Essoufflements

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Lorsque Hiro voit Gabrielle arrivée en compagnie d'une des femmes qu'ils ont croisé samedi soir, il se demande encore une fois ce qu'a inventé Gabrielle. La femme qui se tient à ses côtés est toute frêle et semble toute fragile. Le genre de personne à qui on ose à peine serrer la main de peur de lui casser.
- Salut Hiro, tu te souviens de Georges ? On l'a croisé samedi soir.
- Bonjour Hiro.
- Bonjour Georges.
- A partir d'aujourd'hui, Georges va s'entrainer tous les jours avec moi.
- Elle compte courir le marathon elle aussi ? - Tu peux lui poser la question directement, elle est ni sourde ni muette.
Hiro grimace. L'entrainement de Gabrielle, c'était son moment privilégié avec elle. Il ne l'avait rien que pour elle, pendant plus d'une heure. Maintenant, il va devoir la partager avec cette femme qui semble aussi fragile qu'un pissenlit en graine. Que Gabrielle ne compte pas sur lui pour en faire une samouraï. Elle n'a rien d'une combattante. Pourtant, ce qu'il ne sait pas, c'est que d'ici quelques semaines, c'est Georges qui prendra sa place. C'est grâce à elle que Gabrielle continuera à sourire.
- Bon, assez perdu de temps. C'est parti.
Georges se tourne vers Gabrielle et lui dit :
- C'est moi ou j'ai un ticket ?
Gabrielle éclate de rire.
- Allez! Il est juste mal luné aujourd'hui. On ferai mieux de s'y mettre.
Gabrielle part en petit foulée et tente de se caler sur le rythme de Georges. Elle voit de suite que Georges dispose d'une bonne foulée. Ok, elle manque peut-être un peu d'entrainement mais avec le temps elle va vite reprendre un bon rythme. Surtout qu'elle optimise à fond ses foulées. Gabrielle essaye de ne jamais la dépasser pour ne pas lui mettre la pression. Elle ne sait pas depuis combien de temps elle n'a pas couru mais finalement Georges tient toute la séance d'entrainement. Même Hiro est admiratif. Ce petit bout de femme, toute fragile, cache bien son jeu. Elle s'est accrochée tout le long de la séance pour ne pas trop ralentir la course de Gabrielle et elle n'a rien lâché. Pendant que les deux femmes s'étirent l'une en face de l'autre, Gabrielle lui demande :
- Où est ce que tu as appris à courir comme ça ?
- C'est Sacha qui m'a appris. De toute façon, je n'avais pas le droit à l'abandon avec elle.
- Ah bon ?
- Ouais, faut dire qu'à l'époque j'étais un vrai déchet. Elle ne me pardonnait rien. Sans elle, je ne sais pas ce que je serai devenue. Je crois que de tout temps, c'est la seule personne qui ai jamais cru en moi.
Gabrielle plonge son regard dans celui de Georges.
- Moi je crois en toi. Ne doutes pas de toi Georges.
Gabrielle lui sourit et Georges rougit. Elle n'a pas l'habitude que quelqu'un s'intéresse à elle en dehors de sa famille de cœur, le clan Bernstein-Mialkowskyj. Gabrielle reprend :
- Allez viens, on va aller petit déjeuner. Tu vas voir Hiro, fais aussi bien la gueule que le petit déjeuner.
