L'arrivée

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À demi allongée sur la banquette du fond, je somnole au gré des secousses et des paroles chuchotées par les usagers du bus. Rester dans cet engin inconfortable pendant des heures me donne des fourmillements dans les jambes. Heureusement nous ne devrions pas tarder à arriver à notre destination, le New Washington. Capitale culturelle et politique de la Grande Fédération International, sois disant créée pour lutter contre la criminalité grimpante des nombreux bidonvilles. Bien sûr tout cela n'est que mensonge. La réalité, c'est que ce gouvernement est intolérant quant à l'utilisation du flux, et tyrannise toutes personnes en faisant usage.
- Mademoiselle !
La vieille dame assise au bout de la banquette me tire de ma rêverie.
- Mademoiselle enfin ! Poussez vos jambes. Plus ça va plus vous empiétez sur mon siège!
Quel délicieux réveil après plusieurs heures de trajet... J'obtempère non sans marmonner quelques injures et me recroqueville dans mon coin près de la vitre gauche, le pied en appui sur le siège d'en face. Manque de chance, la vieille dame de ce siège ce retour pour observer la scène. Je prends quelques secondes pour passer en revue les passagers, et mise à part un blondinet athlétique dans la vingtaine et une femme d'âge mûr, tous semble être sortie de l'EHPAD.

Une annonce du conducteur fait pivoter toutes les têtes vers l'avant du bus.
- Mesdames et Messieurs, nous sommes arrivés aux terminus de ce bus, veuillez descendre dans le calme et vérifier que vous n'oubliez aucune affaire personnelle. Merci d'avoir voyagé à bord du Transport Routier Gouvernementale.
Suivie de quelques notes de musique pour clore l'annonce. Tous se levèrent et prirent leur bagages, pour certains, plusieurs valises et sacs empilés, pour d'autres une simple veste ou ,comme moi, un sac à dos bien rempli. La dame d'âge mûr que j'avais repérée un peu plus tôt est juste devant moi au moment de descendre du bus.

Elle pose son pied sur le bord du marchepied, et - c'était prévisible bien sûr, qui pose son pied sur deux centimètres d'une marche sérieusement - dérape pour venir s'affaler de tout son poids sur mes jambes, me faisant basculer vers l'arrière. C'est plus drôle que de jouer au domino non ? Par un hasard des plus douteux, le blondinet athlétique se trouve juste derrière moi. Décidément, ils ont décidé d'exterminer toute la jeunesse ? Il attrape mon bras sans ménagement comme une vulgaire branche d'arbre, et me redresse brutalement. Dit que je te fais chier aussi ! La moindre des politesses est de s'excuser, ce que je fais donc.

- Oh désolée, on... On a perdu l'équilibre.

Le "on" désigne évidemment Miss catastrophe, qui s'est affalée quelques secondes plus tôt sur mes jambes. La seule réaction de cet homme fue de me décocher un regard agacé et de sortir du bus comme une furie. La politesse ne fait malheureusement pas partie de l'éducation de certaines personnes. Heureusement pour moi, la dame semble saine d'esprit - même si elle ne semble pas connaître l'utilisation d'un marchepied - et s'excuse avec un certain affolement. Peut-être bien qu'elle a un problème mental finalement.

- Excusez- moi, je n'ai pas fait exprès ! J'ai manqué la marche sans le vouloir. Vous n'êtes pas blessée ?

- Non ça va merci, vous ne vous êtes pas fait mal en tombant ? C'était inattendu haha ...

Tu m'étonnes que c'était inattendu, cette femme aurait bouffé le béton si je n'avais pas servi de coussin.

- Ça va merci, je m'appelle Owen. Encore désolée pour vous avoir fait tomber. Je vous offre un verre pour m'excuser, ça vous dit ?

Les usagers du bus commencent à s'impatienter derrière nous car nous bloquons la sortie. Nous nous décalons sur le côté du trottoir pour les laisser passer. Je dois dire que je comprends ces vieux, ils ne leur restent plus beaucoup de temps à vivre après tout.

- Je m'appelle Adèlina, on peut se tutoyer si vous voulez mais je n'ai pas vraiment le temps pour un verre, désolée.

- D'accord pas de problème Adèlina, tu viens d'arriver ici ? Où vas-tu ?

- Oui, je suis nouvelle ici, je compte trouver du travail et m'installer. Là je vais au recrutement organisé par la Grande Fédération International. Tu peux m'accompagner jusqu'au site de recrutement et une fois le test terminé, on ira boire un verre ?

- Parfait ça me va !

Et c'est ainsi que nous avons décidé de nous diriger vers le centre ville. Pendant le trajet elle me parle un peu de son vécu et de sa situation familiale. Elle dit être née en Dakota du Sud et y avoir vécu jusqu'à ses 23 ans, avant de partir pour l'Irlande pendant 3 ans. Pour finalement changer de pays à nouveau, direction Londres pour 4 années. Et comme cette ville ne lui plaisait pas, elle a décidé de venir ici, au New Washington . Grande sœur d'un jeune frère, et fille d'une mère travaillant pour le gouvernement, elle a quasiment dû élever son frère seul. Les anniversaires, Noël, et ce genre d'événement familiaux étaient les rares moments où sa mère revenait les voir. Après m'avoir déballé sa vie comme un Kinder surprise, elle s'amuse à jouer à Sherlock pour deviner d'où je viens. Chose qui ne doit pas être si complexe puisque le bus a effectué un trajet direct depuis New York. Lieu où elle a sans doute embarqué depuis l'aéroport en revenant de Londres. Pas si futée Miss catastrophe finalement.

Une fois arrivé dans le centre ville, de grands panneaux marqués du symbole de la GFI, un trèfle rouge avec en son centre une étoile à 5 branches, nous indique la direction du site de recrutement. Une double file nous fait face, à gauche, les recrutements de bureaucrate, et à droite, ceux pour la corporation. La corporation est la brigade spécialisée dans l'utilisation du flux, c'est elle qui le régule dans les rues et empêche tout débordement de violence dans la capitale. On fait également appel à elle lors d'événements impliquant des membres du gouvernement. Ce sont les plus hauts gradés de l'armée civile.

Lorsqu'Owen me vit entrer dans la file de la corporation, elle fit les gros yeux. Certes je semble jeune et frêle, mais ce n'est pas pour autant que je ne sais pas manier le flux. "C'est comme une seconde nature pour toi!" disait mon enseignant en maîtrise du flux. Et c'est bien l'une des seules choses pour lesquelles je me débrouille bien. La plupart du temps je suis une cancre en cours, et je suis bien contente d'en avoir terminé avec ma formation. La formation est obligatoire pour tout personne voulant utiliser le flux, avoir son diplôme signifie qu'on peut postuler dans toute les brigades lié à la réglementation du flux. Ce dernier nous permet d'avoir tout nos sens acrus, sur développé. C'est une sorte de dopage naturel, certain en sont dotés, et d'autre ne le sont pas. C'est la grande loterie de la vie.

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 21, 2022 ⏰

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