DAMAGED BUTTERFLY (disponible sur Amazon)

Chapitre 5

Adeline

Lorsque mon père m'a annoncé que le repas de ce soir se ferait en famille, par texto qui plus est, j'ai grimacé. De quelle famille parle-t-il, au juste ? Nous n'en sommes plus une depuis longtemps ! Sans blague, je n'ai aucune envie d'assister à cette mascarade. Il est définitivement trop tard pour espérer de moi que je fasse de grands sourires compatissants, face à ses efforts qui ne dureront probablement pas plus que le temps d'un été. C'est réel. Dès lors que je rentrerai chez moi, je suis absolument certaine qu'il ne me calculera plus. Le trajet menant à ce nouveau restau luxueux n'est pas très long. Et si j'ai trouvé celui de ce midi particulièrement guindé, ce n'est rien à côté de celui-ci. Je n'ai jamais rien vu de tel au cours de ma vie. Pendant quelques secondes, je me sens même mal à l'aise. Une fois encore, ma tenue dénote. Un pauvre jean troué, et un simple sweat à capuche noir. Malgré tout, je suis mon père à la trace. Il me mène jusqu'à notre table, et c'est précisément là que je rencontre les yeux sombres d'Adam. Qu'est-ce qu'il fout là, au juste ? Jane est également présente, assise à ses côtés. Je grimace, ça n'a aucun sens. Cela dit, je souris à cette dernière, qui mérite grandement ma considération. Malgré nos premiers échanges un peu conflictuels, par ma faute, je l'admets, j'ai vraiment envie de la connaître.

— Bonsoir, Jane ! lancé-je sympathiquement.

Son visage s'illumine avec éclat.

— Oh, bonsoir, Adeline !

Nos assiettes arrivent en moins de deux. J'ai choisi des frites maison, ce qui semble attirer l'homme détestable installé en face de moi. Sans aucune culpabilité, il tend une main, puis se sert, l'air détaché. Je fronce les sourcils, un poil horrifié.

— Wow ! m'écrié-je. Je peux savoir ce que tu fous ?!

Par réflexe, je frappe le dessus de sa main, marquée de veines saillantes. Alors qu'il se rassoit en riant, cet abruti dévore ma frite.

— Je pourrais t'attaquer pour coups et blessures, tu sais, déclare-t-il avec un bref clin d'œil.

— Méfie-toi, renchéris-je, dédaigneuse. Car, sinon, je vais te donner une bonne raison de le faire. Et puis je te rappelle que mon père est le meilleur avocat pénaliste de l'État, tu te souviens ?

J'entends ce dernier pouffer de rire.

— Eh ben... je vois que le courant passe super bien entre vous !

Adam sourit faussement :

— N'est-ce pas ? Ta fille est un véritable rayon de soleil !

Le toisant sans retenue, je me fais violence pour ne pas dresser de nouveau mon doigt sous son nez. Jane et papa se lancent quelques œillades complices, notre si belle entente semble les amuser. Je trouve ça bizarre. Non seulement il invite sa secrétaire à dîner, mais en plus, on dirait bien qu'il se la tape. La question fatidique me brûle les lèvres, j'essaie de me retenir. Ça ne serait pas très poli. Mon père toussote dans sa serviette en soie, interrompant alors mes pensées.

— Adeline, ma chérie, hm... bafouille-t-il.

Je penche la tête, me demandant pourquoi il s'adresse tout à coup rien qu'à moi.

— Je tenais à te parler de quelque chose, il... il est préférable de le faire au plus vite.

D'autant plus perplexe, je sens mon cœur s'accélérer. Qu'est-ce qu'il va bien pouvoir me pondre là ? Je jette un œil vers Adam, qui semble amusé. Jane, elle, est toute rouge. Les questions fusent davantage, je me demande sérieusement ce qu'ils cachent tous.

— Voilà, il faut que tu saches que Jane et moi, on...

Bordel, j'aurais dû parier.

— Couche ensemble ? terminé-je en riant.