Chapitre 4

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Pendant plusieurs heures, Gabrielle essaya de comprendre ce nouveau monde dont elle ne se rappelait que de bribes. Elle planait complètement, en partie à cause de sa blessure à la tête qui lui provoquait d'intenses nausées et migraines, mais aussi à cause de toutes ces révélations délirantes. En l'espace d'une nuit, elle était passée d'une simple écrivaine fantasy, à la réincarnation d'Estréide Dymaris, fille de Goltraigue Dymaris, roi de Turéis. Elle avait vécu dans un monde peuplé de chevaux ailés, de faunes, de harpies et de centaines de créatures qui d'habitude, n'étaient que les produits de l'imagination des terriens.

Un monde où les Dymaris étaient respectés et sujets à de multiples théories et spéculations concernant leurs origines et leurs possibles dons. Un monde qui prétendait être prospère depuis des milliers d'années, mais qui s'écroulait morceau par morceau. Sa chute accélérée par les dirigeants qui en voulaient toujours plus.

À la levée du jour, sa tête était lourde et ses yeux lui piquaient, mais elle avait pu apprendre à connaître ses ravisseurs. Les jumeaux, Jane et Cyrius Magellan, étaient les enfants de Cassius et Octavia Magellan, médecins et professeurs venant de Markhab, engagés par Goltraigue lui-même pour instruire ses enfants. Cornélia quant à elle, venait de Liomynsk. Malheureusement, ses parents l'avaient vendu à des pirates parce qu'ils ne pouvaient pas s'occuper d'elle. Au cour d'une escale à Turéis, elle avait rencontré Cyrius, et par la suite toute la bande.

Elle en apprit aussi sur Estréide, cette mystérieuse fille dont elle avait hérité l'âme. Au niveau du physique, rien ne changeait, de grands yeux marrons et une chevelure aussi rouge que les plumes d'un phœnix. Au niveau du caractère, elle semblait similaire, sauf le fait que son plat préféré soit la tarte aux myrtilles et non la nourriture indienne, ce qui était logique quand on réfléchissait. D'après Jane, Estréide avait un frère aîné, mais Gabrielle, elle, était fille unique.

Elle avait compris pourquoi ses kidnappeurs semblaient avoir le même âge qu'elle alors qu'ils l'avaient attendu soi-disant une vingtaine d'années. Quelques années après sa mort, ils avaient demandé à Mera, une prêtresse, de leur lancer un sortilège pour ralentir drastiquement leur vieillissement et donc être en meilleure forme. Elle avait également entouré leur maison d'un bouclier qui la rendait invisible aux yeux des autres. Dans le cas contraire, leur tête aurait été accrochée à un pic depuis très longtemps. Alors en sécurité, ils avaient pu traquer mon âme et trouver une solution de la ramener ici.

**

Cornélia, qui n'avait pas prononcé un mot de toute la nuit, décida d'aller préparer le petit déjeuner quand les premiers rayons du soleil apparurent. Mais à peine avait-elle commencé à faire cuire les œufs qu'elle sentit la présence de quelqu'un dans la cuisine. Adossée contre l'embrasure de la porte, Gabrielle observait Cornélia, une question lui tourbillonnant dans la tête, sans avoir le cran de la poser.

- Qu'est-ce que tu veux ? Demanda sèchement Cornélia.

- Je cherche à savoir si ma tête ne te reviens pas où si t'es comme ça avec tout le monde, répondit Gabrielle en s'approchant du feu.

Le cœur de Cornélia se mit à battre encore plus fort, elle avait du mal à tenir sa spatule, et une boule lui dévorait les intestins. Elle ne pouvait pas contrôler l'effet que lui produisait Gabrielle, mais elle pouvait s'éloigner le plus possible d'elle.

- À ta place je me poserai d'autres questions.

- Je ne me souviens pas très bien de ma course dans les bois ou du fait que tu m'ai poursuivit, mais je me souviens de ton petit discours sur les sentiments que tu éprouvais envers Estréide. Je veux juste te rappeler que nous ne sommes pas du tout les mêmes personnes, et qu'il ne se passera jamais rien entre nous. Je suis là pour aider, je vais faire ce pourquoi vous m'avez amené ici, et ensuite je repartirai chez moi.

