Chapitre 3

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165 jours. Cela fait cinq jours que j'espère sans relâche que Niall se rende compte qu'il a fait une terrible erreur. J'ai eu peu de temps pour le voir et souvent, ça se fait au travail, mais je garde espoir. Hemia a tenté plusieurs fois de me faire renoncer, que ça me fait plus de mal que de bien, mais je n'arrive pas à m'y résoudre. Ça me fait du bien de le voir, de savoir que je peux encore lui adresser la parole, faire partie de sa vie, même si ce n'est pas de la façon qui me convient.

— Lily ?

Je lève les yeux de mon document à corriger et croise avec délice celui de Niall. Je lui adresse un sourire sincère et me redresse.

— Niall. Tu as besoin de quelque chose ?

— Je te cherchais. J'ai besoin de ton avis sur un sujet.

Il sort sa tablette et me montre deux graphiques avec des données différentes. Instantanément, j'ai l'impression de retourner il y a quelques mois, lorsque nous habitions dans notre appartement. Qu'est-il devenu à présent ? Est-ce qu'il l'a gardé, ou est-il à présent habité par de sombres inconnus ?

Je lui indique que le second graphique semble le plus pertinent et le plus compréhensible. Il me remercie et coupe l'écran avant de me fixer et qu'un silence gênant s'installe. Je les ai toujours appréciés lorsque nous étions ensemble. Ils permettaient de me focaliser sur nous, d'apprécier sa présence. Cette fois, pourtant, j'ai l'impression qu'il attend quelque chose de moi, mais je n'arrive pas à comprendre quoi.

— Tu as toujours été d'une grande aide pour moi. J'ai vraiment beaucoup de chance de t'avoir dans ma vie, commence-t-il.

Mon coeur s'emballe. Est-ce que notre petit échange lui a rappelé de bons souvenirs ? Des souvenirs qui l'ont rendu nostalgique au point de se rendre compte que notre séparation était une erreur ? Je serais prête à tout pour qu'il prononce ces paroles.

— C'est ce que je me suis toujours dit aussi, je souffle, le coeur battant.

Il m'adresse un regard que je n'arrive pas à décrypter.

— Ecoute, j'aimerais vraiment qu'on parte sur de bonnes bases tous les deux. Je tiens vraiment à toi et ces quelques mois m'ont permis de me rendre compte que je ne peux pas te rayer de ma vie de la sorte.

Je bois ses paroles, je m'abreuve d'espoir. Un espoir qui gonfle de plus en plus à mesure qu'il parle. J'ai attendu ça depuis si longtemps. Je commençais à ne plus y croire.

— Je suis heureux que tu ne m'en veuilles pas, que tu souhaites également m'avoir dans ta vie malgré notre passé commun. J'aimerais t'inviter à déjeuner ce midi pour... rattraper le temps perdu ?

Le voir si incertain avec moi me crève le coeur, nous qui avons toujours été si complémentaires, si à l'aise, que le voir marcher sur des oeufs avec moi m'insupporte.

— Avec plaisir. Je n'ai pas d'urgence aujourd'hui, donc je pense que ce sera bon.

Je lui adresse un sourire sincère. Ils le sont depuis qu'il a repris contact avec moi. Il prend congé au moment où Balthazar arrive dans mon bureau. Il lui adresse un regard froid avant de se détourner de lui. Sa colère semble être dirigée vers moi, à présent. Super. Parfait. Tout ce dont j'avais besoin.

— Hartfills, les documents sont prêts à être envoyés ?

Sa question est ridicule et il le sait. La journée n'a pas terminé sa première heure et j'ai une dizaine de documents à corriger. J'ai presque terminé le premier.

— Non. Pour quelle heure vous les faut-il ?

Je tente d'afficher un air sûr de moi, mais face à son aura écrasante, je n'ai aucune chance. Il semble réfléchir à la question avant d'esquisser ce qu'il semblerait être un début de sourire, mais rien n'est moins sûr.

