Chapitre 7: La proposition

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Alec

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Depuis mon altercation avec ce Gomez, il y a deux jours, j'ai bien compris que la vie ici risque de ne pas être de tout repos. Je vois des gens me regarder avec un sourire aux lèvres, l'air de dire "T'es foutu". Après notre altercation, tout le monde est retourné à ses occupations, les gardiens sont restés dans les alentours, pour surveiller qu'un débordement ne survienne pas. Ils ont bien raison, parce que j'ai pas peur d'eux. Si j'aurai du lui mettre mon poing dans la face, je l'aurai fait. Je suis pas quelqu'un qui aime foutre la merde, mais si on me cherche, on me trouve. Je n'ai même pas assez de mes dix doigts pour compter le nombre de fois où je me suis fais casser la gueule, mais aussi où j'ai cassé des gueules. J'ai la bagarre dans le sang, au grand désespoir de ma famille. Mais bon, j'aime l'adrénaline, c'est le genre de chose qui me fait sentir vivant. Je peux être autant calme que agité. Je m'étonne parfois moi-même.

Dès que je le croise, lui ou les mecs qui lui servent de larbins, je peux limite me voir déjà mort, tellement leur regard est rempli de haine. Mais bon, qu'ils viennent, je les attends. J'imagine qu'ils vont saisir l'occasion, un jour où je ne m'y attendrai le moins, pour envoyer quelqu'un me planter. Ce mec là, c'est typiquement le genre de personne à avoir tellement de pouvoir qu'il peut soudoyer les gardes sans soucis. D'ailleurs, ça m'étonne qu'ils n'aient pas déjà tenté de m'éliminer. Enfin, je vais pas m'en plaindre.

Je suis en pleins travail avec Barry. Il a pas arrêté de me dire que j'avais agis comme un vrai bonhomme, mais comme un con. Il dit que j'aurai dû fermer ma bouche, même si ça ne m'a pas plu, parce qu'ici, il y a des gens à qui il vaut mieux pas chercher d'embrouilles. Mais je suis pas comme ça. J'ai pas peur de la mort, malheureusement.

Tout à coup, il y a des pas qui se rapprochent de nous, et c'est pas que une seule personne. Je m'attends à voir des gardiens, mais non. J'avais bien dit que mon heure allait arrivée. Barry se met à côté de moi, comme pour m'épauler. Le mexicain s'approche de moi, accompagné de ses deux dames. Il est automatiquement passé devant le poste des gardes pour venir ici, ce qui signifie que j'ai raison: il a un grand pouvoir au sein de cette prison. Les descentes au sous-sol sont normalement autorisées seulement aux détenus qui y travaillent. Mais à ce que je vois, il y a des exceptions.

Nous sommes debout les uns devant les autres, à nous défier du regard. Personne ne parle, ça commence à devenir pesant.

-"Si vous êtes venu me butter, allez-y. Mais je vais pas me laisser faire. Alors qu'on en finisse une bonne fois pour toute."

Barry me regarde avec de gros yeux, qui veulent dire un truc du genre "T'es malade ou quoi?!". Et oui, mon p'tit Barry, tu vas devoir t'y faire. Je m'attendais à me faire taper dessus, mais au lieu de ça, l'autre crapule se met à exploser de rire. Est-ce que je suis un clown? Il faut me prévenir si c'est le cas, parce que c'est la deuxième fois que je le fais rire à ce point. Je le regarde, interloqué, comme tous. Je crois qu'il est le seul à se comprendre. Même ses toutous se demandent ce qui lui passe par la tête. Bon, ok, je suis perdu.

-"Hahaha... Tu me plais bien, gringo."

-"Je crois bien que c'est pas réciproque, abuelo."

-"Hahaha, grand-père? Je suis pas aussi vieux que ça!" Il marque une pause de quelques secondes, en me regardant. "J'aime bien les gars comme toi. Qui n'ont pas froid aux yeux. T'as pas hésité à me défier devant tout le monde. Et ça, c'est le signe que tu portes tes couilles. C'est des gars comme toi qu'il me faut. Je te propose une place dans mon équipe. Et quand tu sortiras, tu travailleras pour moi. Alors, qu'est-ce que t'en penses, mi pequeño?"

Tout le monde est étonné. Je dois avouer que même-moi, je comprends pas.

-"Je suis pas ton petit. Et j'aime pas les magouilles."

-"Prends ton temps, mi amigo. Réfléchis bien, je te laisse du temps. Et, tu viendras me donner ta réponse quand t'auras pris ta décision. Je serai dans le coin, si t'as besoin. Hasta luego, niño."

Ils se retournent et partent. C'est quoi qu'il a pas compris quand je lui est dis que j'aime pas les magouilles? Je veux pas devenir un de ses jouets. Je suis pas quelqu'un qu'on contrôle comme bon lui semble. Il peut toujours rêver. J'ai beaucoup trop de fierté pour être aux pieds de quelqu'un. Mais je sais qu'un jour ou l'autre, ça me causera du tord.

-"Qu'est-ce qui c'est passé gamin? C'est quoi ce bordel, c'est ton pote maintenant?" Barry à l'air choqué.

-"Est-ce que j'ai l'air de savoir ce qui se passe? Non. J'ai aucune putain d'idée de pourquoi il a dit ça."

-"Hahaha, on peut dire que t'en as de la chance! Être sous son aile, peu de gens ont réussi!"

-"Ouais... Tu parles, d'une chance."

Puis chacun reprend sa tâche. La journée passe, et nous sommes en pleine après-midi. C'est donc quartier libre. J'ai pas envie de faire de sport aujourd'hui. J'ai passé une bonne partie de mon temps à resté assis au soleil, dans la cour. Je regardais le ciel, je profitais simplement du beau temps. Mais ça c'est couvert, alors j'ai décidé de rentrer dans les locaux. Je suis allé à la bibliothèque, pour emprunter un nouveau livre. Je parcours les rayons, à la recherche de ma future lecture, quand je tombe sur une pancarte, qui est d'ailleurs accrochée à plusieurs endroits dans la pièce.

"PROGRAMME DE CORRESPONDANCE OUVERT!

VENEZ CHERCHER VOTRE LETTRE POUR ÉCHANGER DANS LE CADRE DU PROGRAMME AVEC UNE PERSONNE DE L'EXTÉRIEURE.

LES ENVOIS ET LA RÉCUPÉRATION DES LETTRES SE FAIT A PARTIR DU COMPTOIR DE LA BIBLIOTHÈQUE."

Je me dirige vers le comptoir, avec ma nouvelle trouvaille.

-"C'est tout ce dont t'as besoin?"

Le mec derrière le comptoir me questionne.

-"Euh... Nan. Je voudrais participer au programme. Comment ça marche?"

-"Je te donne une lettre au hasard, que quelqu'un de l'extérieur à envoyé, avec de quoi écrire. Quand t'as finis, tu me donnes ta lettre et les gardiens les transmettent à un service extérieur qui va vérifier les lettres et les mettre sous pli pour les envoyer. Tu échangeras que avec cette personne, sauf si elle se désiste. Tu pourras recevoir une nouvelle lettre dans ce cas."

Il me tend une lettre, dans une enveloppe blanche, qui est déjà ouverte par le haut, avec des feuilles. Ils vérifient vraiment tout, ici. Je la prends. Quelque chose m'intrigue.

-"C'est quoi ce numéro sur l'enveloppe?"

-"C'est un numéro qui est attribué à la personne qui a envoyé cette lettre. Il permet de retrouver le correspondant sans divulguer ses informations personnelles."

Je lui fais un signe de tête, puis je m'en vais vers ma cellule. Numéro 1438... Qui es-tu?

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PS (pour le lexique):

-GRINGO: expression qui signifie "l'étranger", dans un sens péjoratif

-ABUELO: grand-père

-MI PEQUEÑO: mon petit

-MI AMIGO: mon ami

-HASTA LUEGO: à plus tard

-NIÑO: gamin


They Say He Is Too BAD (En Cours)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant