute, et traversa la foule de soldats dont les voix se stoppèrent à la minute où ils posèrent leur regard sur elle. Un silence de mort s'abattit sur le campement qui semblait pourtant si festif avant leur arrivée.

La lionne ne fit pas attention aux regards désobligeants, et observa le campement. Plusieurs feux avaient été allumés, et des tentes avaient été montées pour y passer la nuit. Certaines bannières des maisons vassales reposaient sur un petit talus, à l'écart des rassemblements. Elle repéra la hache sur fond argenté de la Maison Cerwyn, l'échappée blanche sur fond noir de la Maison Karstark ou encore l'ours noir entouré de vert, appartenant à la Maison Mormont.

Une délicieuse odeur la tira de ses pensées. De la viande grillée. La faim lui tirailla l'estomac, et il lui sembla entendre le gargouillement d'un ventre affamé juste à ses côtés. Elle voulut taquiner sa Septa, lorsqu'une voix se fit entendre dans la foule.

- Pourquoi je n'entends plus...

Robb se figea lorsqu'il vit sa femme, montée sur sa jument, les joues rouges transies par le froid, et les cheveux mouillés par la neige. Il lâcha le verre qu'il tenait à la main, complètement stupéfait par la venue de Jeyne, qu'il ne quitta pas des yeux. C'est à peine s'il se rendit compte de la présence de sa nourrice à ses côtés. Jeyne lui sourit tendrement, comblée de pouvoir enfin le voir.

"Jenny of Oldstones"Où les histoires vivent. Découvrez maintenant