11: Brûlures de larmes

29 4 0
                                    

Amed n'aimait pas les grands discours ou les longues prises de paroles. Cela faisait partie de sa nature introvertie mais ce manque de prise de paroles serait un désavantage dans cette situation, il en avait conscience.

Il se trouvait derrière cette longue et épaisse tenture, camouflé au mieux et prêt à intervenir. En cet instant, il se sentait terriblement ridicule et incertain mais il ne pouvait plus faire marche arrière.

Elle entra de nouveau dans sa chambre après avoir parcouru chacune des pièces de la maison sans y trouver personne. Quelqu'un s'était introduit pourtant, elle en était certaine. Plus elle avançait dans la pièce, plus son cœur qui était serré jusqu'à présent devenait léger et doux. Elle se sentait en sécurité alors que sans même le savoir elle se rapprochait du fugitif le plus recherché de la ville. Celui que les médias qualifieront plus tard de fou, de psychopathe, de délinquant ou encore de dégénéré.

Il n'avait pas l'air âgé ou agressif, il semblait même plutôt jeune mais il en restait dangereux et inquiétant. Elle s'avança dans la pièce dans un grand silence et eu l'occasion de constater que personne ne s'y trouvait. Néanmoins, quelque chose dans le décor lui semblait dérangeant et la tenture était légerement gondolée.

Son visage ne laissait rien paraitre mais ses mains tremblaient. Elle s'avança à nouveau vers la fenêtre et avant même qu'elle ne puisse l'atteindre, il sorti immédiatement lui laissant découvrir son regard, un bref instant. Elle resta stoïque sachant qu'elle n'aurait pas le temps d'atteindre la porte.

Elle vit une étincelle briller à travers la fente de la tenture et s'avança prudemment vers la vitre pour admirer les flammes qui dehors avaient nettement plus d'ampleur. Ils étaient tout les deux face à cette fenêtre et leurs deux reflets côte à côte se reflétaient dans la vitre. Elle se mit à pleurer en silence par crainte de ce qui allait se passer alors que lui souriait pour les raisons inverses. Elle ne voulait même pas lui adresser un regard et elle savait que ses cris seraient inutiles.

Elle resta figée regardant les flammes tandis qu'il s'asseya sur son lit, comme si la situation était amicale et anodine tout en commençant une discussion au sujet de la décoration.

A: Ta chambre ressemble à la mienne. De quoi te souviens-tu à mon sujet ?

M: C'est vous qui avez fait ça ?

A: Fait quoi ?

M: L'incendie.

A: ..Tu te souviens du jour où tu tu avais été interpellé par un son étrange ? Tu avais pris le temps de t'arrêter.

M: De quoi parlez-vous ?

Il la regardait avec intrigue tandis qu'elle le regardait avec mépris et le silence revint dans la pièce.

A: Tu as bon coeur..et des brûlures de larmes sur tes joues.

M: Je ne comprends pas un traitre mot de ce que vous dites. Je vous fais promets de ne pas vous causer d'ennuis si vous repartez d'où vous venez.

Il laissa échapper un soupir.

A: Je voulais simplement venir te saluer.

Il se dirigea vers la porte dans la plus grande des aisances et referma celle-ci derrière lui. Elle se contentait de regarder dans le vide incapable de penser et complètement déboussolée. Elle voulait s'assurer qu'il était bien parti (ou qu'il était bien réel) mais elle craignait de croiser son regard à nouveau ou de s'apercevoir qu'elle avait perdue la tête.

Devait-elle appeler la police ?

Elle s'asseya sur son lit les sourcils froncés et le regard pensif pendant presque une minute et se releva brutalement lorsqu'elle prit conscience qu'elle s'était assise à cette même place: celle qui était occupée il y a quelques secondes.

-Sa voix m'était familière et pourtant je suis certaine de ne jamais l'avoir entendue auparavant..et ce garçon semblait me connaitre..

Elle courut à toute allure dans les escaliers et s'arrêta face à la fenêtre donnant sur l'extérieur. Elle le voyait discrètement repartir sûr de lui, comme s'il revenait d'une simple dinette. Elle se surpris à garder la tête froide alors que ses crises d'angoisses habituelles auraient pourtant dû prendre le dessus face à une telle situation. Son sentiment de familiarité et d'intrigue dominait sur celui de la panique.

Sa tête était lourde et elle avait l'impression d'avoir été assommée. Cela n'avait aucun sens. Elle qui aimait s'interroger sur la signification des rêves, elle n'arrivait pas à deviner celle de celui-ci.

De son côté, Amed avait la tête bien plus légère qu'auparavant. Il avait ouvert les yeux sans surprise, et se sentait prêt à laisser cette pensée obsessionnelle derrière lui. Il était rassuré de voir que sa santé mentale était bien plus saine en réalité qu'en rêve mais tout cela était bien trop réel pour n'être qu'un rêve..

MALICEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant