Charlie

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2023

Charlie avec l'habitude de se promener le long de la grande avenue le week-end. Il s'agissait d'un moment privilégié entre lui et les énormes magasins de la rue, entre son curieux et toutes les bizarreries des vitrines, entre sa solitude et celle de ceux qui venaient la combler matériellement.

Charlie faisait honneur à la définition du week-end, qui était de passer un moment loin du domicile, loin des préoccupations quotidiennes pour s'adonner à des loisirs, quoi qu'ils puissent être. Ce jour-là ne faisait pas exception.

Il parcourait les échoppes, passant des légumes à la ficelle, des poignées de porte aux chaussures, des violons aux casquettes personnalisées... lorsqu'un passant s'étala à ses pieds. Charlie n'en fut pas surpris, il n'était pas le seul pressé qui perdait la tête et se déconcentrait une fois arrivé dans cette avenue. C'est pourquoi, en gentilhomme, il ramassa son sac au sol pour le lui rendre. Débordant de trésors, il attestait de sa récente visite dans un des magasins à proximité.

Ce qui surprit Charlie, cependant, fut le grondement derrière l'homme au sol. Il n'était pas le seul à courir dans cette avenue où marcher était mère de prudence. Charlie en fut encore plus secoué lorsqu'il remarqua que les deux hommes en question portaient des uniformes, siflaient à tue-tête devant eux et le pointaient d'un doigt menaçant. La raison aurait voulu qu'il attende les forces de l'ordre en restant aussi calme que possible, mais Charle l'avait sûrement laissé à la maison. C'est pourquoi, lorsque les trois agents furent assez proches pour que le jeune homme remarque leurs sourcils froncés, ce dernier prit la fuite, avec le paquet dans les mains.

Poursuivi à son tour, Charlie fit ce qu'il rêvait de faire depuis très longtemps : il entra dans le premier magasin sur sa droite, avec la même frénésie que ses pairs. Dans son dos, les policiers en firent de même.

Il se perdit alors dans les rayons et s'essaya au sport local qui était de zigzaguer entre les caddies chargés de trophées. Au détour du rayon accessoires, Charlie remarqué que l'homme au sol avait rejoint la troupe. Il lui crier de lui rendre son gain. À présent, aux trois policiers se rajoutait le voleur. Et bien qu'il aurait pu s'arrêter et lâcher le paquet, le fuyard avait à présent peur des retombées. Si bien qu'il se sentit obligé de continuer sur sa lancée.

Empressé, Charline ne remarqua pas qu'il avait embarqué un foulard dans sa course folle. Ce dernier devait pendre négligemment au bout de son rayon. Cependant, les employés du magasin le remarquèrent, elles. Et quand le jeune homme repassa les portes de l'échoppe dans l'autre sens, elles choisirent de le poursuivre également. Effrayé par l'attroupement. Soudain, la condition de Charline, on fait que plus fort, il ne devait pas s'arrêter. Les trois policiers, le voleur et les cinq employés ne le feraient pas eux.

Passant de magasins au magasins, l'envie devint toujours plus pressante d'y trouver refuge. Et pour cause, ses poursuivants recrutaient toujours plus de compatriotes. Charlie avait évité de peu un jambon pour se coincer une saucisse sous le bras. Il s'était aussi pris les pieds dans une paire de bottes en réparation et avait renversé du bleu sur ses habits. A présent, les trois policiers, le voleur et les cinq employés s'accompagnaient du boucher, du cordonnier, de la teinturière et de nombreux curieux souhaitant se prêter au manège.

Le malentendu ne pouvait plus être évité, et le jeune homme perdait son souffle. C'est alors qu'il vit, au bout de l'avenue, son sauveur, le géant supermarché de la ville. Entre le rayon alimentation et mode, il réussit tant bien que mal à disparaître derrière les nombreuses étagères regorgeant de produits en tout genre.

Les trois policiers, le voleur, les cinq employés, le cordonnier, le boucher, la teinturière et les curieux passèrent devant lui sans le voir. Toutes ces virées frénétiques avaient finalement fait perdre de leur vue l'essentiel. Comme quoi, la plus grande caractéristique d'un magasin est de s'y perdre, même soi-même.

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