Chapitre 17 : Exception

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Elle poussa un cri strident, si lugubre qu'il me glaça le sang, me gelant sur place. Dans la seconde qui suivit, elle s'embrasa, le feu se rependant au corps masculin ses côtés. Je me précipitais en avant mais tous les deux disparurent bien avant que j'atteigne la table.

- MAMAN, hurlais-je si fort que ma voix se brisa alors que mes poumons se comprimaient jusqu'à sembler imploser.

J'ouvris brutalement mes yeux qui furent aussitôt agressés par la pourtant très faible lumière qui parvenait à filtrer à travers la pièce alors que je me relevais tout aussi brusquement, envoyant valser sans même le réaliser un bras qui ne m'appartenait pas mais qui avait pris appui sur mon torse durant la nuit. Tandis que je tentais de reprendre ma respiration pour calmer mon souffle haletant, mes yeux naviguèrent dans la pièce, analysant tout ce qu'y s'y trouvait sans jamais s'y attarder comme s'ils cherchaient à s'accrocher à cet environnement familier pour faire taire la peur sourde résiduelle à mon cauchemar. J'avais beau le faire toute les nuits, il me faisait toujours le même effet, éveillant au plus profond de mon être une angoisse que je ne parvenais à dissiper qu'après de longues minutes de conscience.

Après la vue se fut l'ouïe que mon cerveau sollicita pour se rassurer. Mon souffle haché était le seul bruit venant briser le silence régnant dans ma chambre. Ce silence couplé à la noirceur des lieux auxquels mes yeux s'étaient finalement habitués me parurent soudainement bien trop oppressants et je me sentis comme prisonnier de mon lit et des draps qui me recouvraient. Ressentant le besoin irrépressible d'échapper à cette étreinte, je me débâtis un moment avec les couvertures avant d'enfin parvenir à m'en extirper. A peine mes pieds touchèrent-ils la moquette qu'une voix inattendue s'éleva dans mon dos.

- Jérem ?

Je me figeais sur place au son de cette voix rauque à moitié étouffée par le sommeil ou bien même par l'oreiller ou encore les deux. Arnaud. Qu'est-ce qu'Arnaud faisait dans mon lit ? Dans ma chambre ? Les souvenirs de la veille me revinrent brutalement en mémoire, inondant mon cerveau d'un trop plein d'images, de sons et de sensations, le saturant à m'en donner la migraine. Je parvenais à peine à assimiler toutes ses données tant elles défilaient vite. Quand enfin ce véritable déferlement d'informations se stoppa, je constatais que je n'avais toujours pas bougé si ce n'est pour m'agripper aux draps sous moi comme s'ils étaient une ancre. Mon ancre.

Je me sentais mal. Vraiment mal. Et ça n'avait rien à voir avec la quantité irraisonnable d'alcool que j'avais consommé la veille et qui s'attardait encore dans mon organisme en me donnant maux de tête, vertiges, nausées et autres joyeux désagréments accompagnant toute gueule de bois digne de ce nom. Ça n'avait rien à voir non plus avec mon cauchemar qui venait d'être refourgué sans ménagement au second plan de mes préoccupations, diluant par la même les effets persistants de la crainte désespérée qui aimait s'attarder en moi après chacun de mes réveils suite à ce rêve en particulier. Non. Tout ça n'était rien face aux souvenirs qui venaient de m'être rudement jeté au visage, me laissant lentement appréhender la triste vérité, la laissant m'envahir doucement pour que j'en réalise mieux l'horreur et la savoure dans toute sa consternante magnificence.

- Jérem ? ...a va ?

Je frémis en entendant sa voix retentir une nouvelle fois dans mon dos. Refusant de le regarder, je lui répondis sans même me détourner.

- Oui. Je reviens, rendors-toi.

Trop pressé de fuir sa présence, je ne vérifiais même pas s'il m'obéissait bel et bien. Je me levais vivement pour marcher à pas rapide mais bancal vers ma salle de bain dans laquelle je m'enfermais aussitôt le seuil franchit comme si cette porte dressée entre lui et moi allait empêcher ma mémoire de me torturer de ses trop nombreux rappels de la soirée de la veille. Dos au mur, je me laissais couler le long de ce dernier jusqu'à finalement me retrouver assis sur le sol, mes genoux levés devant moi et plaqués contre mon torse comme pour me protéger de toute agression. Position de défense qui ne marcherait pas aujourd'hui. Pas en cet instant. Pas alors que l'assaut était intérieur et qu'il me malmenait au gré du flux et reflux de mes souvenirs, me broyant à coup d'images mentales contre lesquelles je n'avais aucune arme et pas la moindre chance de lutter.

Dépendance | ⚠️EN PAUSE⚠️Où les histoires vivent. Découvrez maintenant