Eilean a' phòg

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C’est le craquement soudain d’un morceau de bois dans la cheminée qui me réveille. Les yeux encore clos, je hume les odeurs inhabituelles qui m’entourent pour m’en imprégner et commence à gigoter, quand je prends conscience d’une présence à mes côtés. Bucky. J’ouvre enfin les yeux pour me refaire le film de la soirée d’hier… Au quatrième cauchemar, mon ami a fini par venir se planter devant moi au milieu de la nuit : 

– Je peux ? A-t-il demandé, l’air pathétique.

Je me suis contenté d’écarter la couverture et de lui sourire. Après ça, il n’a refait que deux mauvais rêves ; à chaque fois, j’ai murmuré" Нежно"(1) et il a fini par se rendormir, blotti contre moi. Je m’interroge un instant sur ses contradictions ; lui qui est effrayé par tout contact physique, semble pourtant être affamé de tendresse ! Je ressens alors une gratitude infinie en pensant qu’il n’y a qu’auprès de moi qu’il s’autorise à le montrer.

C’est empli d’une bouffée d’espoir que je remue doucement avec l’intention de me lever, mais une fois encore, Bucky paraît détecter le moindre de mes mouvements : 

– Tu vas où ? Demande-t-il brusquement, une once de peur dans sa voix.

Je me rallonge immédiatement et lui souris : 

– Je pensais me lever pour préparer du café pour tout te dire. Répondè-je, gaiement.

Devant la grimace qui ternit un instant son visage, j’en déduis que lui, n’est pas prêt à se lever, alors j’en profite et me remet sous la couverture. Un confortable silence s’installe, interrompu uniquement par les crépitements en provenance de l’âtre. Mes yeux se perdent dans la contemplation du feu et je remarque une inscription sur le linteau que je n’avais pas vu hier : 

An teine ​​an dìoghras, je me demande ce que ça veut dire… 

– Le feu de la passion ! Répond spontanément mon ami.

Je me tourne brusquement vers lui : 

– Ben… tu comprends le gaélique, toi ? M’étonnè-je.

– Mmmm… pendant la guerre, les langues locales étaient encore beaucoup parlées ! Hydra m’en a appris quelques-unes, dont le gaélique écossais, oui…

Oui. Hydra. Bien sûr… Je médite là-dessus pendant encore de nombreuses minutes, avant d’être ramené à la réalité par un gargouillis bruyant en provenance de mon estomac. Bucky me sourit : 

– Petit dèj’ ?

– Ouais ! Répondè-je, en me levant péniblement ; les heures d’avion et la nuit au sol m’ont endoloris les muscles.

J’ouvre les volets et constate que nous sommes entourés d’eau, ce qui explique l’odeur d’humidité… Je ne m’attarde pas plus à observer l’extérieur et chacun notre tour, nous occupons la salle de bains le temps de nous habiller. Nous traversons ensuite l’étage plongé dans le noir et descendons l’étroit escalier, guidés par une délicieuse odeur de plat mijoté provenant du bas ! Une fois dans le petit hall d’entrée, les bruits résonnants dans la pièce principale ne font aucun doute sur la présence de Lachlan. Bucky hésite avant de me laisser passer devant lui. Une vigoureuse flambée diffuse une chaleur soutenue dans la pièce ; je me dirige au fond à droite, pendant que mon ami s’assoit en bout de table, près du feu. 

Je découvre une toute petite cuisine aux murs en pierres brutes ; les solives du plafond forment un mélange de bois anciens et de rondins plus modernes, signe des rénovations réalisées au fil du temps. De petits meubles et des étagères en bois brut encadrent un évier simple sur le mur de gauche. En face de moi, une trouée dans le mur en pierres abrite une vieille cuisinière à bois semblable à celle que possédait ma mère… Lachlan s’affaire à l’alimenter en bois, sans doute pour poursuivre la cuisson du mets qui mijote dans une énorme gamelle en fonte, d’où se dégage la délicieuse odeur qui nous a attirée. 

Les Vestiges d'Hydra Où les histoires vivent. Découvrez maintenant