— Hier.

Je reste interdite. Les documents m'ont été déposés hier soir après mes heures de travail ou ce matin très tôt avant que je ne commence ma journée. Je mets quelques secondes à comprendre que c'est un sous-entendu pour : le plus tôt possible.

— Je m'y attelle. Je vais faire mon maximum pour que ce soit bon pour avant le déjeuner.

Il hoche la tête. Je suis surprise que cela lui convienne. Il fait demi-tour, mais s'arrête avant de franchir le seuil. Mon souffle est toujours bloqué dans ma poitrine, j'attendais qu'il quitte mon bureau pour pousser un soupir de soulagement.

— En parlant de pause-déjeuner. Vous passerez la vôtre en compagnie du service, car nous avons une réunion après le déjeuner. Votre présence est obligatoire.

Je fronce les sourcils. Pourquoi devrais-je déjeuner avec l'équipe si la réunion se passe après la pause-déjeuner ? Il semble avoir lu dans mon esprit, car il m'indique comme si je ne comprenais pas l'anglais :

— Nous devons manger sur le pouce. Quinze minutes maximum avant que la réunion ne commence.

Il quitte enfin mon bureau pour s'enfermer dans le sien. Je souffle et me rappelle que je devais déjeuner avec Niall ce midi. Il va falloir que je reporte à plus tard. Je pousse un soupir de frustration et me mets au travail.

Lorsqu'il est l'heure de déjeuner, je termine à peine le travail que mon cher boss m'a donné. Niall entre dans le bureau à la minute près et je peste contre les réunions surprises. J'explique à mon... ex petit-ami ? Nouvel ami ? que je ne peux pas le voir aujourd'hui.

— C'est dommage. Je suis en déplacement toute la semaine. On se fait ça la semaine prochaine ?

J'hoche la tête, bien trop heureuse qu'il ne le prenne pas mal. Il quitte mon bureau et je me dirige vers la salle de réunion, mon déjeuner maison dans les mains. Marietta et Sophie sont déjà là. Elles m'indiquent une place à côté d'elles. Henry arrive à ma suite, essoufflé avec les plats chinois de nos collègues. Il me salue et prend place à ma gauche.

— Ta réunion s'est bien passée ? Je demande, gentiment.

Il remue son plat de nouilles avec ses baguettes en bois en hochant la tête.

— Oui, mais je me serais bien passé de celle-là. Je déteste quand on me prévient au dernier moment. Et surtout qu'on me sucre ma pause déjeuner.

J'approuve de la tête et entame ma salade composée de nombreux légumes. Ma nouvelle lubie est de perdre un peu de poids pour plaire à Niall. C'est ridicule, je le sais, mais ça me donne un but sur lequel me concentrer, pour ne pas perdre pied.

— Bonjour à tous, j'espère que cette réunion de dernière minute ne perturbe pas trop votre organisation, indique la voix grave de Balthazar.

Je lâche ma fourchette de surprise et lève les yeux vers lui. Il a entre les mains une boite hermétique en plastique fumante. Personne n'ose répondre et il semble satisfait. Il s'installe à l'autre bout de la table ovale et nous fait face. Mes collègues recommencent à manger, car nous avons peu de temps, mais je ne peux pas. Sa présence me terrifie. Il commence à manger sans faire attention à nous et un silence pesant s'installe. Je me fais violence et picore dans mon assiette.

— Bon. Nous allons commencer.

Je fixe ma nourriture avec résignation. De toute façon, je ne peux rien avaler. Nous rangeons nos sacs de nourriture avant de sortir calepin, stylos et tablette tactile.

— La réunion d'aujourd'hui concerne la refonte des congés payés, annonce Balthazar avec un grand sourire.

Un sourire qui indique clairement qu'il souhaite voir ces derniers disparaître à jamais. 

Promise meOù les histoires vivent. Découvrez maintenant