Chapitre 15: à cœur ouvert

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Jessica

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"... J'attendais ta lettre avec impatience. C'est vrai qu'elle n'a pris que quelques jours à arriver, mais le temps me paraît long.

Tu veux vraiment savoir ce que je pense au fond de moi? Peu m'importe qui tu es. Ces renseignements que tu me donnes, qu'ils soient vrais ou faux, ça n'a pas vraiment d'importance pour moi. Je me fais une image de la personne que tu es à travers tes écrits. Et ce que j'apprécie, c'est que tu réussi à me faire aller mieux. Peu importe que tu es vingt-neuf ou quarante ans, peu importe que tu sois mignon, sportif, honnête dans tes paroles... Ce que tu me dis me suffit. La seule chose qui pourrait me faire du mal, c'est savoir que je m'attache à quelqu'un de malintentionné. Je te remercie de me rassurer sur le fait que tu n'ai pas commis de crime atroce. Ma conscience s'en porte mieux.

Tu ne me fais pas peur. Peut-être parce que cette correspondance a du mal à me paraître réelle? Je me surprends à penser que peut-être, tout ça n'est qu'un coup monté. Quelle est la probabilité de commencer cette expérience sur un coup de tête, de tomber sur une personne qui semble pouvoir entretenir une discussion et qui a l'air "idéale"? Je dois être complétement folle, comme tu le dis. Quelque chose m'a poussée à écrire, inconsciemment. Mais je ne pensais pas que ça allait m'entraîner rapidement vers une sorte de "dépendance"... C'est ridicule, je sais. Et pourtant, quand tu me dis que c'est devenu ton occupation favorite, ça me flatte.

Merci d'essayé de remonter mon estime de moi, Alec. C'est gentil de ta part. Je comprends que tu ne sois pas attiré par une relation amoureuse. Rien est idyllique. Chacun voit les choses à sa manière. J'ai été éduquée dans un schéma familial pleins d'amour. Pour ma part, j'idéalise les relations "parfaites". Mais j'ai appris à mes dépends que la réalité des choses est souvent bien loin des espérances qu'on peut en avoir... J'espère toujours qu'un jour, je tomberai sur cette relation saine, mais je ne me fais pas trop d'illusions. D'ailleurs...

J'aurai voulut recevoir ton message avant. J'aurai pu écouter tes conseils. William m'a invité à dîner il y a peu de temps. J'ai accepté car il avait une bonne excuse pour la dernière fois. Tout se passait bien, mais nous sommes arrivés sur le sujet du programme d'échange. Il n'a pas compris pour quelle raison je faisais ça. Il a tout de suite critiqué, sans même chercher à comprendre quelles étaient mes motivations. Pour lui, un prisonnier n'a pas à avoir ce genre de "chance" et mérite ce qu'il lui arrive. Je me suis sentie extrêmement... frustrée. J'ai pu voir que pour lui, j'étais simplement quelqu'un de "naïf". Il a essayé de s'excuser par la suite, il a même osé tenté de m'embrasser, comme s'il n'avait pas compris qu'il m'avait blessée. Je ne suis pas un objet, ni un pantin qu'on manipule comme bon le semble, bon sang! 

Je suis désolée, je te raconte des choses qui ne t'intéressent probablement pas. Mais ça me fait du bien d'en parler. J'ai ce poids qui s'accentue en moi, mes nuits sont agitées ces derniers temps. Cette satanée fatigue s'installe, je me sens épuisée. Il est vrai que le métier que je fais n'aide pas et du courage, il m'en faut. Je devrai penser à me ressourcer rapidement. Que fais-tu quand tu te sens débordé, toi?

Un ingénieur informatique? Je suis curieuse, à quoi correspondait ton poste, si ce n'est pas trop demandé? Je n'ai jamais rien compris à ça, pour ma part. Les chiffres, je me débrouilles avec mais ce n'est pas trop ma came. Je suis plutôt du genre littéraire. D'ailleurs, ça a été parfois problématique dans mes études, mais je me suis accrochée, je n'avais pas le choix. On peut dire que tu as trouvé ta voix dans ce cas vu que c'est une passion que tu as depuis longtemps, ça doit être embêtant de ne plus pouvoir la pratiquer.

Deux ans... Je ne peux pas imaginer ce que tu ressens actuellement. C'est impossible. Je ne peux que t'envoyer tout mon courage, et j'espère pouvoir rendre tes journées moins pénibles avec ces lettres. Tu rends les miennes meilleures, toi. J'espère sincèrement que le reste de ta peine va se dérouler rapidement et sans encombres, que tu vas pouvoir regagner ta liberté et faire ce qu'il te plaît. Quelle sera la première chose que tu voudrais faire lorsque tout ça sera fini..?

Alec, ça n'a peut-être pas lieu d'être et je ne veux pas passer pour une de ces filles cinglées, mais sache que si tu as besoin de moi, je suis là. Je ne te laisserai pas tomber. Je ne dis pas que tu as besoin de ma présence, je ne suis pas prétentieuse. Je veux simplement te montrer que je suis à ton écoute sans arrières pensées. Car j'estime que tu fais de même pour moi.

Merci de me faire rire, merci de me rassurer, merci de me conseiller. Je suis tout de même heureuse d'avoir débuté ce programme, même s'il a fallut que je tombe sur un homme avec un égo surdimensionné. Fais attention, je risque de me plaindre à messieurs les policiers qu'un méchant vilain cherche à me séduire en me parlant de son physique aguicheur...

J'espère avoir de tes nouvelles rapidement.

Jess."

Une fois terminé, je lis cette lettre encore et encore, comme pour me convaincre qu'il y a une erreur dedans. Je ne suis pas sûre de vouloir partager ces mots, même si j'ai cherché à esquiver certains sujets, ça reste assez personnel. Mais je ressens réellement le besoin de parler de choses que je ne peux pas partager à n'importe qui. Mon inconscient me dit que je peux le faire, car c'est une personne que je ne connais pas personnellement et qui n'a pas moyen de le faire. J'ai vraiment l'impression d'être à découvert, et ça m'effraie. Mais rien ne m'empêche de me lancer. Je souhaite vraiment être cette oreille attentive et neutre qui puisse l'écouter et le libérer de ses propres poids. Alors pour que ce soit le cas, je dois faire le premier pas, afin de lui montrer qu'il peut me faire confiance. J'ai cette envie de lui partager des choses, qu'il puisse être mon journal intime, sans craintes en retour. 

Je décide d'écouter ses conseils et d'envoyer un message à Monica, mon amie et collègue. Elle me répond qu'elle est disponible et qu'elle ne travaille que le lendemain. Alors je lui propose de se rejoindre en début de soirée à l'une de mes adresses préférées de la ville. Je dois me forcer à me sortir de ma routine.

Je décide de faire simple: un maquillage léger, une tenue de ville plutôt classique avec un pull blanc, jean noir et bottines. Il fait bon mais une légère brise refroidit la température. Je décide de prendre mon perfecto. Avant de sortir, je n'oublie pas de plier ma lettre et la parfume légèrement avant de la glisser dans l'enveloppe. Je la posterai sur le chemin. Je me sens de bonne humeur, plus légère. Je n'avais pas vu Monica en dehors du travail depuis un bon moment, ce qui, je dois l'avouer, est bien dommage. Cette sortie entre filles va me faire un bien fou, je le sens! 

They Say He Is Too BAD (En Cours)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant