- Il y a quelqu'un ?
Mary, la voisine, glisse sa tête depuis la porte d'entrée restée ouverte et demande :
- Gabrielle ? Georges ? Vous êtes là ?
Du premier étage, Georges répond :
- On est à l'étage Mary.
Mary, le prenant pour une invitation, grimpe à l'étage rejoindre ses nouvelles voisines.
- Salut les filles, je viens voir si vous vouliez vous joindre à nous ce soir. On se réunit régulièrement sur la plage au beau jour, avec plusieurs voisins. Ce sera l'occasion de faire de nouvelles connaissances.
Georges regarde Gabrielle, elle lui laisse toujours prendre l'initiative. Après tout, c'est Gabrielle qui a voulu fuir New-York et qui les a conduit jusqu'à Palo Alto. Gabrielle répond avec son sourire si rare c'est dernier temps.
- Ce sera avec plaisir, avec Georges on a besoin de se changer les idées.
Mary regarde ses voisines et la chambre qu'elles sont entrain de repeindre. La couleur choisie, les décorations, tout laisse à penser que la chambre va accueillir un nouveau né bientôt. Mary ne peut s'empêcher de demander :
- Vous attendez un heureux évènement ?
Gabrielle regarde Georges d'un air paniqué. Pour le moment personne n'est au courant à part Georges. Elle se sent coupable et ridicule avec cette grossesse qu'elle n'a pas voulu. Lorsque le week-end dernier elle a vu sa fille et sa compagne, elle n'a pas eu le courage de leur annoncer. Elle ne parle jamais de sa grossesse. Cette grossesse, lui rappelle la trahison de Hiro et comment elle a perdu définitivement Hélène. Car déjà Hélène avait du mal avec leur différence d'âge, alors si elle apprend que Gabrielle attend un enfant, elle l'aura définitivement perdue. Pourtant Gabrielle a fait le choix de garder l'enfant. C'est dure pour elle car cela signifie tirer un trait définitif sur son histoire avec Hélène. Elle sait qu'elle a pris la bonne décision mais cela reste douloureux pour elle. Et à chaque fois qu'elle pense à sa grossesse, cela lui fait penser à Hélène et ça fait mal à Gabrielle. Peut être devrait elle songer à se faire aider. Car une chose est sure. Elle a envie de garder cet enfant et de le voir grandir. Bientôt, elle connaitra le sexe de son enfant et pourra enfin se projeter dans une nouvelle vie. Peut-être est-il enfin venu le temps d'assumer sa grossesse. Et puis Mary, leur voisine, s'est toujours montrée chaleureuse et bienveillante.
- C'est moi, j'en suis presque à trois mois.
Georges est surprise, mais ravie d'entendre Gabrielle parler enfin de sa grossesse à quelqu'un.
- C'est super. Tu connais déjà son sexe ?
- Non pas encore. Pour tout te dire, c'est assez inattendue.
- Vous n'en vouliez pas ?
Georges, comprenant la confusion intervient :
- Je ne suis pas en couple avec Gabrielle. Je suis juste une amie.
Mary regarde tour à tour Gabrielle et Georges, puis, se disant que de toute façon ça ne la regarde pas, répond :
- D'accord, je croyais que vous étiez en couple et ça ne me posait pas de problème de toute façon.
Gabrielle penche la tête. Elle n'a pas envie de parler de ça et encore moins que sa voisine la voit en larmes. Car elle sent que les larmes vont bientôt arriver comme à chaque fois qu'elle pense à sa grossesse. Elle quitte la pièce précipitamment en disant :
- Excusez-moi.
Mary regarde Georges et lui demande :
- J'ai dit ou fait quelque chose qu'il ne fallait pas ?
Georges sourit à Mary et lui dit :
- Non, c'est compliqué en ce moment pour Gabrielle. Je crois que tu es la première à qui elle accepte de dire qu'elle est enceinte. Sa famille n'est au courant de rien.
- Mais pourquoi ? Elle ne veut pas le garder ?
- Si bien sûr. Mais les circonstances dans lesquelles elle est tombée enceinte, la rendent malheureuse.
Mary regarde Georges et lui dit :
- En tous les cas, si vous avez besoin d'aide pour les travaux ou pour quoi que ce soit, n'hésitez pas à nous demander. Avec Kev, nous serons ravis de vous venir en aide.
Puis, se retournant pour partir, elle dit à Georges :
- Si vous êtes toujours partantes, on vous attend à dix-neuf heures sur la plage. N'apportez rien, Kev prévoit toujours de trop. Et je prévoirais des boissons sans alcool, ne vous en faites pas.
Georges lui sourit encore une fois et lui dit :
- Merci Mary, on viendra, ça nous fera du bien je pense.Une fois Mary partie, Georges part retrouver Gabrielle. Comme d'habitude celle-ci est dans son bureau entrain de travailler ses cours. Elle commence à bien connaître Gabrielle. Lorsqu'une situation est trop pénible, Gabrielle va soit courir, soit elle se plonge dans son travail. Georges s'appuie sur le chambranle de la porte et, tout en regardant Gabrielle, lui dit :
- Mary nous attend pour dix neuf heures sur la plage. Je ne sais pas toi, mais moi j'irai. Ça me fera le plus grand bien et je pense à toi aussi. Il est temps que tu rencontres du monde et autres choses que juste des étudiants.
Gabrielle relève la tête. Elle a les yeux rouges, signe une nouvelle fois qu'elle a pleuré. Georges lui adresse son plus beau sourire. Elle ne sait pas quoi faire pour que son amie aille mieux. Alors elle s'approche d'elle et la prend dans ses bras.
- Ça va aller Gabrielle. Tu verras, tout va s'arranger.
Elle sent le corps de Gabrielle parcourir de soubresaut. Alors elle l'étreint encore un peu plus.
- Tout va s'arranger Gabrielle. Tout va rentrer dans l'ordre, tu verras, j'en suis sûre.
Gabrielle ne dit toujours rien. Elle aimerait croire ce que lui dit Georges mais pour le moment tout ce qu'elle ressent, c'est la douleur d'avoir perdu Hélène, c'est la peur de ne jamais réussir à aimer son enfant, c'est la colère vis à vis de Hiro et la crainte de ne pas retrouver une vie épanouie. Alors elle s'accroche désespérément à son métier et à son projet de marathon. Elle voudrait pouvoir tout oublier, elle aimerait pouvoir se réveiller et se dire que c'était juste un cauchemar. Elle a peur d'aller à New-York pour la remise du prix de sa fille. Elle sait qu'elle y croisera Hélène, elle sait qu'elle devra dire à ses enfants qu'ils vont bientôt être frère et sœur et elle a peur de leur réaction. Elle ne sait pas comment l'annoncer à son fils. Alors elle évite d'y penser car pour la première fois de sa vie, elle sent qu'elle ne maîtrise plus rien. Elle, qui est si forte, devient si fragile. Fuir a finalement été sa meilleure décision, mais elle sait que tôt ou tard, elle va devoir faire face à la vérité. Seigneur, jamais elle n'a prévue d'être à nouveau mère à 42 ans. Pourquoi faut il toujours que ses grossesses lui soient imposées ? Déjà à l'époque de son fils, elle n'avait pas prévu de tomber enceinte. Elle était bien trop jeune et commençait seulement ses études. Heureusement, Hiro avait pris soin de leur fils dés sa naissance. Mais elle ne voulait plus entendre parler de Hiro. Alors cet enfant sera son enfant, et tant pis si elle l'élèvera seule. Tant pis, si cet enfant la prive d'Hélène. Elle a fait un choix et l'assumera coûte que coûte. De toute façon, Gabrielle a toujours été têtue. Une fois qu'elle a pris une décision, rien ne peut l'en détourner. Cet enfant, elle le portera et l'élèvera seule. Elle se dégage de Georges et lui dit :
- Allons nous préparer. Ce soir, on doit faire la connaissance de nos voisins.
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Le marathon de New-York
RomanceAvec cette histoire, je tente un slow burn entre l'un des personnages de garde alternée et un de la famille Mialkowskyj Bernstein. Mes chapitres semblent de plus en plus long au fur et à mesure que l'histoire avance. Avant de commencer la lecture, i...