L'académie des coeurs - Tome 2.

Chapitre 9 : Les dons de Nora.

« La mort est un passage, un pont vers l'inconnu. » — Sénèque.

Il était difficile de penser à autre chose qu'à ma jambe qui mourait à petit feu. Je ne savais pas quoi faire, il m'était impossible de bouger. C'était comme si, en plus d'aspirer mon âme et la vie de mon corps, elle aspirait également mes pouvoirs et je n'arrivais pas à m'en servir. J'avais beau remuer de toutes mes dernières forces, je me sentais toujours partir. Nora, quant à elle, était comme perdue entre deux mondes.

- Lâche-la tout de suite ! hurla la voix paniquée de H.

Il s'avança vers Nora d'un pas déterminé. Malgré la panique présente dans sa voix, je pouvais voir qu'il était motivé à faire reculer la banshee le plus loin possible de moi.

- Je n'y arrive pas, et cesse de me hurler dessus, répondit la jeune femme désespérée.

Alors que tous les autres semblaient paniquer à leur tour, la pièce devint bien plus sombre d'un seul coup. H se mettait en colère, et ça ne présageait rien de bon. Les murs tremblaient, la lumière qui était difficilement présente auparavant avait presque disparu. Il serrait les poings avec force, et je voyais bien qu'il la fixait pour se concentrer sur ce qu'il allait lui faire subir. Même si j'appréciais de voir qu'il tenait toujours à moi, je ne pouvais pas le laisser faire ça.

- H, je t'en prie, regarde-moi, dis-je difficilement, tombant sur le sol de fatigue.

Il ne me regardait pas. Pas un mouvement.

- Tu devrais le faire, elle le mérite, rajouta à son tour Connor, debout derrière lui.

Je n'en croyais pas mes oreilles. Lola le bouscula légèrement, comme pour le ramener à la raison.

- H... ne fais pas ça, je t'en prie... répliquai-je de nouveau.

Il me lança un furtif regard avant de se décontracter légèrement et la lumière revint peu à peu. Il ne lâcha cependant pas l'affaire et s'approcha de la femme qui me tenait toujours la jambe avant de la soulever avec rage du sol. J'étais perdue entre l'envie d'intervenir et l'envie de la laisser se faire remettre les idées en place par H.

- On n'est pas des meurtriers, H, lâche-la, déclara Lola timidement.

Elle avait raison. Il y avait d'autres moyens. Il me lança un regard comme pour me demander si j'étais d'accord, je lui fis un léger signe de tête et il relâcha Nora qui s'écroula au sol en pleurs. Elle me faisait de la peine. Je n'arrivais pas à comprendre pourquoi, mais je savais que je devais faire quelque chose pour elle.

- Les banshees n'ont pas ce genre de pouvoir normalement, qui es-tu ? demanda Charlie.

Les larmes dévalant le long de ses joues roses, elle nous regarda difficilement.

- Je ne vous ai jamais dit que j'étais une banshee. Je suis une fille des collines, rétorqua la brune toujours au sol.

- C'est du pareil au même, ne joue pas sur les mots, répondit à son tour Connor.

- Non. Les banshees ont disparu il y a des siècles, leurs pouvoirs n'étant plus capables d'évoluer. Dame nature a décidé de créer une nouvelle espèce pour les morts. Une sorte de passage entre le monde des vivants et le monde des morts. Une porte. Moi, expliqua-t-elle, étrangement calme.

Je n'y comprenais rien. Finalement, ce n'était pas une banshee ? Qu'est-ce que c'était ? Une porte ? Ça n'avait aucun sens.

- Qu'est-ce que tu racontes, putain ? s'exclama H, perdu.

- Je vous dis la vérité. Je suis une porte. Les morts doivent passer à travers moi pour rejoindre l'au-delà, mais pas seulement, je suis également dotée des dons connus des banshees. Je peux prédire les morts, les sentir, mes hurlements peuvent tuer et vous me sentez près de vous lorsque c'est votre heure. Je suis tout ce qu'on peut imaginer autour de la mort, pourtant je suis bien vivante et je sens toutes les peines. J'ai... j'ai du mal à faire la différence entre leur monde et le nôtre. J'entends leurs voix sans arrêt, comme si désormais, ils faisaient tous partie de moi. Je suis aussi considérée comme protectrice des morts, finit-elle simplement.