Le cœur de Cornélia se détacha de sa poitrine et s'écrasa sur le sol. C'était déjà assez compliqué comme ça de devoir la côtoyer mais si en plus elle était totalement différente d'Estréide, ça allait devenir physiquement douloureux. Elle se tourna vers la femme qu'elle croyait aimer, prête à fondre en larmes, à la supplier de ramener la vraie Estréide, prête à l'embrasser et à redécouvrir le goût de ses lèvres. Des milliers de scénarios s'enchaînaient à l'intérieur de son crâne, pendant un instant. Mais elle ne fît rien, à part serrer les dents pour retenir les énormes gouttes salées prêtent à s'enfuir de ses yeux, et retenir son souffle par peur que si elle respirait, elle exploserait.

Gabrielle se tenait en face d'elle, ne voyant qu'une femme complètement perdue, n'ayant absolument aucune idée de ce qu'il se passait vraiment. Elle ouvrit la bouche pour prononcer des mots réconfortants, mais rien ne sorti. Elle se contenta alors de tourner les talons et se diriger vers la bibliothèque où se trouvaient encore Jane, qui s'était endormie. Elle décida de ne pas la réveiller et sorti de la cabane, où elle vint à la rencontre de Cyrius, qui s'occupait d'Opale.

Derrière la cabane, là où se trouvait l'écurie, on pouvait apercevoir le soleil se lever, ainsi que son reflet sur la mer, encore calme à cette heure. Gabrielle se stoppa quelques secondes pour admirer le paysage, s'approchant peu à peu du bord de la falaise. Elle ferma les yeux pour sentir le vent frais sur son visage, continuant de s'approcher du bord. C'est ce moment que Cyrius choisit pour attraper Gabrielle par le bras et doucement la ramener vers un endroit moins dangereux.

- Ce serait bête de mourir avant d'avoir appris à monter un cheval qui vole pas vrai ? Dit-il en esquissant un sourire charmeur.

- Qu'est-ce qu'il s'est passé entre Estréide et Cornélia ? Répondit Gabrielle ne faisant pas attention à sa remarque.

- Il ne s'est rien passé entre elles, tu te fais des idées.

- Arrête de mentir pour la protéger et dis-moi ce que tu sais.

Cyrius soupira, sachant qu'il était sur le point de faire ressurgir de vieilles douleurs.

- Ça a toujours été compliqué entre elles, dès le moment où elles se sont rencontré. Estréide était une jeune princesse qui cherchait le grand amour, et Cornélia était une écorchée de la vie qui ne voulait pas ressentir une quelconque forme d'amour. Mais quand on tombe follement amoureux de quelqu'un c'est impossible de le cacher. Les regards langoureux et les frôlements sont devenus des baisers dans la cage d'escalier en pleine nuit.Mais on ne change jamais la nature de quiconque, même quand on est la fille du roi. Cornélia a continué de repousser Estréide, encore, encore et encore jusqu'à la rendre folle. Mais un jour, elle avait soudainement changé d'avis et elle voulait essayait de construire quelque chose de sérieux avec elle. Estréide était introuvable alors elle est juste rentrée chez elle. Le lendemain on a retrouvé son corps à la sortie d'un bordel, dans une marre de sang. Elle s'était poignardée avec une épée. Cornélia ne se l'est jamais pardonné et ne se le pardonnera jamais. Elle est ... tout le temps en colère, contre tout et tout le monde. Elle ne me l'a jamais dit mais je sais qu'elle aurait voulu être à la place d'Estréide ce soir-là.

Les larmes se mirent à couler toutes seules sur les joues de Gabrielle et Cyrius la serra dans ses bras.

- Je crois que je lui ai dit des choses horribles Cyrius je crois que je lui ai vraiment fait mal.

- Va t'excuser, et ensuite revient, il faut que je t'apprenne à monter.

Gloire et BrasierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant