Partie 1, chapitre 1:Chaque histoire à un commencement.

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Le mois de mai s'étendait sur l'École du Mal, baignant les couloirs et les tours de la forteresse sombre d'une lueur chaude et trompeuse. Lady Lesso ressentait le changement dans l'air : l'agitation des élèves avant les vacances, l'excitation des combats à venir. Elle savait que la fin de l'année marquait non seulement le début des épreuves finales pour ses étudiants, mais aussi une période d'évaluation pour elle-même. L'école du Bien avait triomphé trop de fois à son goût ces dernières années, et la frustration montait à chaque échec.

Aujourd'hui, elle ne commençait pas avant 10 heures. Elle pourrait prendre un moment pour sortir et réfléchir, pour sentir l'air frais avant que l'orage ne se déchaîne.

« Je commence à 10h, j'ai encore le temps de sortir prendre l'air... » pensa-t-elle.

Tandis qu'elle franchissait les portes du bâtiment, une silhouette familière s'approcha : Marcus, un élève prétentieux de quatrième année, connu pour son arrogance plus que pour ses compétences.

Elle le fixa du coin de l'œil, irritée avant même qu'il ne parle.
« Qu'est-ce que tu veux, Marcus ? » demanda-t-elle, la voix cinglante.

Marcus hésita un instant, mais ne recula pas.
« Sans vouloir être indiscret, pourquoi vous enseignez encore, madame ? Chaque année, l'école du Mal perd. Pourquoi vous battez-vous pour une cause perdue ? »

Le venin dans ses mots fit tressaillir Lesso, mais elle n'allait pas lui montrer qu'il avait touché une corde sensible. Elle inspira profondément, puis, avec un calme glacial, répliqua :
« J'enseigne parce que je sais que cette année, nous allons gagner. Alors maintenant, laisse-moi. »

Elle lui tourna le dos, sa canne effleurant légèrement le sol, un avertissement silencieux. Mais Marcus, dans un accès de folie ou de provocation pure, tenta de la pousser, espérant peut-être la voir trébucher. Il n'eut pas le temps de comprendre son erreur. En un éclair, Lady Lesso attrapa son bras et, dans un mouvement rapide et précis, le fit tomber au sol. Il se retrouva sur le dos, abasourdi.

Avant que la situation n'empire, une autre voix retentit dans le couloir :
« Lesso ! Mais enfin, qu'est-ce qu'il t'a pris de t'en prendre physiquement à un élève ?! »

Professeur Dovey accourait, le visage contracté par la réprobation.
Lady Lesso lâcha immédiatement le bras de Marcus, qui gémissait faiblement, tenant son poignet. Elle sentait le regard de Dovey peser sur elle, mélange d'incrédulité et de déception.

« Je suis sincèrement désolée, » dit-elle, essayant de rester calme. « Je n'aurais pas dû. J'ai réagi sous le coup de la colère. Laisse-moi l'emmener à l'infirmerie. »

Mais Dovey secoua la tête, les lèvres serrées.
« Non, ça suffit. Je vais le faire moi-même. Tu as des cours à enseigner ce matin, je te rappelle. On en reparlera avec le maître d'école. »

Lesso se mordit l'intérieur de la joue pour ne pas répondre. Elle tourna les talons et partit en direction de sa salle de classe, la frustration brûlant dans sa poitrine.

La salle était déjà pleine à craquer lorsque Lady Lesso entra. Les élèves se redressèrent à son arrivée, et l'atmosphère se figea, lourde de respect, voire de crainte.

« Bonjour, chers élèves, » lança-t-elle, son ton tranchant comme une lame. « Aujourd'hui, nous allons évaluer vos compétences, puisque nous approchons de la fin de l'année. Nous allons commencer avec Hort. »

Hort, un élève malicieux mais prometteur, se leva avec assurance.
« Maintenant, je peux me transformer entièrement en loup-garou. »

Lady Lesso haussa un sourcil, légèrement intriguée.
« Très bien, montre-nous ça. »

Hort ferma les yeux, et peu à peu, son corps commença à se métamorphoser. Ses muscles se contractèrent, ses os craquèrent, et en quelques secondes, il se tenait là, un loup-garou complet, imposant et menaçant.

Lady Lesso hocha la tête, satisfaite.
« Pas mal. L'an prochain, nous commencerons les duels pour vous entraîner aux véritables combats. »

Les élèves murmurèrent d'excitation. Le cours se déroula ainsi jusqu'à la sonnerie de midi. Alors que tout le monde se précipitait vers la porte, Professeur Dovey entra, la mine grave.

« Le maître d'école veut te voir après le déjeuner. Il a quelque chose à te dire à propos de ce matin. »

Le sang de Lesso se glaça.
« Tu lui as dit ?! » cracha-t-elle, incrédule.

Dovey croisa les bras, visiblement irritée.
« Je n'avais pas le choix, Lesso. Tu as déjà eu trop de problèmes par le passé. J'ai couvert tes erreurs autant que j'ai pu, mais là, c'est trop. Tu as cassé le bras de Marcus. Tu te rends compte de la gravité de la situation ? Si ses parents l'apprennent, nous risquons gros. C'est une famille riche, ils financent une grande partie du matériel de l'école. Je ne pouvais pas faire autrement. »

Lady Lesso ouvrit la bouche pour protester, mais Dovey leva la main.
« Je vais manger. Tu veux m'accompagner ? »

« Non, je n'ai pas faim. »

Dovey haussa les épaules, puis quitta la salle.

Une heure plus tard, Lady Lesso se dirigea vers le bureau du maître d'école. La tension dans ses épaules ne cessait d'augmenter. Lorsqu'elle entra, le maître d'école l'attendait, assis derrière son imposant bureau.

« Ah, Lesso, installe-toi, je t'en prie. »

Elle obéit à contrecœur.

« Suite à l'incident de ce matin, nous devons prendre des mesures, » commença-t-il. « Si tu veux conserver ton poste, tu devras passer deux mois l'an prochain dans une école non-magique pour enseigner des bases de magie aux élèves. »

Lesso éclata de rire, incrédule.
« Vous plaisantez, n'est-ce pas ? Une école banale ? Pourquoi pas des heures supplémentaires ici, ou un autre travail ? »

Le maître d'école resta impassible.
« C'est ça ou tu perds ton poste. Tu as dépassé les bornes. »

Lady Lesso sentit la colère bouillonner en elle. Mais elle savait qu'elle n'avait pas le choix.

« Très bien, » dit-elle sèchement. « Ça marche. »

Elle quitta le bureau, furieuse, ses pensées tourbillonnant. Manquait plus que ça. Enseigner la magie à des élèves ordinaires...

Entre deux mondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant