L'appel qui valait une vie.

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Je lâche la main d'Emma en voyant les journalistes arriver. Évidemment qu'ils sont présents aussi... En tant normal je serais déjà en train de paniquer, de trembler, de chercher un moyen de m'enfuir, mais cette fois je me contente de les regarder d'un air morne. S'ils voulaient avoir une conversation avec moi, ou ne serait-ce qu'une réponse, ils sont mal tombés, car je ne suis plus présente. Je le sais, c'est la petite qui me l'a dit ce matin. « Marraine, c'est bizarre t'as l'air de plus être là... ». Je crois que ce genre de phrase est censée faire mal.

Les agents de sécurité font leur boulot et me créent une voie au travers du groupe de sangsues. C'est la dernière chose que faisait JYP pour moi, me faire raccompagner à l'aéroport; on en a convenu ce matin lorsque j'ai rompu mon contrat. Il n'avait pas l'air heureux, c'est sûr que ça a dû le contrarier de s'associer à un problème comme moi. Je m'en fout.

Je montre mon passeport à la dame de l'embarquement sous le regard lubrique de son collègue. Lorsque je passe la porte qui me conduis à l'avion je crois qu'on m'insulte de salope, qui des 2 je ne sais pas. C'est peut-être bien que Emma ne parle pas coréen.

Une fois dans l'avion je m'assois à ma place, près du hublot, tant mieux. Emma à côté de moi.
L'avion met du temps à décoller.
Inutile d'essayer de dormir, je ne suis pas bête, je n'y arriverais pas et je le sais.

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Je fixe toujours le hublot, enfin à la base c'était plutôt les nuages de l'autre côté mais je crois que je me suis perdue, alors je fixe le hublot. Enfin il me semble.

Emma tire sur ma manche.

Emma- Regarde tu est dedans.

Je lui jette un regard vide et remarque le magazine qu'elle tient dans les mains. Pub pour Amy Eujeny, une marque de montres coréennes, je m'en souviens. Ils n'ont pas dû changer de magazines depuis longtemps.
J'encre à nouveau mon regard sur le hublot.

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J'insère la clé dans la serrure et ouvre la porte de mon appartement, que j'ai dû enlever de la location aussitôt mise en ligne.
J'ai du mal à croire qu'il y a trois mois, j'étais encore ici. Mais avec Félix.

Le chauffeur du taxi a été sympa et nous a aidées avec nos valises, qui traînent maintenant près de l'entrée.
Je ne m'attarde pas plus longtemps dans le salon et vais dans ma chambre. Emma est en terrain connu maintenant, elle saura se débrouiller.

Le soir même je suis toujours dans mon lit, je ne sors pas. Je me contente de lui commander à manger, elle n'aura qu'à aller chercher à la porte lorsque le livreur sonnera.

Le lendemain matin elle toque à ma porte, je suis donc obligée de me lever et m'empresser de fermer celle-ci à clé. Je ne veux pas qu'elle me voit comme ça, je ne suis plus sa marraine maintenant, c'est fini. Je ne suis plus personne de toute façon.

Emma- Tu veux que je te fasses un petit déjeuner ?
- Fais ce que tu veux. Il y a tes céréales préférées dans le placard. Dis moi si tu veux que je t'achète quelque chose d'autre.
Emma- Et toi ?

Je n'ai pas la force de lui répondre plus longtemps. Je m'allonge sur le tapis, toujours devant la porte, et attend. Quoi je ne sais pas, mais j'attend. Elle finis par partir en soupirant. Je crois que je l'ai énervée, elle va sûrement me bouder.
Je bois un restant de bouteille d'eau qui traîne dans une bouteille, ça doit être l'instinct de survie.

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On dis qu'il y a 5 étapes dans le deuil, pourtant je semble avoir sauter la colère et le marchandage.
La 3ème étape n'est pas nouvelle pour moi. La connaissez vous ?
C'est la dépression.
Je suis dépressive.

Laissez-moi vivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant