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chapitre 11 : Pedro, maintenant

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Les mains dans les poches de mon jogging, je m'amusais à envoyer la balle contre le mur avec mon pied, fixant la pelouse d'un air absent. Dur à expliquer mais j'étais sûr qu'une aura se dégageait de ma maison - plus précisément de la chambre d'Enola - et m'empêchait d'être totalement moi-même en ce moment.

C'était bizarre, comme si mon corps fonctionnait à moitié quand elle était dans les parages, ça ne m'avait jamais fait ça plus jeune, et encore moins après qu'on ait couché ensemble pour la première fois.

Je pouvais être honnête ? Je me dégoûtais.

Ce matin, je m'étais réveillé en sursaut d'un rêve aux allures plus lubriques que saines. Je m'étais revu quelques années auparavant, surplombant le corps d'Enola pour l'embrasser avidement, ses mains se baladant de partout sur mon torse. En état profond de sommeil, j'avais revécu la sensation de mes muscles nus et chauds contre les siens, entendant approximativement les plaintes orales de ma voisine.

Encore plus étrange, je m'étais rappelé exactement de tous ses dires, j'avais les phrases exactes en tête et c'était vachement perturbant. J'aurais pas pu rêver d'une autre nana qu'elle.

- C'est quoi ça ?

Un énorme fracas venant de l'étage de ma maison, me tira instantanément de mes songes alors que je relevais brutalement la tête vers où j'avais entendu le bruit. La chambre d'Enola.

Sans perdre de temps, je lâchais mon ballon et partais en courant jusque chez moi, entrant avec mes chaussures sans me poser de questions. J'avais de la chance que ma mère ne soit pas là, sinon elle m'aurait attrapé au passage pour me tirer une oreille et me forcer à me déchausser.

Mais vu qu'il n'y avait personne dans la maison cet après-midi, mis à part Enola et moi, je pouvais me permettre de déroger exceptionnellement aux règles instaurées par ma mère.

- Ça va ?!

Essoufflé comme si je venais de finir un match, je posais ma main sur la tranche de la porte de la chambre, m'accoudant à l'encadrement pour reprendre ma respiration. Mes yeux analysaient très vite la pièce, jusqu'à se poser sur la silhouette d'Enola qui était près de la fenêtre, un carton renversé à ses pieds avec des tonnes de cahiers éparpillés au sol.

- Tu t'es fait mal ? reprenais-je d'une voix plus calme, comprenant que ça ne servait à rien de jouer au sauveteur vu qu'elle semblait ne rien avoir.

- Non. crachait la brune alors que je prenais une grande respiration pour rester calme.

C'était de ma faute aussi, quelle idée d'accourir dans sa chambre comme ça, elle allait croire que je me souciais un instant de son état. Et elle n'aurait pas tort.

Alors que j'allais faire demi-tour en grognant dans ma barbe de trois jours, un détail attira mon œil et je me retrouvais à rester planté sur le seuil de la pièce, ayant trouvé un motif pour ne pas bouger. Enola se tenait le poignet droit avec l'autre main, qu'elle massait soigneusement comme s'il était douloureux.

- Tu t'es fait mal au poignet. affirmais-je, ne cherchant pas à demander puisque je le savais déjà.

- C'est bon, c'est rien. J'ai voulu attraper le carton sur l'étagère et il m'est tombé dessus, c'est tout. Tu peux redescendre jouer dans le jardin.

J'esquissais un sourire sur son mot employé. "Jouer", c'était ainsi qu'elle avait toujours qualifié mon activité professionnel. "Jouer avec un ballon toute la journée et gagner des millions d'euros, c'est ça la vie facile", m'avait-elle même avoué un soir où on avait passé la nuit dehors, pour ses seize ans.

𝘫𝘦 𝘱𝘳𝘦́𝘧𝘦́𝘳𝘢𝘪𝘴 𝘢𝘷𝘦𝘤 𝘵𝘰𝘪 - T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant