9. Toi ou personne d'autre.

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Lorsque je remonte le rideau du bar avant d'ouvrir la porte, je ne suis pas surpris de voir Harry sortir de sa voiture noir déjà garée devant mon commerce. Je lève les yeux aux ciel avant de retourner en cuisine chercher les dernières pâtisseries à mettre en vitrine. 

- Bonjour Louis.

- 'Jour.

- Tu... Est-ce que tu vas bien ?

- Qu'est-ce que je vous sert ?

- S'il te plaît, ne m'ignores pas...

- C'est marrant ça, j'ai eu plus que l'impression d'être ignoré depuis deux semaines, moi. Ça fait pas plaisir, hein ? Je répète : qu'est-ce que je vous sert ?

- Tutoies-moi, Louis, je peux t'expliquer.

- Ok, tu veux quoi ?

- Un caramel frappuccino et un assortiment de macarons. 

- Je t'apportes ça.

Je prépare sa commande et me dirige ensuite vers sa table, où il m'attend apparemment de pied ferme, pas décidé à travailler ou à me laisser tranquille.

- Louis, je te jure que je ne voulais pas que tu crois que je t'ignores, ou quoi que ce soit, mais...

- Que je "crois" que tu m'ignores ? je répète en mimant les guillemets avec mes doigts. Parce que ce n'est pas ce que tu as fait peut-être ? Qu'il y ait une raison quelconque, j'aurais totalement compris, vraiment, mais au minimum un message pour me dire que tu avais besoin de temps et que tu allais bien, ça t'aurais pas tué.

Il baisse les yeux et commence à jour de nouveau avec ses bagues, comme ce soir là. Il est nerveux, et ça m'énerve sans que je ne sache l'expliquer. Je cale le plateau sous mon bras et m'apprête à faire demi-tour, quand un mouvement de son index et de son pouce attire mon attention. Il fait tourner cette bague très fine, que je n'avais jamais remarquée. Cette bague en or cachée en dessous de sa bague au rubis rouge. Son regard suit le mien, les lèvres pincées, mes yeux effarés remontent vers son visage alors qu'il replace sa grosse bague, mais c'est trop tard.

- T'as pas fait ça ? T'es pas un connard à ce point-là quand même ? Je fulmine, attendant une réponse qui ne vient pas. Putain, mais même pas tu nies ? Tu trompes ton mari ou ta femme sans problème, et après tu reviens la queue entre les jambes car tu regrettes ? Je le fusille du regard, la colère coulant dans mes veines, je veux pas de problème avec la personne avec qui il est marié moi, il s'est bien foutu de ma gueule. Je ne suis qu'au final qu'une pièce rapportée avec laquelle il voulait jouer ?

- Je suis marié mais-

- Il n'y a pas de "mais" quand t'es marié. 

Les larmes me montent aux yeux mais je les chasse, hors de question de lui donner ce plaisir, ma colère prenant le dessus. Je vois rouge, aussi rouge que la pierre de la bague qui m'avait caché la vérité, aussi rouge que les quelques perles de sang qui apparaissent sur la peau de mes paumes lorsque j'y enfonce mes ongles, une habitude que j'ai depuis des années. Si pour moi le premier amour aurait un goût de bonheur, il a aujourd'hui un goût amer de regrets.

- Avec tout le respect que je te dois car t'es mon client, je continue en le voyant ouvrir la bouche, je ne vais pas te virer car je vaux mieux que ça, mais tais-toi, je t'en pris ou je risque de t'en coller une et j'en ai pas envie. Déjà que je suis rancunier de base, Harry, là tu t'es pas seulement foutu de ma gueule, ça je pourrais passer l'éponge parce qu'on ne se connaît pas depuis des années. Donc tu t'es dis qu'un baiser ça ne changerai sûrement rien, mais ça t'en savais rien. Tu t'es même pas demandé une seule fois si je pouvais être affecté et ce que je pouvais ressentir alors que tu m'as fait tourner en bourrique avec tes rendez-vous, et ce baiser. Et en plus de ça, le pire c'est que tu te fous de la tronche de la personne que tu as emmené de ton plein gré à l'église en lui promettant fidélité.

Deux destins liés [L.S]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant