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La petite fille pleurait, ce jour-là.
Elle pleurait alors que sa mère la traînait derrière elle d'une poigne ferme.
Elle pleurait parce que ce qui avait été sa maison s'éloignait derrière elle, tandis qu'elle avançait sur la route, sans savoir où sa mère les emmenait. (Elle n'était pas sûre que sa mère le sache elle-même.)
Elle pleurait parce qu'elle n'avait pas eu le temps d'emporter sa peluche préférée avec elle ; elle pleurait parce qu'elle avait faim, qu'elle avait froid, qu'elle avait mal aux jambes à force de marcher ; elle pleurait aussi, un peu (trop) parce qu'elles ne laissaient en fait plus rien derrière elles.
Parce que sa maison n'existait plus.
《- Si on part de la maison, maman, comment est-ce que papa saura où nous trouver ?
- Papa n'en saura jamais rien. Papa n'aura jamais besoin de savoir. Papa ne rentrera pas.》

* * *

Jour -2.

Une atmosphère étrange flottait dans l'air.

Même avec la meilleure volonté du monde, Chûya n'aurait su dire à quoi est-ce que c'était dû. À chaque fois qu'il essayait de se concentrer sur ce malaise persistant, celui-ci semblait se dissiper, comme les dernières brumes d'un rêve que l'on tente vainement de retrouver.

Cela faisait déjà plusieurs jours qu'il ressentait ça, mais il avait décidé de ne pas y prêter attention. Ce n'était sans doute rien.

La seule chose étonnante par rapport à ça, c'était qu'il avait le sentiment diffus de ne pas être le seul à avoir cette impression. Quelque chose de malaisant flottait dans l'air, et cela se ressentait absolument partout. On aurait dit que chaque meuble, mur, arbre, objet en était imprégné. Ça s'accrochait dans l'air et rendait sa respiration difficile. Et, quand il tentait d'avoir une interaction sociale, n'importe laquelle, avec n'importe qui, pour se changer les idées, il voyait bien que les personnes à qui il s'adressait agissaient anormalement.

Un froncement de sourcils, une expression absente. Une lueur au fond des yeux, de petits tics nerveux. De petites choses en apparence toute simple, mais qui faisaient grandir chez lui une sorte d'angoisse sourde.

《- Chû-ya !

Il retirait ce qu'il avait dit.

En fait, il y avait bien une personne qui semblait ne pas se sentir du tout concernée par tout ce qui se passait autour d'eux.

《- Regarde ce que j'ai trouvé dans la salle de bain !

Le brun s'avança devant la chaise longue sur laquelle le rouquin reposait naïvement, profitant d'une journée plus chaude que les autres pour se détendre un peu dans leur jardin, et il agita sous le nez de sa pauvre victime quelque chose qui ressemblait très fortement à un insecte.

Plus précisément à un cafard.

Un énorme cafard.

Le rouquin sursauta si fort qu'il faillit heurter la tête du brun. Totalement terrifié par ce qu'il considérait comme la personnification elle-même de la saleté, de l'immondice, il se mit à crier de manière absolument hilarante.

Le brun laissa retomber le jouet en plastique sur lui avec un immense sourire sur le visage, se délectant de la réaction de son compagnon de vie. Celui-ci, quand il finit par se rendre compte, après moult jurons, cris et gestes brusques, que la chose qu'il avait fait valser à plus de cinq mètres de lui était un peu trop immobile et rigide, se retourna vers Dazai, une expression indéchiffrable sur le visage.

Puis, soudain, des rougeurs recouvrirent intégralement son visage, tandis qu'il se redressait d'un geste brusque et commençait à hurler à pleins poumons sur son amant, bafouillant et trébuchant sur presque chaque mot, semblant hésiter entre se laisser envahir par la honte la plus pure et une colère des plus intenses.

𝐬𝐨𝐮𝐤𝐨𝐤𝐮 | seules les étoiles ont le droit de volerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant