Tue le ! - Thriller - TERMINÉ (TW)

Chapitre 4 : Ravisseur / MARS 2020

MARS 2020

L'odeur est ignoble. Mon collègue ne range jamais le bureau, le clavier est sale. Il y a de la poussière partout. Je regrette le temps du COVID. Au moins, le désinfectant coulait à flots. Les masques étaient de rigueur. J'aimais bien en porter, je pouvais grimacer à ma guise et être mieux protégé des microbes.

— La cinq.

Les gens ne sont plus polis. Je ne suis estimé de personne. Même pas par ma mère. Cette salope sans cœur. Je ne fais rien de bien comparé à mon frère. Directeur de banque, marié, belle maison, chien à la con.

Heureusement, il y a Victoire. Ma petite Victoire. Une qui me respecte. Elle est à moi et à personne d'autre. Elle m'écoute. Je suis celui qui commande, qui a raison.

— Quatre-vingt-dix-huit euros.

L'homme en cravate paye son plein avec sa carte gold à bord de son Audi rouge. Un vrai connard riche. Je déteste les gens impolis. Mais je le suis avec certains, quand ils le sont avec moi.

— Le ticket ?

— Non.

Au suivant. Quel boulot de merde. Vivement la débauche. J'ai besoin de me détendre avec Victoire. J'imagine déjà la voir trembler, entièrement nue. Sa peau frissonner et devenir rouge après la fessée. Ses petits seins tressauter quand je lui donnerai de violents coups de reins.

Ah Victoire, douce Victoire.

Elle est si docile.

Je ferme le cabanon qui me sert de bureau, me passe un coup de désinfectant sur les mains et salue mes collègues heureux, d'un beau et faux sourire.

Bande de pigeons, votre vie est encore plus merdique que la mienne.

Ici, je ne suis ni aimé ni détesté. Seulement, je me montre gentil. Je veux qu'on me voie comme ça. Norbert, le mec de quarante ans sans histoire. Et pourtant, contrairement à Jaufré, qui, en manque de relation, n'a pas baisé depuis six mois et qui est obligé de payer des gonzesses pour coucher... moi, j'ai ma pute personnelle à la maison. Une pute jeune, mignonne et qui peut baiser à toute heure. Beaucoup mieux qu'une femme et ses maux de têtes comme prétexte.

Je grimpe dans ma vieille Twingo et file à la maison.

Je suis quand même devenu propriétaire, avec mon "petit salaire merdique d'opérateur de station-service", comme aime me rabâcher ma mère. Mais ça ne suffit pas pour lui faire plaisir.

La maison n'est pas grande, soixante mètres carrés. Mais avec un sous-sol de la même superficie. Quand je l'ai visité, c'est le sous-sol qui m'a émerveillé. Sans fenêtre, deux pièces distinctes et une jolie affiche d'une femme nue collée au mur en parpaing. Cela m'a donné des idées. L'ancien propriétaire s'est fourvoyé en excuse lors de la visite et l'a arraché du mur après mon passage au sous-sol. Dans ma tête, je riais.

J'ai voulu acheter une maison à la suite de ma rupture avec Clodine. Une salope celle-là aussi. Les femmes, toutes des salopes. Elle m'a viré de chez nous, de chez elle. "Tu n'es qu'un queutard", "Tu es étrange" qu'elle me disait. Salope.

Je n'ai pas eu le droit à beaucoup de crédit auprès de la banque. Mon frère, quel con, il aurait pu me faire un passe-droit.

Finalement, cette maison était faite pour moi. Je n'ai pas fait de gros travaux à l'étage habitable. J'ai juste arraché les vieilles tapisseries et moquettes remplies d'acariens. J'ai tout lessivé du sol au plafond. Tout est clean, tout est rangé.

Je suis un bon voisin. Je ne fais pas de bruit, je range mes poubelles une fois le camion passé et j'entretiens très bien ma pelouse. Et celle dans ma cave aussi, Victoire.