Âmes manipulées

Numéro - 15

- Tu pousses ou tu fais semblant là ? T'occupes la machine pour rien là !

Katerina cligna longuement des yeux en réalisant que son esprit avait tellement dérivé qu'elle ne faisait presque plus rien sur la machine de musculation qu'elle occupait.

Elle soupira et laissa la place à Raphaël qui s'installa après avoir ajusté les poids.

Les deux avaient fini par prendre l'habitude de se retrouver à la salle à chaque fois qu'elle se décidait à y aller. Ou peut-être qu'en réalité il y passait tellement de temps qu'il était toujours là quand elle y allait.

Elle alla sur la machine juste à côté du jeune homme pour lui laisser la place et commença une série.

- T'as encore l'air ailleurs tu sais, dit-il après un moment. Tout roule Kat ?

Elle hocha la tête en guise de réponse.

- Mal dormi ?

Ses joues rosirent légèrement. La soirée de la veille avait tourné en boucle dans sa tête. Ses mots, son touché, sa voix, son regard, son sourire, toutes ces choses avait passé la nuit à la hanter, la privant de sommeil.

- Oh, au vu de ta tête, j'en déduis que ta soirée était bonne.

Malgré l'effort que lui demandait sa séance, il explosa de rire. Elle se figea et le regarda attentivement, il est au courant ? se demandait-elle.

- Si tu te demandes, oui, je sais avec qui tu étais hier soir.

Elle cessa sa séance et fronça les sourcils. Bien qu'elle adoptât une attitude agacée et froide, intérieurement, elle était morte de gêne. Que savait-il au juste ?

La bouche sèche, elle passa sa langue sur ses lèvres et tenta de demander de la manière la plus détachée possible.

- Il t'a dit quoi au juste ?

Il stoppa sa séance, bu un peu d'eau et resta tranquillement là, le temps de récupération.

Il haussa les épaules en riant mais abordait une moue boudeuse qui lui fit penser à la moue qu'avait parfois sa jumelle.

- Rien, c'est ça le problème. Je sais que vous êtes sorti tous les deux parce que quand on s'est vu hier je lui ai parlé de l'expo. Il est raide dingue de Klimt alors je savais que ça allait l'intéresser mais bon, tu parles, il était déjà au courant. Normalement, il m'en aurait parlé pendant des heures mais là, rien. (Il agita les mains comme un enfant) Je savais qu'il me cachait un truc. On me l'a fait pas à moi ! Alors j'ai creusé (il lui adressa un énorme sourire) c'est là qu'il m'a dit qu'il allait t'y amener parce que tu aimais Laudé ou je ne sais plus quoi.

- Claudel, corrigea-t-elle agacée.

- Ouais c'est ça Claudel.

Il reprit une nouvelle session sur la machine.