ᴄʜᴀᴘᴛᴇʀ 1 | ᴄᴀᴠᴀɴᴀᴜɢʜ

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sᴇᴘᴛᴇᴍʙʀᴇ 2016
ᴄᴏʟᴅᴄʜᴇsᴛᴇʀ, ᴄᴀɴᴀᴅᴀ

Cette sensation d'être un fantôme dans son propre corps, comme si je flottais juste au-dessus de moi-même, spectatrice de chaque geste, chaque pensée, mais sans jamais vraiment les habiter. Comment j'existe? Comment suis-je parmi ces gens sans uniforme médicale blanc ou encore, sans Jeanne, sans Neyhla, sans David, sans Sin?

Mon corps est là, je le sens, je vois mes doigts se plier et se déplier à un rythme que mon esprit contrôle, mais il semble lointain, étranger. Mes mains bougent, mes yeux clignent, je respire, et pourtant, c'est comme si tout cela se passait sans moi, comme si quelqu'un d'autre pilotait cette enveloppe vide.

Je blâme les edibles. Et partiellement mes pensées toujours sobres. J'ai failli paniquer ce matin, malgré mes treize inspiration. Et pour un moment, pour un court moment, j'aurais voulu que tu sois là pour me mettre six pieds sous terre, comme tu avais l'habitude de faire dans ces moments-là. Mais tu n'es plus ici et prendre une pelle et creuser au beau milieu de la nuit pour m'enterrer vivante n'est pas une option qui m'est disponible. Alors, je me rabat sur les edibles. J'en ai piqué quelques-uns chez Axel il y a deux jours, je ne faisais que passer. Ne t'en fais pas, je ne suis pas comme lui, et puis c'est rare que je cède à la panique, enfin, tant que mes pilules sont prisent.

Et elles sont prisent. Quoi que, c'est un très mauvais mélange avec la substance que j'ai ingéré, il y a une quarantaine de minutes de cela. J'en ai pris juste un.

Je suis consciente de tout, mais cette conscience elle-même semble fausse, décalée. Comme si le monde autour de moi était flou, distant, et moi... une sorte d'ombre, invisible, qui se déplace sans vraiment toucher quoi que ce soit. Je vois les gens, j'entends leurs voix, mais rien ne semble vraiment m'atteindre. Je suis là sans être là. C'est cette étrange impression d'exister sans vraiment exister, d'être consciente d'un vide, d'un décalage. Comme si tout était juste une simulation et que je ne faisais qu'observer, sans être capable d'interagir de façon authentique. Un rêve éveillé, où l'on sait qu'on rêve, mais où l'on est piégé dans cet état sans pouvoir s'en échapper. Comment suis-je revenu à la réalité? Parce que je coûte trop cher. Et je suis guéri à présent. David me l'a dit. Nul besoin de se cacher comme Dracula lorsqu'un rayon de soleil fait son apparition.

Mais je suis restée enfermée dans cette boîte trop étroite néanmoins propre pendant cinq années, respirant l'air lourd et stagnant, oubliant presque ce que c'était que de se sentir libre. En liberté, je sens que je risque de déraper. Puis, soudainement, cette boîte s'ouvre, et je ressors, mais l'air autour de moi semble tout aussi lourd, tout aussi épais. Je respire, mais chaque bouffée me paraît étrangère. Rien n'a changé, et pourtant tout semble différent, comme une renaissance sans véritable renouveau.

L'asile me manque. L'asile me manque. L'asile me manque. C'est dingue, de tels mots ne devraient pas être dit. Je les garde pour moi.

Je suis toujours la même personne, avec les mêmes pensées, les mêmes souvenirs, mais il y a cette sensation que quelque chose de profond s'est déplacé en moi, sans que je puisse vraiment mettre le doigt dessus. C'est comme si j'avais été recréée, une version légèrement différente de moi-même, mais si proche de l'originale qu'il est impossible de vraiment le dire. Tout ce que je sais, c'est qu'il n'y a rien de positif. Ils disent tous que j'ai changé bien avant tout le bordel que tu as causé, moi je n'ai rien remarqué. Ce soit disant changement était fluide, si fluide, je ne m'en suis pas rendu compte jusqu'à ce que les reproches inondent leur gueule. Dans ma tête, le monde avait changé, il a changé.

Il est moche, et lorsque je réagis à sa laideur, je ne vaux pas mieux.

Je sens la sueur couler le long de mon dos, glissant lentement sous mon pull bleu marine. Ce n'est pas la chaleur, la clim tourne à plein régime. Pourtant, cette moiteur s'infiltre, invisible, mais bien là. C'est une sueur nerveuse. C'est dégoûtant.

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