Gabrielle entraine à sa suite Georges. Cette dernière est contente que Gabrielle l'adopte aussi facilement. Depuis qu'elles ont passé la nuit à discuter, Georges se sent mieux. Gabrielle a su trouver les mots face à Georges. Cette dernière commence à comprendre, que peut-être, elle s'investie à chaque fois un peu trop dans ses relations et qu'elle ne doit pas avoir honte d'attendre de contrepartie et à minima le même investissement de ses partenaires. Une relation ne peut jamais être à sens unique. Hiro écoute les deux femmes discutées durant le petit déjeuner. Encore une fois, il a l'impression qu'une partie de Gabrielle lui est de nouveau arrachée. Décidemment, il a tout abandonné à Seattle pour rejoindre sa gazelle ici à New-York. Mais depuis qu'il est arrivé, c'est à peine s'ils ont passé une soirée ensemble. Son fils lui a bien dit la veille qu'il aimait sa famille comme elle était et qu'il souhaite juste que chacun de ses parents trouvent la bonne personne avec qui ils souhaitent vivre. Hiro est pourtant venu à New-York pour que Gabrielle ne soit plus seule et depuis qu'il est là, il ne sait jamais senti aussi seul. Quand il regarde les deux femmes, il a l'impression que c'est Georges qui est l'amie de toujours de Gabrielle et non lui. Mais sa fierté de Samouraï le pousse à ne rien laisser paraitre. Alors il sert les dents. Mais Gabrielle n'est pas dupe. Elle voit bien qu'Hiro est en train de se torturer. Elle propose à Georges d'aller prendre une bonne douche et lui dit qu'elle lui mettra quelques vêtements à disposition dans sa chambre pour elle. Bien-sûr, elles n'ont pas vraiment le même gabarit mais un short et un tee-shirt devraient faire l'affaire. Alors que Georges est sous la douche, Gabrielle vient discuter avec Hiro. Elle le prend dans ses bras et lui dit :
- Dis moi ce qui te tracasse mon samouraï ?
- Rien ma gazelle.
- Tu mens très mal.
- Ok, depuis que je suis ici, on a du passé pas plus de deux soirées ensemble. Je suis venu pour toi et tu n'es jamais là.
- Je t'avais dit que je m'occupais très bien de moi toute seule. Il ne fallait pas venir pour moi, mais pour toi.
- Je sais. Mais tu me manquais à Seattle et là, j'ai l'impression de t'avoir perdu. Tu t'es trouvé une compagne, une nouvelle amie. Et moi, dans tout ça ? Je serai à Seattle que ça ne changerai rien à ta vie.
- Toi tu es mon samouraï. Et jamais personne ne te remplacera. Tu es unique. Comme tu ne remplaceras jamais la place que d'autres peuvent prendre à mes côtés.
Gabrielle l'embrasse sur la joue avant de lui dire :
- Tu sais quoi ? Ce soir on pourrait tous diner ensemble ici ? Hélène, Georges, toi et moi ? Ça me ferai plaisir que tu rencontres Hélène. Si elle doit prendre une place dans ma vie, il faut que je te la présente officiellement.
- Tu l'aimes ?
- Je crois que je l'ai aimé dès que je l'ai vu.
- C'est comme un coup de foudre. Un peu comme Anna?
- Oui, comme Anna.
- Tout ce que je veux c'est ton bonheur Gab.
- Je sais Hiro.
- Alors invite là avec Georges ce soir et je vous préparerai le meilleur de mes repas.
- Tu sais que je t'aime Hiro.
- Moi aussi je t'aime Gabrielle.
Les deux anciens amants se serrent fort l'un contre l'autre, avant de se détacher à nouveau.
- Je suis heureuse de t'avoir dans ma vie Hiro, tu es mon meilleur ami, mon frère.
Hiro lui sourit. Il voudrait être tellement plus que cela, mais il sait qu'il l'a perdu le jour ou il l'a quitté. C'est la plus grosse erreur de sa vie et il la regrette tous les jours.
Gabrielle lui caresse la joue avant de lui dire :
- Je vais aller prendre ma douche moi aussi, il faut bien que l'un de nous travaille.
A ce moment, Georges arrive, habillée du tee-shirt et du short que Gabrielle lui a sortis. Hiro et Gabrielle la regardent avant d'éclater de rire.
- Quoi ? Je ne vous plais pas en épouvantail ?
- Tu es parfaite, mais définitivement, on ne fait pas la même taille.
- En même temps, on n'avait pas besoin de tes vêtements pour le savoir.
Gabrielle file à la douche et en passant devant elle lui dit :
- Ce soir, on dîne ici.
- Bonne idée.
- J'espère juste que le samouraï ce sera un peu déridé entre temps.
Gabrielle regarde Hiro et dit :
- Oui, il est juste un peu avare de ces sourires.
Et pour les faire mentir, Hiro leur adresse son plus beau sourire. Enfin cela ressemble plus à une grimace en réalité et les deux femmes éclatent de rire, bientôt suivi par Hiro.

Le marathon de New-YorkOù les histoires vivent. Découvrez maintenant