Accidents : Débuts à l'université

Chapitre 9

Les semaines passent, Ismaël me manque, et je prends goût à me changer en rentrant des cours. Depuis la dernière fois, j'ai même essayé de faire quelques balades dans cette tenue : à la boulangerie, au supermarché, et même à l'université lorsque j'ai seulement quelques heures de cours. Je me mouille volontiers à la maison, mais très rarement en dehors. Tant qu'elle est sèche, elle reste discrète et inodore.

Je continue de me rendre sur Grindr sans grand espoir, notamment lorsque je m'ennuie en cours magistral. C'est le cas aujourd'hui en conférence d'économie du réchauffement climatique, où j'entame une conversation avec un nouveau profil à quelques mètres seulement de ma position. J'imagine que c'est un étudiant de ma promotion, mais difficile de dire lequel. Attends, si, je sais. Enfin, c'est impossible. Ce torse, cette salle de bain... Ismaël.

Soucieux de rester discret derrière l'écran de mon téléphone mais incapable de retenir mon calme, je lui envoie un message.

- Salut, ça va ?

De toutes les phrases d'accroche, il fallait que je choisisse la plus banale, la plus invisible, celle qui ne lui donnerait aucunement envie de répondre à mon profil vierge. Et pourtant...

- Bof je me fais chier. T'es en amphi B aussi ?

- Ouais, c'est la loose...

- Tu cherches quoi ici ?

Pas tout à fait familier avec le lexique et les coutumes de l'application, je réponds maladroitement :

- Je suis open, et toi ?

- Ça veut rien dire mec. Tu veux te faire des potes, un copain, baiser ?

- Ah... discuter pour le moment.

- Ok ok, bon si t'es de ma promo c'est surement mieux qu'on se rencontre pas, je veux rester discret.

- T'es sur Grindr depuis longtemps ?

- Oui et non, j'ai téléchargé l'appli au lycée et j'ai eu quelques coups depuis, mais c'est rare. Et toi ?

- Non, seulement quelques semaines, depuis que j'ai eu un crush sur un mec en cours.

- Ahah, c'était pas réciproque ?

- Non, je le pensais hétéro...

Le message envoyé, je me rends compte de la gaffe.

- Il ne l'est pas ?

- Si, si ! Je voulais dire, c'est du passé. Je me suis fait une raison.

- Tu fais bien mec. Moi je me considère hétéro curieux, j'ai juste envie de m'amuser avec des gars mais rien de sérieux.

Son romantisme me sidère. Je ne suis qu'à moitié déçu car une porte reste ouverte. Nous poursuivons nos échanges jusqu'à la fin du cours sans que nos regards ne se croisent. Il n'y a pas de raison qu'il se doute que c'est moi.

L'anonymat me fait pousser des ailes, un courage peu honorable qui me permet de lui poser des questions que je n'aurais jamais osé dans la vraie vie. J'apprends que Ismaël est "actif", attiré par les garçons de mon genre et pas effrayé par les "plans toilettes". Je suis tellement surpris... Lui qui renvoie une image de jeune homme respectable et propre sur lui. Je suis bien mal placé pour juger, assis sur un siège du RER amorti par une couche pour adulte.

Le soir, nos échanges prennent une autre tournure. Les deux vieux ados que nous sommes partageons quelques uns de nos fantasmes. Il confesse aimer qu'on travaille ses tétons, et j'avoue -en mentant car je n'ai encore rien vécu de tel- raffoler qu'on me lèche le trou. Nous formulons ces fantasmes et leur donnons vie par messages, faisant de la conversation une histoire érotique interactive. Les échanges sont brefs mais de plus en plus intenses. Si je ne fais pas quelque chose, ma couche va exploser. Presque naturellement, je commence à me frotter à mon lit contre la ouate du change complet. Pas encore trempé mais suffisamment imbibé, il entoure mon sexe et le lubrifie par son humidité encore tiède. Les notifications de messages érotiques s'enchaînent et je finis par me répandre de plaisir. Après quelques minutes sans nouveau message, je reçois :

- Terminé ?

- Toi aussi ?

- Bonne nuit ;)

Dans mon esprit alors comblé, une question demeure : s'était-il vidé comme moi en se frottant dans sa couche ?