Volatile à la dérive

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°Oiseau de Sable, je dessinais des cercles °vaporeux dans le crépuscule des idoles.
°J'ébouillantais les nuages, explosais ces couvercles,
°Qui cachent aux hommes, les courses de mes vols.

°Le temps est lourd et la nuit de pétrole.
°L'humanité s'endort sous le faste de mes paraboles.
°La nécropole du ciel caresse les bémols,
°Dans ces lignes symphoniques, je suis la boussole.

°Oiseau de verre, je cristalliserais les souhaits,
°Où les verts des arbres miroitent le ruisseau,
°Où le bleu des fleuves effeuillent les filaos,
°Où les azalées couvrent leur fragile peau,
°Des duos tranquilles soufflant les vaisseaux.
°Oiseau de verre, je sifflerais les menuets,
°Afin que dans les trajectoires de mes dièses,
°Résonnent les paix, s'éteignent les braises;
°Afin que dans la danse de mes Genèses,
°S'embrasse les peuples que la haine biaisent.
°Oiseau de verre, je construirais mon nid
°Dans les volutes cathartiques du paradis.

°Je volerais sans cesse dans les oceans de metal,
°Chardonneret immobile sur les greves de cristal.
°J'aimerais les fantaisies d'une voûte couleur de miel,
°Qui dégoulinerait des prismes arc-en-ciels.

°Je voyagerais loin tres loin, synthèse fictive,
°Heureuse dans la perte, comme un volatile à la dérive.

Pour les curieux :

Filao vient du malgache signifiant arbre,
En Polynésie, c’est le symbole du courage et l’emblème de Oro, le Dieu de la guerre.

Et un petit poème que je viens de trouver :

“Filao, filao, frère de ma tristesse,
qui nous vient d’un pays lointain et maritime,
le sol imérinien a-t-il pour ta sveltesse
l’élément favorable à ta nature intime?

Tu sembles regretter les danses sur la plage
des filles de la mer, de la brise et du sable,
et tu revis en songe un matin sans orage
glorieux et fier de ta sève intarissable.

Maintenant que l’exil fait craquer ton écorce,
l’élan de tes rejets défaillants et sans force
ne dédie aux oiseaux qu’un reposoir sans ombre,

tel mon chant qui serait une œuvre folle et vaine
si, né selon un rythme étranger et son nombre,
il ne vivait du sang qui coule dans mes veines!”

Joseph Rabearivelo (1934)

Joseph Rabearivelo (1934)

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Recueil de Poèmes : L'Ombre de la MélodieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant