La poudre d'escampette | Tome 2

La grenouille charismatique

Dongyoung en était à son cinquième appel, il tentait vainement de joindre Yoonoh afin de lui annoncer la nouvelle. En effet, après un semestre entier de recherches intensives pour trouver un emploi, il avait enfin été accepté. Le grand centre commercial de Starfield situé dans le quartier huppé de Gangnam l'avait finalement recruté pour un post de vendeur. Le noiraud n'en avait pas cru ses oreilles lorsqu'il avait entendu la nouvelle à l'autre bout du fil quelques minutes plus tôt. Lui qui pensait avoir réduit toutes ses chances lorsque, le jour de l'entretien, il avait simplement fait un clin d'œil au chargé de recrutement lorsque celui-ci lui avait requis de lui montrer une qualité qu'il pensait être essentielle pour mieux vendre. Il était finalement heureux d'avoir osé miser sur le culot.

Pour la cinquième fois consécutive, la petite voix annonçant que l'interlocuteur était injoignable résonna. Le coréen marmonna dans sa barbe avant de se munir d'une veste et d'une paire de chaussures. Il sortit de son vingt mètres carrés dans le but de se rendre à Sinchon, le quartier abritant notamment la célèbre université de Yonsei. Alors que son regard se perdit parmi les numéros d'étages qui défilaient sur l'écran face à lui, l'ascenseur ouvrit ses portes pour accueillir un nouvel arrivant. Un jeune garçon aux cheveux de jais et aux traits masculins pris place dans la petite cabine, dos à Dongyoung. Ce dernier se stoppa dans sa contemplation afin de laisser ses yeux défiler sur la tenue de l'inconnu. Bien que plus petit que lui, il paraissait très intimidant. Ses épaules carrées le rendait imposant et sa tenue sombre accentuait son charisme. Et parmi tout ça se trouvait un petit porte-clefs vert en forme de grenouille attaché à sa besace noire.

Dongyoung retint un rire sonore face à l'objet mignon contrastant avec le reste. Lui qui revenait de plusieurs années à l'étranger, il n'avait jamais réellement laissé tomber le style vestimentaire de son pays d'origine, s'habillant toujours avec des vêtements très amples aux couleurs sobres. Mais s'il y a bien quelque chose sur laquelle il avait fait l'impasse, ce sont les accessoires mignons. Honnêtement, cela n'avait jamais été trop à son goût, mais il ne pouvait pas se cacher qu'il trouvait ça très mignon sur les autres.

Le son des portes glissant pour s'ouvrir devant lui le sortit de ses pensées. L'homme devant lui s'en alla en premier et Dongyoung le suivit en direction de la sortie de l'immeuble. Une fois dehors, ce-dernier pris à droite, se trouvant toujours derrière l'homme de l'ascenseur. Puis lorsqu'il atteint le bout de la rue et qu'il fut sur le point de prendre à gauche pour rejoindre la bouche de métro, il remarqua le noiraud emprunter ce même chemin. Sans surprise, une minute plus tard Dongyoung le vit descendre dans la bouche. Sans faire plus attention, il vint se placer derrière lui dans l'escalator les yeux planté sur son téléphone, à la recherche d'un appel de Yoonoh. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu'il découvrit que l'escalator le ramenait vers le haut. Il manqua de tomber lorsque sa chaussure se coinça entre deux marches. Il fit alors un pas en avant pour retrouver son équilibre mais se sentit s'écrouler de tout son poids lorsque le noiraud de l'ascenseur qui eut sûrement connu le même problème deux marches plus tôt tomba sur lui de tout son long.

« Je suis vraiment désolé. s'excusa l'inconnu au porte-clefs grenouille les joues rouges.

- Vous ne pouvez pas faire attention ? Il n'y a que deux escalators. Ce n'est quand même pas compliqué de prendre le bon. râla le plus grand.

- Je suis désolé. bégaya une seconde fois l'étranger avant de se relever. Mais si je puis me permettre vous avez aussi pris le mauvais. le signala-t-il avant de lui tendre la main.

Dongyoung attrapa celle-ci avant de se relever et de s'en aller sans rien dire de plus. Il avait horreur des gens qui le reprenaient, encore plus s'ils ne se connaissaient pas. D'où cet inconnu osait-il lui dire cela ? C'était de sa faute si Dongyoung s'était trompé après tout. Soudainement, il sentit de l'air dans le bas de son dos, le faisant frissonner. Il tâta cet endroit avant de réaliser que sa chemise avait elle aussi dut se prendre dans la marche et se déchirer lors de sa chute. Il grogna de mécontentement avant de la rentrer dans son pantalon. Le coréen accéléra le pas et finit son trajet sans recroiser l'inconnu cette fois. Il aurait du lui passer devant depuis le début s'il avait su.

Après plus d'une vingtaine de minutes de transport en commun et une nouvelle dizaine de minutes de marche, il arriva enfin à destination. Devant lui se dressaient trois bâtiments en pierre recouverts de lierre : Yonsei University. Il ne cessait pas d'être impressionné par la beauté de ce lieu. Il se demanda si ici les élèves étaient heureux d'aller en cours chaque jour. Car même si étudier n'avait jamais été son fort, il était persuadé qu'un lieu comme ça aurait tout de même joué positivement sur sa motivation en tant qu'étudiant.

Il s'assit sur l'un des bancs localisés face à l'entrée principale et profita du soleil. Son petit ami ne tarderait pas à arriver. Pour s'occuper, il pris un caillou qu'il lança dans sa main à répétition. Un quart d'heure passa avant qu'une ombre ne l'empêche d'avoir accès à plus de vitamine D. Il ouvrit difficilement les yeux et un grand sourire se dessina sur son visage lorsqu'il découvrit Yoonoh. Dongyoung lui fit une accolade rapide avant de le traîner vers la ville.

« Comment s'est passée ta journée ? demanda le plus jeune.

- Devine quoi ? J'ai eu le poste de vendeur ! hurla presque de joie le noiraud.

- Quoi ? Mais c'est génial ! Bravo, je suis très fier de toi. Je t'embrasserai presque tout de suite.

- Qu'est-ce qui t'en empêches ? sourit amoureusement Dongyoung. »

Les joues de Yoonoh se teintèrent d'un rouge léger. Il avait toujours du mal avec les démonstrations d'affection en public, d'avantage aussi près de son lieu de travail où il manquait de croiser des élèves à chaque seconde. Il planta malgré tout un baiser rapide sur les lèvres de son petit ami.

« Et toi, ta journée ça a donné quoi ?

- On est allé faire un premier cours de paddle sur la Han River avec le club et des élèves se sont battus au point qu'ils ont réussi à en casser un. Tu y crois toi ? Je pensais que ce truc était plus résistant qu'une coque de bateau. ris-il.

- Comment tu as géré la situation ? ris à son tour Dongyoung.

- J'ai sauté dans l'eau habillé pour leur dire de revenir.

- Tu n'es même pas allé les sauver ?

- Ce sont des adultes, ils n'ont pas besoin d'être sauvés. C'est plutôt moi qui aurait du être sauvé de leur chamailleries. »

Le couple continua sa discussion quelques minutes avant de se rendre à un café pour un rendez-vous amoureux. Juste avant de payer, le plus vieux demanda à Yoonoh de tenir le cailloux qu'il avait toujours dans la main le temps d'ouvrir son portefeuille. Le châtain le sonda d'un œil interrogateur.

« Merci mais c'est en quel honneur le caillou ?

- J'attendais et je me suis rendue compte que parmi le sol rempli d'herbe il y avait un caillou tout seul et ça m'a fait mal de le laisser. J'ai décidé de le prendre avec moi pour lui tenir compagnie, un peu comme quand je t'ai pris avec moi finalement. Mais bon je t'en fais cadeau si tu en es jaloux. se moqua le noiraud.

- En attendant, pendant toutes ces années tu étais tellement perdu au fond de ton île que personne d'autre que moi n'aurait jamais voulu de toi. T'as du tenir compagnie à beaucoup de cailloux avant que j'arrive.

Dongyoung lui asséna une petite tape sur la tête. Ils étaient niais, et Yoonoh adorait ça.