Chapitre 5

15 2 1
                                    

Quand Gabrielle entra dans la cuisine, elle vit Cornélia, assise sur le sol, le visage rouge, gonflé et trempé de larmes qui semblaient couler toutes seules sans jamais pouvoir s'arrêter. Elle rempli un verre d'eau, s'assit à côté d'elle, glissa son bras autour de ses épaules, et lui dit :

- Je suis vraiment désolée, à propos de tout. J'espère vraiment que je vais pouvoir la venger, et aussi te faire comprendre que ce n'est en rien ta faute. Je suis sûre qu'elle ne t'en veut pas du tout.

Cornélia posa sa tête sur son épaule et bu un peu d'eau.

- Merci Gabrielle, merci beaucoup.

- Appelle-moi Gabby.

Après s'être ressaisies, les deux femmes finirent de préparer le petit déjeuner, parlant du monde de Gabby, Cornélia posant des dizaines de questions auxquelles il était parfois difficile de répondre comme par exemple le fonctionnement de ce « tramway » dont elle avait aperçu les lignes en allant chercher Gabby. Mais malgré le fait qu'elles venaient de mondes totalement différents en tout point, elles apprirent à se connaître et se rapprochèrent, exactement comme Cyrius l'avait prédit.

**

- Si tu continues de tanguer comme ça tu vas finir par soit vomir, soit tomber, essaie de bouger tes hanches au même rythme qu'Opale, tu gagneras en stabilité.

Cela faisait une heure que Gabrielle s'entraînait à monter Opale, et les résultats n'étaient pas très concluants. Elle avait encore quelques séquelles de sa chute d'hier soir et ses problèmes de dos n'arrangeaient rien. Au bout d'une heure et demie, elle abandonna et descendit de sa jument. Elle leva la tête vers le soleil, et se demanda si ses proches étaient déjà à sa recherche. Elle se sentait coupable, mais elle savait qu'elle finirait par rentrer, qu'elle leur expliquerait tout, et que tout finira bien. Pourtant, au fond d'elle, une petite voix lui murmurait qu'elle ne rentrerait jamais chez elle, qu'elle ne reverrait jamais sa famille et ses amis. Elle s'assit près du bord de la falaise et commença à se ronger les ongles, puis la peau autour. Cela faisait des années qu'elle avait arrêté, mais cette fois rien ne pouvait la calmer. Elle se rongea les ongles, la peau autour, jusqu'à ce que ses dix doigts soient recouverts de plaies et de sang. Son cœur battait de plus en plus vite, sa peau se couvrait de transpiration.

Jane observait Gabrielle depuis quelques minutes, ne sachant pas si elle devait la réconforter ou la laisser vivre ses émotions. Mais quand elle la vit se mettre à pleurer, elle décida que c'était trop. Elle se rendit dans la maison et prit le nécessaire pour soigner ses mains et retourna s'asseoir à côté d'elle, et sans dire un mot, lui prit la main droite et l'enveloppa dans un torchon imbibé d'alcool.

- Je ne rentrerai jamais chez moi pas vrai ? Demanda Gabrielle, tout en essayant de résister à la douleur de l'alcool lui brûlant la peau.

- Après avoir vaincu Goltraigue et avoir posé la couronne de Turéis sur ta tête, tu pourras faire tout ce que tu veux. Soit rester et régner, soit nommer quelqu'un d'autre pour diriger à ta place et rentrer chez toi.

- Et si je ne veux pas de tout ça, si je veux rentrer chez moi maintenant ?

- Tu as le droit, tu as le droit de partir, et de passer le reste de ta vie entourée des gens que tu aimes, dans un monde que tu as toujours connu. Si j'étais toi, c'est ce que je ferai.

- C'est pas vraiment malin de me dire ça si tu espères que je reste.

- Je veux que tu saches, que tu as le choix. Et je veux que tu saches que ce que je te demande, sera compliqué, douloureux et dangereux. Mais j'espère vraiment que tu vas rester, parce que des gens innocents sont morts, des gens innocents vont mourir, et tu es la seule qui peut stopper ça sans empirer la situation. Jane finit de nettoyer les plaies et appliqua un onguent qui sentait la résine de pin.

- Tu n'as pas l'impression d'en faire un peu trop ? C'est juste des petites plaies, tu sais, dit Gabrielle en regardant ses mains d'un air dégoûté.

- Il y a des bactéries que ton corps ne connaît pas, et on meurt d'infection généralisée pour moins que ça ici. Cyrius et moi, on est là pour éviter que tu meurs bêtement, en tombant de ton cheval ou d'une infection causée par une minuscule plaie sur l'annuaire droit.

- Et Cornélia, quel est son rôle ?

- Te donner une raison de rester, elle est douée pour ça. Comme un livre qu'on n'arrive pas à refermer même si nos yeux se ferment tous seuls à cause de la fatigue.

- Elle est plutôt bien partie.

Gloire et BrasierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant