Chapitre 13

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Être appelé dans le bureau d'Alfred Berkshire n'était jamais une partie de plaisir ; et encore moins pour Osferth. Oh, il avait tout de suite su dans quoi il s'embarquait en acceptant de travailler sous les ordres d'Uhtred. De fait, il était celui qui avait demandé à Uhtred de l'embaucher. Cela dit, recevoir ses ordres directement de cet homme saugrenu n'éclipsait pas le fait que, quelques fois, il était obligé de se rendre dans le bureau de l'homme qui l'avait engendré pour lui rendre des comptes.

Alfred avait une relation extrêmement compliquée avec Uhtred – avec tout son entourage, du peu qu'Osferth pouvait en juger. De ce qu'il en savait, Uhtred avait sauvé Alfred de la mort plusieurs fois, mais lui était aussi lié de telle façon qu'il n'avait aucun terrain légal pour démissionner et refaire sa vie ailleurs. Osferth était parfaitement conscient qu'Uhtred ne l'avait embauché que comme un gros majeur à son employeur, qui aurait largement préféré que ce fils illégitime reste bien sagement caché dans son école catholique et devienne un religieux en silence.

La plupart du temps, leurs conversations étaient strictement professionnelles. Alfred ne semblait pas s'intéresser à sa vie – mais connaissant le bonhomme, il ne s'empêchait pas de fouiller dans son intimité lorsqu'il en avait envie. Du fait de sa position, Osferth était au courant que l'homme en face de lui avait accumulé une grande quantité de données personnelles sur beaucoup d'habitants, et ce de façon pas toujours légale. Il ne pouvait pas vraiment juger, au vu de ce qu'il faisait pour gagner son salaire.

Osferth boîtait encore un peu, il avait mal au flanc et toujours un bras dans le plâtre, mais de manière générale il se sentait en forme. Il serait privé de travail sur le terrain pendant encore un mois, voire deux si Uhtred avait son mot à dire. Il n'était pas tout à fait sûr qu'Alfred l'aie fait venir dans son bureau pour cette raison. En réalité, la seule chose à laquelle il pouvait penser, c'était cette tentative de piratage de leurs données il y a trois jours.

"Assieds-toi."

Le jeune homme obéit sans un mot. Osferth avait très peu de souvenirs de sa mère, mais il était sûr qu'il avait obtenu tout son patrimoine génétique d'elle. Il ne ressemblait en rien à l'homme en face de lui. D'ailleurs, Alfred avait le visage blanc et cireux aujourd'hui, il devrait bientôt rendre visite à l'hôpital pour faire un bilan et vérifier que ses prescriptions soient toujours adaptées.

"J'ai cru comprendre que vous avez terminé d'analyser les données en rapport avec la récente attaque.

-Oui, m'sieur."

Pourquoi Alfred le demandait-il à lui, plutôt qu'à Uhtred ? Certes, Osferth avait toujours été le plus organisé de leur groupe et s'occupait donc de la tâche de monter les dossiers et de les mettre en forme, mais Uhtred restait son supérieur et celui par qui transitaient toutes les informations.

"Dans les faits rien n'a été volé, m'sieur. Nos systèmes de sécurité sont assez performants pour avoir arrêté le hacking avant qu'il n'aboutisse. Euh, on a essayé de retracer la source, mais on n'a pas pu aller jusqu'au bout parce que – ben – les data sont pas arrivées jusque là.

-Bien, bien. Et la direction générale de ces informations ?

-On pense à de l'espionnage industriel, m'sieur.

-Avez-vous une idée du commanditaire ?

-Pas encore, m'sieur."

Le problème avec Alfred Berkshire était qu'il était trop intelligent. Beaucoup trop. Parfois, Osferth se demandait pourquoi son équipe était chargée d'enquêter, car l'homme en face de lui pourrait sans doute arriver aux même conclusions en moitié moins de temps. Osferth avait la sale et très nette impression qu'Alfred était en train de lui poser des questions dont il connaissait la réponse. Comment faisait Uhtred pour parler avec lui ?

Et demain l'automne (Fanfiction The Last Kingdom)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant