point d'interrogation [maxime&djilsi]

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Après le GP, la vie était redevenue plus calme. Sidjil appréciait le silence dans son appartement, entrecoupé par les pressions frénétiques de Manas sur la souris de son ordinateur.

Ils découvraient les rushs récupérés au Mans, nombreux et divers, impossibles à classer tant chaque moment était unique. Ils en étaient à la veille de la course, où quelques uns des participants étaient réunis avec Sidjil autour d'un cours de yoga sous la fraîcheur du crépuscule.

Sidjil avait du mal à suivre néanmoins, bien qu'habitué à devoir décortiquer des moments de sa propre vie pour les partager. Il pouvait se perdre sur son téléphone pendant plusieurs dizaines de minutes pendant que le lecteur avançait et que Manas notait au fur et à mesure ce qu'il imaginait pour la vidéo finale.

Il avait repris des nouvelles de certains pilotes depuis quelques jours. C'était une manière pour eux de faire perdurer l'événement entre eux le temps de quelques messages bienveillants, et Sidjil aimait beaucoup cette succession de petites bribes de gentillesse dans sa messagerie. Dans le lot il trouvait toutes les écuries, ses adversaires le temps de deux minutes de virages, de freins et d'accélérateurs. Il trouvait Gotaga en train de se vanter (avec une modestie particulièrement sournoise) de ses places d'avance par rapport à lui sur le tableau final, Kaatsup, Billy, Horty, Lucas, Yvick.

Néanmoins parmi tout ce joli monde il ne trouvait pas Maxime. Il ne le trouvait toujours pas. Il ne lui répondait pas ou pas assez. Quand ce n'était pas assez, Sidjil sentait dans ses mots une volonté sincère de le rassurer, une volonté empreinte d'une maladresse propre à Maxime. Il lui écrasait son moral en quelques mots posés à côté d'un emoji souriant comme s'il venait de lui annoncer qu'il était millionnaire.

"nannn t'inquiète pas Sid c'est pas toi le problème!! J'ai besoin de réfléchir sur certaines choses et de m'éloigner un peu mais c'est rien de grave je te jure 😁🙏🏻"

Des insultes se perdaient sur les lèvres de Sidjil. Heureusement que Nicolas était juste à côté parce qu'il aurait sûrement fini par s'énerver.

Il n'y avait toujours pas de raison valable à cette décision. Sidjil faisait de son mieux pour élaborer des théories crédibles mais il tournait en rond et la plupart devenaient des fantaisies illogiques. Maxime ne disait rien.

Il se souvenait parfaitement de son état la soirée après la course. Il se souvenait l'avoir bordé après lui avoir filé son propre sweat-shirt. Sweat-shirt qu'il n'avait toujours pas récupéré. Dans son insécurité la plus pessimiste, Sidjil parvenait à se dire qu'au moins Maxime ne l'oublierait pas s'ils venaient à ne plus jamais se voir.

Peut-être que Maxime le bloquerait dans quelques temps.
Peut-être qu'il attendrait le beau milieu de la nuit pour déposer une bombe dans ses messages et le détruire.

Sidjil vivait avec ces craintes depuis quelques jours déjà et il n'en parlait pas. Il se rendait compte qu'il avait une sale peur d'être abandonné et qu'il vivait plus mal que prévu le fait d'être autant éloigné de Maxime. La nuit dernière, il s'était réveillé au bout de deux heures de sommeil, incapable de reprendre là où il s'était arrêté, parce que sa tête oubliait des choses si évidentes sous les échos systématiques de ses inquiétudes, qui prenaient forme sous un seul petit nom. Il avait l'impression de s'être levé sans savoir où il était, sans savoir qui il était.

Il ne savait pas ce qui lui faisait le plus peur : découvrir les liaisons qui constituaient ses failles psychologiques et notamment cette peur de l'abandon, ou bien comprendre pourquoi il ressentait aussi fort le mal que lui causait Maxime.

Il avait fait face à tellement d'énigmes dans sa vie, et rien que les semaines précédentes avaient été demandeuses sur l'aspect psychologique, alors il avait espéré en rentrant du Mans n'avoir à se remplir la tête que de nouvelles idées pour entamer la rentrée sur sa chaîne. Mais Maxime aimait bien les surprises, des bonnes et des mauvaises.